Ça y est, nous sommes maintenant rendus à Nottingham, en Angleterre, pour le championnat du monde WBC des super moyens. Je suis arrivé dimanche ayant quitté samedi soir après le gala du Casino mettant en vedette Sébastien Demers et Walid Smichet. Jean Pascal en compagnie de son entraîneur Marc Ramsay, le représentant de son groupe de gérance Steve Rasier, le psychologue sportif Robert Schinke, le massothérapeute Martin Brissette, son préparateur physique Luc Richesson et sa nutritionniste Anita Richesson sont arrivés ici vendredi dernier.

On m'a demandé, il y a plusieurs semaines, d'écrire un texte sur la préparation et l'entraînement de Jean, mais j'en ai été incapable. Je cherchais le bon angle pour faire quelque chose d'intéressant, mais je ne pouvais pas sans parler de son camp. Une consigne importante que toute l'équipe a adoptée à partir du moment où le Québécois a débuté sa préparation en Arizona a été de ne pas faire de déclarations et de limiter au maximum la dissémination des informations émanant du camp. J'étais tout à fait d'accord avec cette consigne.

Il y a plusieurs raisons à cette décision. En l'espace de trois mois, de novembre à janvier dernier, selon une perception générale transportée par de nombreux membres des médias de chez nous, Jean est passé du plus bel espoir canadien, à la suite de ses 19 victoires consécutives flamboyantes et spectaculaires, à une grande gueule pas capable de livrer la marchandise sur le ring!

Qu'est qu'il a fait de mal? Il a dit qu'il aurait passé le KO à Alexandro Berrio plus rapidement que Lucian Bute et que dans un éventuel affrontement avec Bute, il serait le vainqueur. S'il avait fait la même déclaration au sujet de Kelly Pavlik, Mikkel Kessler ou même Joe Calzaghe, tout le monde aurait louangé sa confiance. Mais en faisant cette déclaration sur Bute, on a crié au sacrilège!

Ses deux derniers combats, il les a livrés blessé et diminué, encore plus qu'on le croyait tous. On l'a découvert à la suite d'examens plus approfondis au retour de la Floride, en janvier. Si ces combats ont eu lieu, c'est parce que Jean est un "fighter" un "performer", qu'il aime le moment ou la première cloche sonne et ce jusqu'au dénouement du combat. Dans sa tête, il n'y avait rien qui pouvait l'empêcher de se produire devant près de 15 000 personnes et un million d'auditeurs, le 7 décembre 2007. Même chose, il n'y a rien qui l'écarterait d'une première apparition sur un ring américain, à la télé américaine en janvier.

Sur le coup, nous avons regretté d'avoir cédé à ses pressions. Chez nous, il n'a pas été manqué dans l'opinion populaire. Personne n'a discouru sur le courage d'avoir boxé dans ces conditions et remporté des décisions non équivoques, on a plutôt parlé de contre-performances et on lui a conseillé dorénavant de se la fermer!!!

C'est effectivement ce qu'il tente de faire depuis quelques mois, se concentrer sur la tâche et limiter les discours n'en déplaise, encore une fois, à plusieurs. Quand c'est arrivé, il a encaissé durement le coup, mais il est intelligent et il a appris. Ce qui est arrivé l'a poussé à regarder sa carrière en perspective, tenter de bien comprendre autant les bons points que les moins bons et corriger le tir.

Finalement, cette période de novembre à janvier dernier, bien qu'on ne souhaite ça à personne, aura été très productive pour Jean, nous et toute son équipe. Ce fut le catalyseur qui aura permis à Jean de devenir l'athlète, le boxeur qu'il est présentement. Quand on dit que ce qui ne tue pas rend plus fort, c'est exactement ce qui est arrivé!

Ça ne s'est pas produit d'un seul coup, ce fut progressif et les blessures physiques autant que mentales ont été longues à guérir. Ce n'est pas délibérément que le champion nord-américain n'a pas boxé depuis ce temps. On savait que la conjoncture le placerait, avant longtemps, en position d'un combat de championnat du monde dans la division. D'ailleurs, avec ce combat contre Froch, nous avons eu deux offres de combats de championnat du monde et deux offres de championnat éliminatoire.

Ce n'est pas par stratégie qu'on l'a retiré du gala du Stade Uniprix de juin dernier. Son épaule démontrait encore des signes de faiblesse, pas autant qu'en décembre ou janvier, mais nous n'étions certainement pas pour commettre la même erreur. Le Lavallois a tout de même insisté pour boxer, mais pas avec autant d'ardeur que quelques mois précédents. Il n'y avait plus de chances à prendre. On a voulu reporter son combat contre Zuniga en août, mais finalement les négociations pour le combat de samedi prochain avaient débuté.

Donc, à quatre jours du combat le plus important de sa carrière, le représentant canadien aux Jeux olympiques d'Athènes est dans la plus grande forme et dans le meilleur état d'esprit de sa carrière. Il a la confiance d'avoir fait les sacrifices nécessaires, d'avoir payé le prix à l'entraînement, d'avoir les habilités et la stratégie requise pour être vainqueur samedi.

Évidemment, Carl Froch, invaincu également, pense différemment! Il est chez lui, il vient d'avoir 31 ans et il est professionnel depuis près de six ans. Pour lui, c'est maintenant ou jamais! On s'attend à ce qu'il soit lui aussi au sommet. S'il a basé son évaluation sur les dernières sorties de son adversaire, il est fort possible qu'il ait de petites surprises.

De toute façon, comme on dit dans le milieu " Someone O must GO! " On a deux jeunes boxeurs qui ne savent pas ce que c'est que de perdre et qui vont donner jusqu'à leur dernière once d'énergie pour l'emporter. L'un des deux sera immédiatement consacré vedette de la division et le perdant subira un recul important. On va donc assister à un combat intense, spectaculaire qui va nous tenir sur le bout de notre chaise du début à la fin!

Il y aura une conférence de presse demain ou les deux boxeurs vont se rencontrer pour la première fois. C'est également demain matin que le reste de l'équipe va arriver, les assistants de coin Russ Anber, Michele Moffa, Laslow Marien, Pietro Napolitano, le docteur Francis Fontaine et le physiothérapeute Dev Chatterjee. J'ai bien hâte à ce premier face à face et je vous assure que je vais goûter à chaque seconde de cette confrontation samedi! Je ne dis pas que ce sera facile mais lundi, on ramène la ceinture que possédait Éric Lucas chez nous!

Bon combat!