C’est le début d’une nouvelle ère pour une équipe de Formule Un qui a toujours accompli des miracles avec les maigres moyens financiers dont elle disposait. Alors que Lawrence Stroll se promenait très discrètement dans les coulisses du Centre des congrès de Toronto lors du dévoilement de l’écurie Racing Point, les nouveaux employés du milliardaire canadien entrevoyaient la prochaine saison avec beaucoup d’optimisme.

Âgé de 20 ans et fier du lancement dans son pays natal, Lance Stroll n’avait rien du pilote frustré que l’on pouvait voir tout au long de la dernière saison chez William.  Il affirme que lui et son père ont une vision précise et qu’ils veulent que le projet Racing Point soit un succès.

Son coéquipier Sergio Perez semble réellement y croire. Le vétéran pilote mexicain peut témoigner du climat différent (et plus reluisant) qui règne actuellement.

« Nous avons déjà maintenant le budget pour toute la saison. Auparavant, lors de l’aventure Force India, la saison commençait et on se demandait toujours de quelle manière on pourrait la compléter. Je me souviens que par le passé, on voyait beaucoup de potentiel dans notre équipe, mais nous n’avions pas les moyens de l’optimiser. Cette année, c’est différent. »

Si la venue du paternel Stroll semble réellement réjouir Sergio Perez, il appert en être de même pour la venue du fils Lance. L’arrivée d’un nouveau coéquipier semble faire l’affaire de Perez qui avait une relation tendue en piste avec son ancien coéquipier Esteban Ocon (maintenant testeur chez Mercedes). Contrairement à une conception répandue à l’extérieur des paddocks, Perez ne doute aucunement du talent de Stroll.

« Il est rapide. Personne ne doute de son talent dans le monde de la Formule Un, même s’il évoluait dans des conditions difficiles. Il est grimpé sur le podium, ce que peu de pilotes de F1 ont accompli. Il a le talent, il l’a montré lors des deux journées d’essais à Abou Dhabi. Ce sera intéressant de voir son développement avec les meilleurs ingénieurs au monde. »

Le directeur technique Andrew Green entend bien exploiter le potentiel de Stroll. L’équipe a pu constater à quel point il est rapide, mais souhaite améliorer ses prestations lors des qualifications ainsi que sa compréhension de l’évolution des pneumatiques.

« Il a un grand talent et nous devons l’exploiter. Son sens de la course est extraordinaire. Mais nous pouvons lui montrer comment gérer les différentes gommes, comment se préparer mentalement avant une fin de semaine de course. Pour ce faire, nous devons le déshumaniser pour en faire une sorte de robot », illustre Andrew Green en précisant qu’à ce chapitre, Lewis Hamilton et Sebastian Vettel sont les meilleurs.

« Nous ne voulons pas que Lance pense trop. Nous voulons que ses réactions soient naturelles et presque automatiques. Pour y arriver, Lance devra répéter constamment pour que ça devienne naturel. »

Cette volonté de développer le talent de Stroll est aussi présente pour le directeur de l’équipe, Otmar Zaufnauer.

« Je crois que nous pourrons lui enseigner des choses qu’il ne connaît pas et que nous savons. Nous avons montré à Sergio à être meilleur le samedi. Lance apprendra de Sergio et de l’équipe d’ingénieurs. Il a du potentiel et un talent cru et nous l’exploiteront pour en faire un grand pilote.

Les risques de l’expansion

Au cours des dernières saisons, Force India a démontré qu’elle savait soutirer le maximum de chacun des dollars investis. Mais maintenant que l’aspect financier n’est plus un problème, d’autres défis se dressent.

« Ce n’est pas plus facile, au contraire », soutient Andrew Green. « Nous devons maintenant amener des résultats. Nous travaillons aussi fort que par le passé, mais avec une mentalité différente d’il y a 6 mois. Nous devons maintenant explorer les zones de performances de la voiture comme jamais nous n’en avions la possibilité auparavant. »

« Maintenant que les sommes sont dans les coffres, il y aura encore plus de distractions » concède Otmar Zaufnauer. « Nous avons acheté des terres, nous allons construire une nouvelle usine. Ces choses peuvent distraire l’équipe technique de ses priorités, qui reste la voiture en piste. »

L’ajout de budget n’a absolument pas changé la taille de l’entreprise qui reste de 425 employés.

« Même lors des moments les plus difficiles, l’équipe est resté unie », témoigne monsieur Green. « Personne n’a quitté l’écurie dans la saison morte. Ils ont cru en nous. L’ADN de l’équipe reste le même et nous voulons tous démontrer que ne sommes pas qu’une petite équipe qui a eu de la chance : nous voulons montrer, maintenant que nous en avons les moyens, que nous pouvons réussir. C’est très excitant et c’est une sensation que je n’ai jamais ressentie. »

Et selon Andrew Green, la venue du clan Stroll ne changera pas le code génétique de l’écurie.