Le moins que l’on puisse dire, c’est que le premier Grand Prix de la saison nous a offert beaucoup de rebondissements et d’action, mais nous a donné un premier coup d’œil des forces en présence. Je vous propose un petit tour d’horizon de ce qui a retenu mon attention lors de ce premier week-end… surtout que le monde de la F1 remet ça dès cette fin de semaine sur le même circuit, en Autriche.

Les hostilités sont lancées

On s’attendait à voir les Mercedes et les Red Bull à l’avant du peloton, et ces deux équipes ont confirmé leur statut, même si à la fin, Red Bull doit considérer ce week-end comme un échec après n’avoir récolté aucun point. Tout de même, l’écurie autrichienne semble être la seule qui puisse inquiéter les Mercedes cette année, et elle a démontré qu’elle était prête à tout pour mettre des bâtons dans les roues des flèches d’argent maintenant noires. 

Red Bull a tenté un premier jab dès le vendredi, après la 2e séance d’essais libres. Après avoir vu les Mercedes utiliser leur nouveau système de direction à deux axes (le DAS, en anglais), Red Bull a déposé un protêt à la FIA afin de contester la légalité du système. La FIA avait pourtant affirmé de façon très claire, lors des essais à Barcelone, que ce système était légal pour cette saison, mais Red Bull a tenté de prouver que le DAS ne doit pas être considéré comme un système faisant partie de la direction. L’argument de Red Bull était que le DAS ne modifie pas la trajectoire de la voiture, mais est plutôt utilisé afin de gérer la température des pneus et réduire la traînée. 

Bref, Red Bull n’avait rien à perdre... et qui sait, peut-être même un peu à gagner? La FIA a peut-être donné raison à Mercedes, mais cela a permis à Red Bull de vraiment savoir ce qui est légal ou non… afin de peut-être implanter son propre système DAS? C’est une des rumeurs qui court dans les paddocks…

Sur ses terres, Red Bull n’a pas baissé les bras malgré son revers et est revenu à la charge dimanche matin, cette fois, en faisant appel de la décision des commissaires de ne pas pénaliser Lewis Hamilton pour ne pas avoir ralenti sous le drapeau jaune causé par Valtteri Bottas en qualifications. Avec de nouvelles images captées grâce à une caméra à 360 degrés sur la voiture d’Hamilton, Red Bull est parvenu, cette fois, à convaincre les commissaires de changer la décision. Hamilton a donc appris, moins d’une heure avant le début de l’épreuve, qu’il était pénalisé de trois places. 

La vraie question dans ce dossier est probablement de savoir pourquoi les commissaires n’avaient pas accès à ces images lors de l’enquête, samedi. Pourquoi a-t-il fallu attendre que ces images se retrouvent sur les réseaux sociaux et que Red Bull fasse appel? À l’avenir, il faudra s’assurer que les commissaires aient accès à toutes les images, surtout lorsqu’on prend plusieurs heures avant d’annoncer une décision de toute façon…mais bon, c’est un autre débat.

Finalement, c’est bien sûr en piste que les deux équipes ont joué du coude. Loin du rythme des Mercedes en qualifications, Red Bull a décidé de tenter une stratégie différente avec Max Verstappen, qui devait prendre le départ avec les pneus médiums. Finalement, tout ça avait bien peu d’importance, puisque Verstappen a dû abandonner après une dizaine de tours.

La présence de nombreuses voitures de sécurité a toutefois offert une autre opportunité à l’équipe locale. Contrairement aux deux Mercedes, Alexander Albon a fait un 2e arrêt, permettant à Albon d’attaquer avec des pneus tendres face à des Mercedes chaussées de pneus durs. Cette décision semblait la bonne et Albon avait sincèrement une occasion d’aller chercher non seulement son premier podium, mais aussi sa première victoire. Vous avez vu ce qui s’est passé par la suite, le Thaïlandais a tenté une manœuvre par l’extérieur, mais il y a eu contact entre lui et Lewis Hamilton... un incident qui n’est pas sans rappeler ce qui s’est produit lors de l’avant-dernier Grand Prix l’an dernier, au Brésil. 

