« L’importance de prendre soin de sa santé, ce n’est pas toujours évident dans nos communautés », souligne Catherine Boivin, ajoutant que la situation tend à s’améliorer graduellement depuis quelque temps.

 

Je l’avais remarquée lors du marathon de Montréal. Elle participait au demi. Disons qu’avec sa taille de 6’3’’et des 13 pour homme comme souliers, difficile de ne pas l’apercevoir. Les traits de son visage indiquent ses origines autochtones et pour la première fois, je notais une adepte de la course à pied avec de telles caractéristiques.

 

Pourtant, selon ses dires, ils et elles commencent à devenir de plus en plus nombreux à choisir cette discipline. Originaire de Wemotaci, près de La Tuque, elle appartient à la communauté Atikamekw et est l’ainée d’une famille 8 enfants, sept filles et un garçon.

 

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Aujourd’hui installée à Odanak, elle y est arrivée à cause de son retour aux études en 2012, alors que l’on retrouve dans cette région l’unique cégep autochtone au Québec, celui de Kiuna. Quelques années auparavant, elle avait tenté sa chance au cégep Marie-Victorin à Montréal mais souffrait trop d’isolement. Elle avait délaissé l’institution  afin de rejoindre les siens et travailler.

 

Or, à titre de danseuse dans les pow-wow depuis sa tendre enfance, elle se projetait dans le domaine des arts. Présentement, elle termine son BAC en art visuel et médiatique. On comprendra que sa langue natale est l’Atikamekw mais comme elle se plaît souvent à le dire, elle a appris son français à l’école et en écoutant des films. Par conséquent, on lui confie souvent à la blague qu’elle parle le français avec un accent VHS !

 

Âgée de 30 ans, elle court depuis 2013, un moyen de sortir, de s’évader, de se changer les idées. « Au début, j’étais timide, inconfortable mais j’ai rapidement réalisé le dépassement de soi. » Présentement, elle compte plusieurs distances à son dossier dont les marathons des Couleurs à Saint-Grégoire l’an dernier et celui d’Ottawa en 2019.

 

L’un de ses oncles lui a déjà raconté qu’autrefois, les Atikamekw étaient plus actifs à cause de la chasse. Ils pouvaient marcher plusieurs kilomètres dans une même journée. Or, quand ils furent installés dans les réserves, ils s’activaient moins en plus de ne pas bien s’alimenter.

 

« Je pense que ma génération voudra modifier ces vieilles habitudes. Même si mes parents étaient quand même dynamiques, j’ai dû traverser ma période de ralentissement. Une amie Innue a confié à Catherine qu’elle fut une inspiration et que si elle court aujourd’hui, elle en est responsable.

 

Catherine court souvent seule mais appartient à un groupe à Saint-François-du-Lac, une petite municipalité située tout près d’Odanak. Mariée depuis juillet dernier à un Abénakis du nom de Jacques Watso, son incursion à la danse a fait en sorte qu’elle a pu le rencontrer car ils détenaient le même projet, soit la planification d’un Pow Wow.

 

Boivin« Pour dire vrai, je dirais que la course à pied m’a reconnecté à la danse. J’ai ainsi retrouvé la vigueur de ma jeunesse et je considère l’expérience beaucoup plus satisfaisante de cette façon. J’apprécie davantage. Plus de dextérité et un meilleur état cardio-vasculaire font que j’ai le goût de m’investir. »

 

Pour Jacques, un menuisier-charpentier, dynamiteur et conseiller dans sa communauté, le temps semble lui manquer pour adhérer la course à pied. Parions que c’est une question de temps avant qu’il décide de rejoindre Catherine dans ses souliers !

 

 Son projet de fonder une famille de 3-4 enfants ne l’empêchera pas de courir car consciente qu’elle démontre un bel exemple, elle voudra assurément le faire pour sa progéniture.

 

On pourrait croire que les Autochtones possèdent la course à pied dans leurs gènes. Peut-être mais les changements majeurs dans leur façon de vivre sont venus perturber plusieurs de leurs traditions. Des personnes comme Catherine devraient les remettre sur les pistes d’antan.

 

Au cours des dernières années, les peuples autochtones  du Québec ont quelque peu délaissé les bonnes habitudes de vie.