Ça faisait déjà quelques mois qu’on en parlait, mais lundi, la Formule 1 a confirmé que trois Grands Prix cette saison auront un format modifié afin d’y présenter des courses qualificatives le samedi après-midi.

La F1 n’a toutefois pas indiqué quelles seront ces épreuves, mais a précisé qu’il s’agirait de deux Grand Prix en Europe et d’un à l’extérieur du Vieux-Continent.

Vous pouvez lire l’article publié lundi en lien avec cette annonce, mais je vous fais un petit résumé du nouveau format. Le vendredi, la 1re séance d’essais libres sera présentée en matinée, suivie, en après-midi, d’une séance de qualifications avec le format que nous connaissons bien maintenant, soit les Q1, Q2 et Q3. Le résultat de cette qualification déterminera l’ordre de départ de la course qualificative.

Ensuite, samedi matin, les équipes peuvent profiter d’une autre séance d’essais libres, puis c’est le moment de notre fameuse course qualificative. L’épreuve sera d’une longueur de 100 kilomètres, soit environ le tiers de la distance d’un Grand Prix normal. Le résultat de l’épreuve déterminera la grille de départ pour la course du dimanche. Aussi, il est important de noter que les trois premiers au classement de cette qualification nouveau genre récolteront des points, soit 3 pour le vainqueur, 2 pour le deuxième et 1 pour le troisième.

J’avoue avoir quelques questions concernant ce nouveau format, et nous y reviendrons plus tard. Toutefois, commençons par le positif de cette annonce.

Premièrement, j’aime toujours quand un sport se remet en question et cherche des façons de se renouveler et d’attirer davantage d’amateurs. Ce n’est pas parce qu’une façon de faire existe depuis des dizaines d’années que c’est toujours la meilleure. Depuis l’arrivée de Liberty Media, la F1 n’hésite pas à se renouveler.

J’aime le fait qu’on prenne le temps de tester un nouveau format avant de décider si on l’implante ou non. On se souvient du fiasco des qualifications par éliminations de 2016, n’est-ce pas? Intriguant sur papier, ce nouveau format s’était avéré une catastrophe, si bien qu’il avait été abandonné après deux Grands Prix seulement. Au moins, cette fois, on pourra en savoir un peu plus avant de prendre une décision.

Ce format vient aussi augmenter l’engouement de chaque journée d’une fin de semaine de course, surtout pour les partisans sur place. Avec une séance de qualifications le vendredi, une course qualificative le samedi et la vraie course le dimanche, chaque jour, on aura doit à un événement qui viendra influencer le cours de la fin de semaine.

On espère surtout qu’avec ces courses qualificatives, les surprises seront au rendez-vous. Un pilote de pointe brise son aileron lors d’un départ un peu serré? Le voilà qui s’élancera en fond de grille le lendemain. Le but est de voir plus d’action en piste et des batailles dès le samedi après-midi.

Ces courses plus courtes offrent aussi un format qui risque de plaire aux plus jeunes. On le voit ailleurs, tous les sports tentent de réduire la durée de leur événement. Une course d’environ 30 minutes pourra permettre d’attirer un public qui n’a pas envie de s’asseoir 2 heures devant la télévision... et qui sait, de peut-être l’accrocher assez pour l’inciter à rester parmi l’auditoire le dimanche!

Finalement, j’aime que les écuries approuvent à l’unanimité ces trois épreuves tests pour cette saison. L’unanimité, c’est un concept souvent inatteignable en Formule 1. Tant mieux si chaque écurie ne place pas ses intérêts en premier et est prête à oser pour tenter de trouver la meilleure formule pour le sport.

Maintenant, passons aux questions qui me viennent en tête avec ce nouveau format, surtout s’il venait à être adopté pour une saison complète.

Premièrement, je me demande si les courses seront aussi excitantes qu’on le prétend. Pourquoi? Tout simplement parce qu’il y a beaucoup plus à perdre qu’à gagner lors de ces épreuves.

Prenons un exemple inventé de toutes pièces. Vous êtes Lando Norris, il reste cinq tours à faire et vous êtes 5e,  à une seconde de Sergio Perez. Vous tentez un dépassement? Vous retardez vraiment votre freinage pour vous lancer à l’intérieur? Si vous réussissez, vous gagnez une place sur la grille de départ, pas de point à l’enjeu. Si ça tourne mal et qu’il y a contact, vous partez dernier et vous bousillez une 5e place qui était déjà très bonne pour vous.