Bref, comprenez-moi bien, il est clair que Mercedes a une longueur d’avance présentement sur tous ses rivaux. Je ne suis toujours pas certain que Red Bull peut vraiment prétendre au Championnat du monde sur une saison qui comporterait une quinzaine de courses, surtout après avoir terminé ce week-end les mains vides. Par contre, j’aime que Red Bull joue toutes les cartes possibles pour embêter l’écurie allemande. Deux appels aux commissaires, une stratégie alternative avec Max Verstappen, une bonne décision d’arrêter sous la voiture de sécurité... on a tenté tout ce qu’on pouvait. Ça n’a pas payé cette fois, mais en gardant cet état d’esprit, on risque d’avoir plusieurs bonnes courses à regarder cette saison. 

Leclerc sauve les meubles chez Ferrari

Ouch.

Pour être honnête avec vous, je ne m’attendais pas à une telle catastrophe chez Ferrari. On se doutait que Red Bull était passé devant… mais de voir Vettel éliminé dès la Q2 et Leclerc se contenter de la 7e place en qualifications était inattendu. 

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Sur ses réseaux sociaux, la Formule 1 a publié un tableau dans lequel on compare le rythme des équipes en qualifications en Autriche l’an dernier et cette année. On voit que six équipes se sont améliorées. Dans le cas de Red Bull, on peut parler du statu quo, grosso modo. Trois équipes ont perdu beaucoup de temps, soit Haas, Ferrari et Alfa Romeo. La tangente? Il s’agit des trois équipes propulsées par un moteur Ferrari. 

Tableau qualifsEn effet, la puissance du moteur pose problème à la Scuderia. Mattia Binotto a chiffré à 7 dixièmes de secondes le temps perdu par les Ferrari en ligne droite. C’est énorme, surtout sur un circuit aussi petit. Cela vient bien sûr relancer les débats sur le moteur Ferrari de l’an dernier, que plusieurs équipes soupçonnaient de ne pas être légal. La FIA avait alors conclu un accord secret avec Ferrari concernant son moteur, ce qui avait été fortement critiqué par les écuries qui ne disposent pas du moteur Ferrari. Bref, impossible de savoir si le cheval cabré avait dépassé les règles ou non l’an dernier… mais les performances du week-end relancent le débat.

Le moteur n’est pas le seul problème de la Scuderia. La voiture est instable et le travail fait durant la pause sur la voiture n’apporte pas les résultats escomptés, si bien que Ferrari avait sous la main la même voiture que lors des essais à Barcelone, alors que d’autres équipes ont fait évoluer leur voiture depuis. L’écurie italienne devait recevoir une évolution aérodynamique pour le troisième Grand Prix, en Hongrie. Toutefois, on espère maintenant la recevoir dès cette fin de semaine. Tout d’abord, parce que l’équipe en a grandement besoin, mais surtout, parce que le fait que le Grand Prix soit sur le même circuit aidera à comparer et à déceler ce qui fonctionne bien ou non. 

Au moins, Charles Leclerc a sauvé les meubles en course. Il a fait le maximum avec la voiture qu’il avait sous la main, Ferrari a pris une bonne décision stratégique sous la voiture de sécurité (enfin!) et, avec les malheurs des autres (Albon & Hamilton), on a pu arracher un podium inespéré. 

Racing Point prouve son potentiel

Un peu comme Red Bull, Racing Point a probablement l’impression d’avoir laissé des points sur la table cette fin de semaine, mais il reste que l’écurie a démontré son potentiel. À l’exception de la course, les deux pilotes étaient régulièrement dans le top-10 (11e place pour Stroll lors de la 1re séance d’essais). 

Dans le cas de Stroll, il a fait du bon travail tout au long de la fin de semaine. Il a atteint la Q3 et c’est exactement ce qu’il devra viser tout au long de la saison. Malheureusement, il n’a pas pu se faire justice en course. Des problèmes de moteur lui ont fait perdre de la puissance dès le début de la course. Après avoir tenté de rester en piste malgré tout, il a dû finalement abandonner après une vingtaine de tours. 

