Nommez-les, les meilleurs boxeurs de l’histoire du Québec, ceux qui vous ont fait vibrer depuis de décennies. Faites l’inventaire de ces guerriers du ring, de Jack Delaney (Ovila Chapdelaine) à David Lemieux, en passant par Arturo Gatti, les Hilton, Lucas, Grant, Alcine, Bute, Alvarez, Stiverne, Stevenson, Pascal. Pensez à ces boxeurs et placez maintenant au sommet de cette liste le nom d’Artur Beterbiev.

Après être devenu champion du monde à son 12e combat professionnel, Beterbiev est parvenu à unifier les titres à son 15e combat pro. Le protégé de Marc Ramsay, établi au Québec depuis 2013, a réussi ce qu’aucun autre boxeur québécois n’avait accompli auparavant en unifiant des titres mondiaux. Le champion IBF a ajouté à sa collection la ceinture WBC qui revient au Québec, après être passée autour de la taille des Adrian Diaconu, Jean Pascal, Bernard Hopkins, Chad Dawson, Adonis Stevenson et Oleksandr Gvozdyk.

La domination de Beterbiev a été sans partage, malgré la perception et l’incompétence crasse de deux juges, qui avant la victoire par knock-out technique au 10e round, accordaient l’avantage au boxeur Ukrainien avec des cartes de 87-84 (John McKaie) et 86-85 (Ron McNair). Il a fallu que Beterbiev envoie Gvozdyk quatre fois au plancher au 10e round, pour peut-être empêcher la présentation d’un vote honteux. Le pitoyable arbitre Gary Rosato, probablement ébranlé par sa mauvaise décision à la fin du 1er round, avait faussement estimé que Gvozdyk avait glissé au début du 10e round. Gvozdyk, qui depuis le 9e round ne présentait plus la capacité de rivaliser avec Beterbiev, a été envoyé trois autres fois au tapis avant la fin de la 10e reprise, pour que la victoire soit finalement décernée au Montréalais.

À la décharge des quatre officiels américains, il est vrai que l’action se déroule rapidement, et que le travail de Beterbiev est moins flamboyant. Les coups des artistes des combats rapprochés qui excellent au corps sont plus difficilement cernables que ceux lancés élégamment de l’extérieur. Pourtant, le travail de Gvozdyk avait bien été évalué par l’analyste Andre Ward, ainsi que par les observateurs de CompuBox. Ces derniers ont donné l’avantage à Beterbiev sur les coups qui ont touché la cible (161 c. 118), les jabs précis (48 c. 24), et les coups de puissance (113 c. 94).

Beterbiev, comme GSP

Chanceux que nous sommes, nous aurons l’opportunité de suivre la suite de la carrière de Beterbiev via les fantastiques boxeurs de la division des mi-lourds que nous avons eu l’occasion d’apprécier au cours des dernières années. Nous avons mieux connu Dmitry Bivol à travers son combat contre Jean Pascal, Idem pour Sergey Kovalev, qui nous a montré le meilleur et le pire de sa boxe dans ses combats contre Eleider Alvarez. Beterbiev pourrait également affronter Pascal, pourquoi pas! Oubliez toutefois un duel entre Beterbiev et Alvarez, en raison de Ramsay, l’entraîneur des deux hommes. Toutefois, un autre Alvarez pourrait faire l’affaire, si « Canelo » gagne son pari contre Kovalev, le 2 novembre prochain.

Mais ne brûlons pas les étapes et apprenons à mieux connaître Beterbiev, comme Georges St-Pierre l’a fait depuis que les deux hommes se sont rencontrés au gym Tristar. Si nous avons aimé GSP pour son intégrité, sa droiture, sa spiritualité, et son dévouement total pour son sport, nous devons reconnaître ces mêmes qualités à Beterbiev. Pour Beterbiev et GSP, il n’y a pas de compromis, c’est soit noir ou blanc. Les deux hommes ont mené leurs carrières respectives comme ils l’entendaient, au risque de ralentir la fréquence de leurs combats. Par sa façon d’être, GSP est devenu une icône, un combattant plus grand que son sport, reconnu internationalement. La reconnaissance internationale de Beterbiev vient de commencer. Je ne crois pas que son statut mondial sera aussi important que celui de GSP, mais apprécions tout de même le formidable boxeur que nous avons dans notre cour, grâce initialement à Yvon Michel et Anna Reva. Et souhaitons qu’un jour Beterbiev puisse livrer un combat majeur dans la province d’adoption de sa famille.