JEDDAH, Arabie saoudite – Outre l'enjeu sportif, le premier Grand Prix d'Arabie saoudite de Formule 1, dimanche, attire l'attention pour ce qu'il représente sur la scène internationale, dans un pays critiqué pour ses manquements aux droits humains.

L'arrivée du royaume en F1 fait partie d'une campagne pour améliorer son image et diversifier son économie pétrolière grâce aux événements sportifs, culturels et au tourisme.

Pour Human Rights Watch, l'Arabie saoudite utilise ce GP et les concerts de stars internationales organisés en parallèle afin de « détourner l'attention de violations généralisées des droits humains » (ce qu'on qualifie de « sportwashing »).

« S'ils n'expriment pas leurs préoccupations quant aux graves abus commis par l'Arabie saoudite, la Formule 1 et les artistes risquent de soutenir les efforts coûteux du gouvernement saoudien pour blanchir son image malgré une augmentation significative de la répression au cours des dernières années », ajoute Michael Page, directeur adjoint pour le Moyen-Orient au sein de l'ONG, dans un communiqué.

« Si les autorités veulent être perçues différemment, elle devraient immédiatement et sans condition libérer tous ceux qui ont été incarcérés pour avoir pacifiquement exprimé leurs opinions, lever les interdictions de voyager et imposer un moratoire sur la peine de mort », ajoute Amnistie internationale.

« Sensibilisation »

Pressé de s'exprimer, le pilote britannique Lewis Hamilton, qui a fait de la lutte contre les discriminations son combat, a confié qu'il « ne dirai(t) pas être à l'aise ici mais que ça n'était pas (son) choix ».

« Notre sport a choisi d'être ici et, que ce soit juste ou non, je pense que, pendant que nous sommes là, il est encore important de faire un travail de sensibilisation », a-t-il poursuivi.  «Beaucoup de changement doit avoir lieu et notre sport doit faire plus. »

Pour lui, il s'agira de porter de nouveau le casque aux couleurs de la communauté LGBT+ qu'il arborait déjà au Qatar il y a quinze jours et portera de nouveau à Abou Dhabi la semaine prochaine.

Pour son adversaire allemand Sebastian Vettel, il s'est agi d'organiser un événement de karting avec quelques femmes, dans un pays où elles n'ont le droit de conduire que depuis 2018.

« Voir la confiance de ces femmes et leur donner cette opportunité dans un domaine dominé par les hommes, c'est génial et ça m'a donné beaucoup de plaisir », a-t-il expliqué. « Bien sûr, il y a des manquements à corriger mais je pense que le positif est une arme plus puissante que le négatif. »

« Combat »

« Ce qui (polit) l'image du royaume, ça n'est pas un chanteur mais ses dirigeants et son peuple... Vous ne pouvez pas polir ou montrer une image différente de la réalité », avait anticipé le Prince Khalid bin Sultan, président de la Fédération saoudienne auto et moto, interrogé par l'AFP il y a quelques jours.

« Un combat est mené contre le royaume depuis des années, un combat pour des raisons politiques », estimait-il. « Il y a ceux qui disent que le royaume est en retard et contre les droits humains... Bien sûr, personne n'est parfait, et les plus grandes nations qui brandissent la liberté et les droits humains ont plus que leur part de critiques dans ces domaines. »

« Nous croyons en nous, cette guerre va continuer, on va continuer sur notre chemin et la porte est ouverte à tous pour nous rendre visite et voir qui nous sommes vraiment », terminait le Prince.

Plus anecdotique mais néanmoins révélateur, aucune restriction vestimentaire ne s'applique finalement sur le circuit de Jeddah, où se tient le GP, ni dans aucun lieu public de la ville.

Dans un premier temps, le journal espagnol Marca avait évoqué des règles strictes, notamment pour les femmes, qui ont provoqué le mécontentement de certaines équipes et du grand public. Mais une note transmise ensuite aux médias par l'organisateur les enjoint seulement à « respecter les sensibilités culturelles de l'Arabie saoudite ».