Quant à Perez, le Mexicain était même en position de podium à un certain moment. Dans son cas, la décision de ne pas s’arrêter une 2e fois, et surtout, sa pénalité pour avoir dépassé la limite de vitesse dans la ligne des puits, l’ont fait reculer au classement. 

Reste que les voitures roses ont démontré que ce qu’on avait vu à Barcelone n’était pas du bluff. Avec une voiture qui semble performante, à Lance de nous démontrer qu’il peut être constant et de connaître une bonne saison!

Après la pluie, le beau temps

La pandémie de la COVID-19 a été difficile pour tous, mais deux équipes ont particulièrement souffert : McLaren et Williams. 

La première a dû mettre plusieurs employés à pied, dont certains de façon permanente, et avait grandement besoin d’arrivée de nouveaux investisseurs afin d’éviter la faillite. La deuxième est aux prises, elle aussi, avec des ennuis financiers, si bien que Williams n’exclut pas la vente totale de l’équipe.

Au moins, le premier Grand Prix a amené du soulagement pour ces deux équipes, surtout chez McLaren. Lando Norris a été excellent tout au long de la fin de semaine. Grâce à son meilleur tour en toute fin d’épreuve, mais aussi à une manœuvre musclée aux dépens de Sergio Perez, il mérite pleinement sa place sur le podium. Il est d’ailleurs devenu le 3e plus jeune pilote sur un podium après Max Verstappen et Lance Stroll. La Formule 1 a publié les deux derniers tours avec la caméra embarquée de Norris et les communications radio sur les réseaux sociaux. On ressent la pression, et c’est impressionnant de voir les deux tours parfaits de Norris, surtout avec toutes les indications qu’on lui donne à la radio pour augmenter les performances de la voiture. 

Quant à Williams, les résultats ne sont bien sûr pas aussi éclatants, mais on voit quand même une progression avec l’année dernière, comme quoi la descente aux enfers pourrait se transformer en lente remontée. En qualifications, George Russell a devancé les deux Alfa Romeo, et en course, Nicholas Latifi a profité des ennuis de plusieurs pour terminer à la porte des points, soit en 11e position. Un bon résultat pour le Canadien à son premier Grand Prix. La glace est maintenant brisée, à lui maintenant d’améliorer son rythme lentement mais sûrement au cours de la saison et d’éviter de mettre son équipe sous pression avec une sortie de piste lors des essais du samedi matin.

Le retour d’Alonso

Mercredi matin, Renault a annoncé le retour de Fernando Alonso comme pilote l’an prochain. Ce sera donc un 3e séjour pour l’Espagnol avec l’écurie française. On sait que Renault a toujours espoir de redevenir l’écurie de pointe qu’elle était lors des années 2000, alors aussi bien ramener le pilote qui est allé chercher les derniers titres pour Renault en 2005 et 2006!

Je suis très heureux de cette décision. Fernando Alonso a prouvé au cours de sa carrière qu’il était un pilote hors pair. Si en plus, Alonso a pu retrouver un peu de motivation grâce à ses années à l’écart de la F1 et à l’arrivée de nouveaux règlements, c’est la Formule 1 au complet qui sortira gagnante du retour d’Alonso.

Par contre, j’ai hâte de voir comment Alonso voudra aider l’écurie à progresser, même dans les moments plus difficiles. Ses séjours chez Ferrari, et surtout chez McLaren, ne se sont pas toujours déroulés comme prévu, et on avait parfois l’impression qu’il en menait (trop?) large chez McLaren. Si Renault ne progresse pas comme prévu, est-ce qu’Alonso va de nouveau se concentrer sur la triple couronne? Il est clair qu’Alonso veut rouler à l’avant et n’est pas trop intéressé à faire de la figuration. C’est un risque que Renault prend, mais avec le talent du double champion du monde... c’est un risque qui peut rapporter gros!