« Sur le coup, je me suis dit : '' Ça y est, il y a mort d'homme.'' »

« Ça donne des frissons. »

« J'ai eu une grosse frousse. »

« C'est quelque chose de terrible que nous avons vu. »

Voilà les mots employés par de nombreux pilotes québécois à notre journaliste Daniel Richard. Les pilotes auxquels nous avons parlés au lendemain de l'accident de Romain Grosjean au Grand Prix de Bahrein ont tous été secoués par ce qu'ils ont vu. Pour certains, ça rappelait des souvenirs douloureux.

« Pour avoir frappé à Barcelone, c'était le dernier tour de piste de la qualification. Quand j'ai touché le vibreur, l'aileron s'est arraché, se remémore Bertrand Godin, ancien pilote de Formule Atlantique. J'ai vu le mur arriver très bien et dans ma tête, je me suis dit très calmement : ''D'après moi, je vais perdre connaissance sur ce coup là.'' »

Alexandre Tagliani a également vécu un moment effroyable lors d'un contact avec Alessandro Zanardi, puis un autre, à Fontana, en 2000.

« J'ai frappé le mur de reculons, à 228 milles à l'heure. L'impact était à 90 degrés avec le mur, ça m'a pris un mois avant de remarcher. Je me suis évanoui sur le champ et je me suis réveillé dans un hélicoptère », raconte Tagliani.

Même s'ils sont passionnés de course automobile, c'est faux de croire que les pilotes ne remettent jamais leur métier en question.

« En 2006, c'était ma dernière saison en Indy Car. Cet hiver-là, je me suis vraiment demandé si j'étais dans une série sécuritaire. Les ovales, je n'ai jamais trippé en IndyCar, je trouvais que ça allait trop vite. Malheureusement, il y a eu des accidents, il y a eu des morts, des amis proches. C'est une des raisons pourquoi je suis parti dans le domaine du Nascar », explique le Québécois Andrew Ranger.

Et malgré tout, les pilotes répètent : oui, il y a des risques, mais...

« Même nous-autres, on ne pense plus à ça. On roule 300 kilomètres à l'heure, on est à l'aise. On est comme dans notre salon chez nous. Quand tu vois un accident comme ça, tu retournes à la réalité  », dit le pilote Nascar Alex Labbé.

« Tu ne peux pas garder ça en tête. Parfois, ça revient un peu, mais tu ne peux pas te permettre de garder ça en tête. Il faut être extrêmement focus sur les bonnes choses et se concentrer sur les choses qui sont importantes. », selon le vétéran Louis-Philippe Dumoulin.

« Des leçons devront être tirées de l'incident »

Dans certains cas, c'est l'âge qui vient adoucir les plus téméraires.

« Si j'avais 18 ou 20 ans, n'importe quelle opportunité, je la prendrais. Mais à l'âge que j'ai, avec une famille, je regarde une équipe qui coupe les coins ronds, je le sais, et je vais quand même dans l'auto. C'est là qu'il peut arriver des incidents », se souvient Tagliani.

« Je crois qu'on est plus sage. De là à dire qu'on est moins téméraire... On tente de prendre des risques plus calculés », explique Dumoulin.

Les pilotes s'entendent tous pour dire que les changements apportés au chapitre de la sécurité à la FIA ont probablement sauvé la vie de Romain Grosjean.

« Je me suis dit 'il y a mort d'homme' »
« Ça prouve que le système est efficace »
« Ça peut arriver à toutes les courses »
« Ça ramène les pieds sur terre »
Romain Grosjean, le miraculé

 

ContentId(3.1378046):Bertrand Houle : « Ç'a tout pris pour qu’il sorte à temps » (Formule 1)
bellmedia_rds.AxisVideo