MONTRÉAL – C’est plutôt ironique de penser que Gennady Golovkin et son clan soient arrivés avec 1h15 de retard alors que son entraîneur Abel Sanchez croit qu’il l’emportera en seulement quatre rounds (12 minutes) contre David Lemieux.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les amateurs n’auront pas à attendre aussi longtemps pour connaître l’identité du vainqueur du prestigieux combat d’unification qui sera présenté le 17 octobre au Madison Square Garden.

Ce conseil a été utilisé par plus d’un intervenant, mais les fervents de boxe ne devront pas quitter leur siège ou leur téléviseur des yeux puisque le dénouement pourrait survenir sans avertissement.

L’engouement créé par cet affrontement de prestige ne se dément pas comme le prouve la vente colossale de billets. Toutefois, lorsqu’on sonde l’avis de quelques intervenants bien connectés de la boxe québécoise (athlètes et entraîneurs), certains craignent que Lemieux soit envoyé à l’abattoir – au sens figuré – en croisant le fer si rapidement avec ce redoutable cogneur (33-0-0, 30 K.-O.).

Le verdict est un peu dur, mais il faut savoir que Golovkin a même trouvé le moyen d’embêter Sergey Kovalev lorsque ce dernier s’entraînait aussi sous la férule d’Abel Sanchez et qu’ils s’affrontaient entre les câbles.

Doté d’une solide confiance, le boxeur québécois n’a pas tardé à s’opposer à cette version.

« Premièrement, on n’envoie jamais Lemieux à l’abattoir », a répondu Lemieux sous les applaudissements du public. Ensuite, je suis prêt plus que jamais pour un combat contre Golovkin. S’il y a un boxeur sur la planète qui est de taille à l’affronter, c’est moi. Mais je ne veux pas juste l’affronter, je vais remporter ce combat. »

Sans surprise, son entourage a tenu un discours similaire en incluant son entraîneur Marc Ramsay, Mike Moffa qui prend parfois la relève de ce dernier quand il est trop occupé, son gérant Camille Estephan et même le légendaire Bernard Hopkins de Golden Boy Promotions.

« David est arrivé au sommet de son art, il était temps de procéder. À un moment donné, en boxe professionnelle, il faut sauter dans le train », a émis Ramsay qui a développé une panoplie de boxeurs de haut calibre avec son équipe.

Ce qu’il faut cependant comprendre, c’est qu’une occasion d’unifier son titre IBF à ceux WBA, IBO et WBC intérimaire de Golovkin n’arrivera pas trop souvent. C’est encore plus vrai alors que le gagnant de ce duel sera confronté à celui du choc entre Miguel Cotto et Saul 'Canelo' Alvarez.

« Quand on nous présente une telle possibilité, rien ne nous promet que l’offre sera encore sur la table par la suite. Lorsque la majorité de nos demandes sont acceptées, il faut accepter », a convenu Ramsay.

Golovkin est donc arrivé – avec tout le respect qui le caractérise – au deuxième des trois volets de cette tournée médiatique sur le tard, ce qui a empêché d’assister à un face à face avec Lemieux.

Si l’on doit croire les propos et les excuses du clan Golovkin, leur retard est attribuable à une mauvaise information par rapport à l’heure de la conférence de presse tenue dans un cinéma montréalais. Les mauvaises langues disaient qu’il était trop occupé à dévorer un popcorn ou bien un des charmes du Québec, une poutine.

Débarqué à Montréal quelques heures après la conférence de presse de mardi à New York, GGG n’était pas venu au Québec pour allumer des feux. Environ 24 heures plus tôt, il avait reconnu qu’il ressentait des craintes envers ce duel d’envergure, mais ce discours n’a pas convaincu Ramsay, qui connaît le boxeur originaire du Kazakhstan depuis plus de 15 ans.

« Je ne le crois pas du tout. Il faut préciser que son anglais n’est pas exhaustif. Il n’a pas peur, il n’est pas hésitant même s’il peut sentir quelques craintes », a soutenu Ramsay. David Lemieux

Même s’il voue un grand respect à Ramsay qui a permis à Lemieux de parfaire ses habiletés de boxeur, Sanchez a été plus tranchant que son poulain dans ses propos.

« Je dis qu’il l’emportera en quatre assauts parce que je dois être confiant que Gennady gagnera. Je ne pense pas que ça se rendra aux pointages des juges », a proposé le réputé entraîneur.

Bien sûr, même s’il devait s’incliner dans l’arène du MSG, il ne s’agirait pas d’une finalité pour Lemieux qui aurait l’occasion de se reprendre. Ceci dit, la qualité de sa prestation influencera la suite de sa carrière et un triomphe de sa part viendrait définitivement marquer l’histoire.

Selon les observateurs, la commande s’annonce toutefois imposante puisque le puissant boxeur formé au Québec est négligé à 7 contre 1 d’après la plupart des sites spécialisés. Mais ce ne serait pas la première fois que Lemieux ferait mentir les sceptiques.

Ramsay croit d’ailleurs que le statut de négligé sied à ravir à Lemieux.

« Je pense que ça cadre bien avec son profil parce qu’il croit beaucoup en ses capacités », a confié Ramsay en admettant que la préparation sera ardue contre un adversaire aussi complet.

Même si le combat ne risque pas de s’éterniser, l’attente semblera interminable pour les plus avides partisans qui n’ont pas souvent la chance d’assister à des confrontations aussi attendues. Ils devront patienter pendant huit semaines avant d’être rassasiés ou non par le combat auquel plusieurs Québécois assisteront.

Hopkins passe le flambeau avec fierté

Par une belle coïncidence, le Madison Square Garden avait été, en 2001, le théâtre de l’unification des titres WBC, IBF et WBA des poids moyens. En cette soirée du 29 août, le phénomène Bernard Hopkins avait triomphé aux dépens de Felix Trinidad dans une réussite qui a marqué sa carrière.

Hopkins a forgé sa réputation dans cette division et il ne pourrait être plus fier de passer le flambeau à Lemieux et Golovkin 14 ans plus tard.

« Je pense que Lemieux a les ingrédients pour surprendre GGG, mais il faut croire qu’il devra s’approcher de la perfection pour y arriver », a évalué Hopkins qui croit que ce combat fera parler pendant des années.

Parlant de perfection, Estephan donnait raison à Hopkins et il a fait une allusion intéressante à Wayne Gretzky quand il s’est présenté au MSG.

« J’ai vu les photos de Gretzky, un grand Canadien, sur les murs. J’ai dit que j’amenais un autre Great One en David Lemieux », a utilisé Estephan pour mousser le potentiel de son boxeur.

Les intervenants de la boxe étaient nombreux à la conférence de presse mercredi et ils ont pratiquement tous eu des réticences quand le projet d’un duel Lemieux-Golovkin est devenu possible.

Maintenant que la machine est en marche, de petits détails pourraient faire la différence et l’entraîneur Abel Sanchez prétend que l’intelligence sera le facteur clé.
 

« Il a toujours voulu affronter les meilleurs »
« On va là pour battre Golovkin »