Sous les projecteurs de Singapour, l’écurie Haas abordera de nouvelles « couleurs ». Bon, il s’agit de changements très mineurs, l’écurie ayant simplement décidé de se dissocier définitivement de Rich Energy, son commanditaire titre depuis le début de la saison. Puisqu’aucune mention de cette compagnie ne se retrouvera sur la voiture, Haas présentera donc une voiture presque totalement noire.

 

À l’image de la saison de l’écurie américaine.

 

Car, franchement, ça ne vole pas haut pour Haas cette saison. Si on s’attendait à voir Williams à la traîne, les ennuis de Haas sont beaucoup plus surprenants. L’an dernier, l’écurie s’était vraiment démarquée en offrant une chaude lutte avec Renault pour le 4e rang des constructeurs, terminant finalement cinquième (et ce, même si Romain Grosjean n’avait pas inscrit de points lors des huit premières courses de la saison). On pouvait donc croire que l’équipe dirigée par Gunther Steiner allait poursuivre sa progression... mais c’est tout le contraire. L’écurie vient au 9e rang des constructeurs. Kevin Magnussen et Romain Grosjean sont tous les deux hors du top-15 chez les pilotes. Comment expliquer un tel recul?

 

D’abord et avant tout, il y a les pneus. Depuis le début de la saison, les nouveaux pneus Pirelli sont un véritable casse-tête pour Haas et clairement, le casse-tête est encore bien loin d’être assemblé. Pour qu’ils fonctionnent bien, les pneus doivent demeurer à l’intérieur d’une certaine fenêtre de température. Pour chaque équipe, cela représente un défi, mais chez Haas, c’est un problème majeur. Sur quelques tours seulement, on y arrive. C’est pourquoi on voit souvent de bons résultats en qualifications pour Haas. Mais en course, la température des pneus chute sur les longues séquences et la voiture perd tout son rythme.

 

Déjà, lorsque nous l’avions rencontré à Montréal, Gunther Steiner se montrait agacé par cet aspect de la Formule 1, où les pilotes ne peuvent plus simplement pousser une voiture au maximum, mais doivent surtout gérer la température et l’usure des pneus. On aurait pu croire que l’équipe allait finir par trouver une solution à ce problème... mais après des mois de travail, la situation n’a pas changé.

 

Puisqu’il est question de travail qui n’apporte pas les résultats escomptés, il faut aussi parler des différentes évolutions que Haas a amenées sur la voiture au cours de la saison. Ici, on ne parle pas seulement des problèmes reliés aux pneus, mais aussi des évolutions à l’aérodynamisme et au châssis de la voiture. Et bien ça non plus, ça ne fonctionne pas. Pendant plusieurs Grands Prix avant la pause estivale, Romain Grosjean est revenu à la première version de la voiture, celle du Grand Prix de Melbourne. Après ces courses, Haas a fait le constat que les performances de cette voiture étaient similaire à celle comportant les évolutions de cette saison. Autrement dit, tout le travail effectué sur la voiture depuis Melbourne n’a rien changé, si bien que pendant que les autres équipes s’améliorent, Haas stagne et ne progresse pas. Au bout du compte, c’est beaucoup de temps, d’argent et d’effort qui ne se reflètent pas sur la qualité de la voiture.

 

D’ailleurs, pour le Grand Prix de Russie la semaine prochaine, Haas va opter pour un mélange de la voiture actuelle et celle de Melbourne. Une sorte de pas en arrière sans revenir totalement à la case départ. Il faudra voir si cette solution hybride pourra améliorer les résultats, mais présentement, aucun doute qu’on se cherche dans le camp américain.

 

Et les pilotes dans tout ça?

 

Dans ce contexte, ce n’est pas toujours facile d’évaluer le travail des deux pilotes. Pourtant, c’est l’exercice qu’a dû faire Haas au cours des dernières semaines, puisque d’autres options étaient envisageables. La rumeur la plus persistante envoyait Nico Hulkenberg remplacer Romain Grosjean, mais finalement, Haas a pris sa décision et conservera ses deux pilotes pour l’an prochain.

 

Il faut dire que Grosjean et Magnussen n’ont pas toujours été des cadeaux pour Haas. Il y a eu quelques contacts entre les deux, dont un menant à un double abandon en Grande-Bretagne. On se souvient aussi de Steiner y aller de son « assez, c’est assez » envers Kevin Magnussen qui se plaignait de la voiture à Montréal... alors que ses mécanos avaient travaillé toute la nuit pour la reconstruire à la suite d’une sortie de piste du Danois! En Belgique, c’est Romain Grosjean qui faisait part de son mécontentement en rabrouant son ingénieur qui l’encourageait à dépasser les pilotes devant lui. On peut bien sûr comprendre leur état d’esprit dans cette saison difficile, mais ce n’est pas non plus ce genre de discussions en pleine course qui va motiver les troupes. Je suis surpris de voir Haas se priver d’un pilote talentueux et expérimenté comme Hulkenberg. Je pense qu’un peu de nouveauté aiderait l’équipe à trouver un nouveau souffle. Est-ce qu’Hulkenberg demandait trop d’argent? Et surtout, est-ce que Haas redoutait un duo Hulkenberg-Magnussen, deux pilotes qui se n’aiment pas du tout et qui n’ont jamais hésité à s’envoyer promener publiquement? Voilà ce qui pourrait notamment expliquer le choix de l’équipe.

 

D’ailleurs, le site de Formule 1 rapporte quelques commentaires intéressants de la part de Steiner concernant sa décision. « Cette année, nous n’avons pas les performances que nous souhaitons. La voiture est le problème, pas les pilotes. Si nous changeons de pilotes maintenant, je ne sais pas si cela améliora la voiture. C’est possible. Mais peut-être aussi que non, car le nouveau pilote ne connaîtra pas le chemin et le travail accompli par l’équipe. » Bref, on veut construire sur les commentaires des pilotes pour améliorer la voiture l’an prochain et on ne veut surtout pas recommencer à zéro avec un nouveau pilote.

 

Finalement, loin des circuits, l’affaire Rich Energy a aussi fait jaser. La compagnie de boisson énergisante se vantait déjà d’être plus rapide que Red Bull... après la première journée des essais hivernaux à Barcelone. On a donc vite constaté le manque de sérieux du nouveau commanditaire. Rich Energy a vite déchanté, tentant de briser le contrat avec Haas, prétextant un manque de résultats. Au bout du compte, c’est bien sûr Rich Energy, et non Haas, qui était tout simplement mal géré et cela n’a rien à voir avec les performances de l’écurie en piste. Sauf que ça représente quand même bien le genre de saison que doit vivre l’équipe américaine! On dit parfois que les malheurs ne viennent jamais seuls, cette saga inutile en plein cœur d’une saison difficile l’illustre bien.

Maintenant, est-ce que l’équipe peut retrouver son rythme sur les routes sinueuses de Singapour? Lors des huit derniers Grands Prix, les voitures Haas n’ont inscrit des points qu’une fois, en Hongrie. L’épreuve de Singapour est régulièrement la plus longue en termes de temps et sans doute la plus difficile physiquement de la saison. Ce sera donc un beau défi à suivre sur les ondes de RDS. Samedi, la séance de qualifications sera présentée à 8 h 45, mais attention, la course sera présentée une heure plus tôt avec un départ prévu à 8 h 10, heure du Québec. On vous donne donc rendez-vous pour l’avant-course à 7 h 30.