QUÉBEC – Le promoteur Camille Estephan n’avait pas été en mesure de ne pas manifester son mécontentement à la suite de la piètre forme physique affichée par les poids lourds mexicains venus affronter ses boxeurs lors de l’événement présenté le 7 avril dernier au Centre Vidéotron.

Agacé, il avait juré qu’« il y [aurait] des conséquences » et que plus jamais on ne le reprendrait à opposer un grassouillet de 273,6 livres au ventre particulièrement flasque à un de ses boxeurs.

 

Un peu moins de deux mois plus tard, Estephan est de retour à Québec. Il a eu amplement le temps de décolérer et le matchmaker Stéphane Loyer est toujours en poste. Il est celui qui a mis sur pied l’événement de samedi soir qui mettra en vedette David Lemieux et Karim Achour.

 

« C’est un processus. Il faut que les gens comprennent... je pourrais comparer cela à une saison de hockey. Les Canadiens doivent jouer 82 matchs, dont certains contre des clubs qui ne sont pas des champions de la coupe Stanley », a mis en parallèle Estephan en entrevue à RDS.ca mercredi.

 

« Ce ne sont pas toujours les Penguins de Pittsburgh qu’ils affrontent. C’est un peu comme cela que les carrières de nos boxeurs se développent. Ce qui est important, c’est de leur amener des défis qui sont à leur niveau et ne pas les ralentir en tenant absolument à leur bâtir une fiche. »

 

Si Eye of the Tiger Management comptait en ses rangs plusieurs boxeurs qui avaient été laissés pour compte par les autres à ses débuts, la situation est complètement différente aujourd’hui alors que plusieurs de ses athlètes ont connu immensément de succès dans les rangs amateurs.

 

De plus, plusieurs de ces pugilistes en sont aux balbutiements de leur carrière professionnelle, si bien que leurs premiers combats sont inégaux étant donné que la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec exige qu’« un concurrent doit avoir livré un minimum de 4 ou 6 combats de 4 ou 6 rounds et en avoir gagné 50 pour cent avant de livrer un combat de 8 ou 10 rounds ».

 

« [Dans le passé], nous avons souvent été critiqués d’avoir mis nos boxeurs dans des situations difficiles. Le dernier gala, c’était le 38e que nous faisions et c’est la première fois que nous nous faisions critiquer de la sorte, a rappelé avec fierté Estephan. Mais nous nous sommes ajustés. »

 

Le promoteur n’a pas dit quels ajustements concrets ont été apportés, mais en lisant entre les lignes, il est possible de comprendre qu’encore plus d’argent a été mis sur la table pour obtenir des confrontations plus relevées que celle qui a opposé Kean au bedonnant Ignacio Esparza.

 

Pour le moment, Estephan est convaincu que les amateurs passeront l’éponge pour ce faux pas, sauf qu’il sait pertinemment qu’il ne peut pas se permettre d’offrir trop souvent un produit de piètre qualité, parce que ce sont ultimement les boxeurs d’ici qui en paieront chèrement le prix.

 

« Je ne veux pas discuter de ce que les autres font, mais tous les amateurs qui assistent à nos galas ont payé leur billet, s’est-il vanté. Beaucoup de nos boxeurs vendent eux-mêmes un très grand nombre de billets, alors il faut absolument investir afin de leur dénicher de bons rivaux.

 

« Je l’ai déjà dit : c’est un processus. Nous ne pouvons pas rivaliser avec les meilleurs en ne leur proposant pas de vrais défis. C’est possible de le voir avec d’autres organisations de sport professionnel : celles qui n’investissent pas dans le talent n’ont pas des résultats heureux. »

 

À terme, l’homme d’affaires prétend même que les amateurs qui se rangent massivement derrière un boxeur peuvent avoir une influence sur la progression de la carrière de ce dernier.

 

« Les amateurs de la Mauricie bénéficient du phénomène Kean. Ils ont répondu en grand nombre lors du gala contre [Alexis] Santos et l’événement a été profitable, a conclu Estephan. Ils auront maintenant droit [au duel face à Adam Braidwood] qui est très important pour Simon. »

Le promoteur reconnaît que l’équilibre est fragile, mais qu’il est son devoir de le maintenir.