BRACKLEY, Royaume-Uni - Blouse blanche sur le dos dans des locaux aux allures de laboratoire aseptisé, le geste du technicien est aussi maîtrisé que précis car remporter huit titres constructeurs consécutifs en Formule 1 n'a rien d'un hasard.

Dans la campagne anglaise, des centaines d'ingénieurs et autres mécaniciens s'affairent chaque jour à rendre les monoplaces de l'écurie Mercedes, championne en titre, toujours plus performantes.

« Être huit fois consécutives champion du monde, c'est incroyable [...] mais redémarrer de zéro chaque année pour continuer à gagner représente un énorme défi », explique Michael Taylor, responsable informatique de l'écurie, en marge d'une visite en présence de l'AFP.

Et de poursuivre: « il y a toujours d'énormes possibilités de s'améliorer, même pour les entreprises les plus prospères du monde, de gagner 5, 10, 15% d'efficacité. En Formule 1, c'est la même chose ».

Si ses moteurs sont développés à Brixworth, dans le centre de l'Angleterre, c'est à Brackley, QG de Mercedes depuis plus de dix ans, situé entre Londres et Birmingham et à moins de quinze minutes du tracé de Silverstone où se dispute ce weekend la 10e manche de la saison, qu'un millier de ses employés oeuvrent à maintenir le rang du constructeur allemand.

Aérodynamisme, test, développement... quelle que soit la salle dans laquelle ils travaillent, chacun à son poste sait précisément ce qu'il a à faire dans un silence quasi religieux, parfois bousculé par le rugissement des machines toutes plus chères les unes que les autres. L'impression d'être dans un hôpital à la pointe.... pour voitures. 

« Attention portée aux détails »

« Une place pour chaque chose et chaque chose à sa place » pourrait aussi être la devise du lieu. Une devise qui, de parole d'employés, tient à coeur au patron de Mercedes, Toto Wolff.

Selon l'un d'entre eux rencontré lors de la visite, Toto Wolff, dès son arrivée, a donné le ton après avoir vu un vieux journal traîner à la réception, près de tasses de café sales.

« Je n'arrivais pas à croire que c'était l'équipe de Formule 1 de Mercedes [...] cela montre une attitude, cela montre l'attention portée aux détails », a d'ailleurs déclaré l'intéressé en 2021, dans un podcast britannique. 

Parmi les petites mains essentielles présentes aujourd'hui, c'est à l'équipe des designers que revient la lourde tâche de transformer la fiction en réalité.

Dans un grand open space à l'étage du bâtiment principal de l'immense campus de l'écurie, les modélisations colorisées de la W13 apparaissent et disparaissent au gré des changements.

Les ingénieurs simulent, développent et conçoivent toutes les pièces nécessaires aux monoplaces. Performance et fiabilité sont leurs maîtres-mots quand l'on sait que la moindre microseconde, le moindre gramme peu être décisif.

Au rez-de-chaussée, leurs collègues prendront le relais à toute heure du jour et de la nuit pour venir matérialiser chaque pièce. Pour la seule boîte de vitesses, 3476 sont nécessaire pour la faire fonctionner.

Salle de course

Le défi pour tous est de taille cette saison puisque la nouvelle réglementation imposée aux écuries a mis en difficulté Mercedes, qui a du mal a dompter ses monoplaces. 

Seulement troisième du championnat derrière Red Bull et Ferrari, « nous avons des difficultés en ce moment, c'est la nature de ce monde », reconnaît, philosophe, Michael Taylor. 

« Les changements de réglementation nous touchent évidemment plus que nos concurrents [...], nous devons rattraper notre retard et prendre des initiatives et c'est là que tous les investissements dans la technologie peuvent vraiment faire la différence », assure-il.

En attendant un éventuel retour en force, espéré dès dimanche à domicile avec de nouvelles améliorations, c'est dans la « race support room » – la salle de course – que chaque week-end de Grand Prix, trente ingénieurs parmi les meilleurs dans leur domaine se retrouvent confinés.

Leur mission : devant une myriade d'écrans, assister en direct les équipes présentes sur le terrain pour maximiser les performances des voitures et analyser celles de la concurrence. 

En cette veille de week-end, la salle est vide. Mais il suffit de fermer les yeux pour imaginer dimanche ces dizaines de stratèges plongés dans une concentration maximale dans un silence cérémonial, vibrant intérieurement au gré de tours de roues de leurs pilotes Lewis Hamilton et George Russell, qui, eux compteront bien faire vibrer le public britannique pour « leur » GP.