Vous osez? J’ai l’impression que plusieurs équipes vont rapidement commencer à faire ce calcul de risques.

Et imaginez maintenant le même scénario, mais c’est votre coéquipier qui est devant vous. Ça ne devrait pas être très long avant d’entendre votre ingénieur dans vos oreilles pour exiger de garder votre position.

En gardant la séance de qualifications que nous connaissons bien le vendredi, les meilleurs pilotes et les meilleures équipes vont commencer la course qualificative à l’avant de toute façon. Pour eux, cette épreuve représentera bien plus un risque de perdre ce qui a été acquis le vendredi, et non une opportunité de progresser. On peut s’attendre à quelques dépassements avec le DRS, bien sûr, mais de réelles luttes au coude à coude? Est-ce que le jeu en vaudra la chandelle?

Peut-être aurait-on pu s’inspirer un peu de la F2? Par exemple, pour la grille de départ de la course qualificative, vous prenez le résultat de la course précédente et vous inversez le top-8, question d’inciter les meilleures équipes à risquer un peu plus pour amasser les trois points et commencer la course à l’avant… mais puisque vous inversez seulement le top-8, gagner une course ne devient pas non plus un handicap trop majeur pour la semaine suivante.

Mais peu importe la solution, j’ai l’impression qu’il faudra trouver une façon de pimenter davantage ces courses. Trente minutes, probablement sans arrêt aux puits et avec des points comme incitatif seulement aux trois premiers... Ça peut aussi devenir très long.

Ensuite, je me pose des questions sur la gestion des pneus. Selon ce que la F1 a annoncé, la séance de qualifications du vendredi se fera entièrement, et obligatoirement, avec les pneus tendres. Au départ de la course qualificative et de la course du dimanche, les écuries pourront choisir le type de pneus qu’elles préfèrent.

Bref, on perd ce calcul qu’on voit présentement en Q2 alors que certaines équipes prennent le pari d’atteindre la Q3 avec des pneus médiums afin de commencer la course avec une meilleure stratégie. Surtout, dans le format actuel, les pilotes hors du top-10 ont le choix de leur stratégie au départ, un avantage que les pilotes qui ont atteint la Q3 n’ont pas. Ça ouvre une porte pour ceux à l’extérieur du top-10 pour revenir dans la lutte, comme un petit avantage après une qualification plus difficile. Je trouve dommage qu’on perde cet aspect. Dans le nouveau format, chaque voiture pourra commencer la course en choisissant ce qui est le mieux du point de vue stratégique.

Parlons d’argent maintenant, il faudra aussi voir quels seront les impacts financiers de ces courses qualificatives. On aura sans doute plus d’accrochages, plus d’incidents et plus d’usure sur les voitures qu’une qualification normale. Est-ce qu’on augmentera le plafond budgétaire afin d’aider les équipes à faire face à ces coûts supplémentaires? Déjà, après deux Grand Prix, certaines équipes avouent que la situation est critique face au plafond.

Et si on l’augmente... de combien? Parce que Mercedes, Ferrari et Red Bull ont les ressources pour augmenter ce plafond, mais d’autres équipes, même si le plafond augmente, n’auront peut-être pas les moyens pour atteindre la limite budgétaire. Bref, est-ce que ces courses qualificatives, et les coûts qui y sont reliés, redonneront un avantage financier aux écuries à gros moyens?

Et finalement, j’aime bien le format de qualifications actuel. Il y a deux semaines, à Imola, on a eu droit à une séance de qualifications extrêmement relevée. Et c’est aussi agréable de voir comment un pilote s’en tire sur un tour seulement, voir comment il gère la pression de faire un tour absolument parfait. J’espère qu’on le gardera, à tout de moins le vendredi, comme il est prévu de le faire.

Malgré ces questionnements, je suis très heureux de l’annonce de la F1. Ça ne coûte rien d’essayer et je suis vraiment curieux de voir ce que cela va donner. Peut-être que je me trompe et ces courses seront rapides et très excitantes, et si c’est le cas, c’est tant mieux pour la Formule 1. Sinon, on aura un bon échantillon afin de trouver des solutions avant d’implanter ce système pour de bon. Et si, dans le pire des cas, ça ne fonctionne tout simplement pas comme prévu... et bien ce format deviendra un simple mauvais souvenir, comme le sont devenues les qualifications par élimination de 2016!