J’y pense et je n’en reviens pas encore. De mémoire de coureur, jamais je n’ai entendu pareille péripétie. Je n’imaginais même pas un tel scénario !

Je vous raconte.

Il y a une semaine, confortablement assis sur mon divan, lors d’une pause publicitaire d’un match des Canadiens, je décide de vérifier la météo en vue de mon prochain marathon à Hyannis dans l’état du Massachussetts, une semaine plus tard. On annonce une température exécrable. Bouf ! Je me dis que c’est une semaine à l’avance et qu’un bon coup de vent chassera ce mauvais temps.

Or, plus les journées passent et moins les prévisions changent.

J’avoue que la veille, je suis inquiet. Grosse pluie à 100%, des bourrasques de vent puissantes et une température autour de 4 Celsius. Ouais ! Dans quelle aventure me suis-je embarqué ? Et dire qu’à l’origine, j’avais opté pour cette petite ville située tour près de Cape Cod car l’an dernier, après avoir couru Ottawa dans les mêmes dates,  je craignais qu’il n’y fasse pas beau deux années consécutives. Vous devinerez que la photo titre a été prise chez moi car à Hyannis, j'étais loin d'afficher ce sourire !

À mon arrivée à Hyannis la veille, beau soleil, pratiquement aucun vent et pas de neige à cet endroit. Je ne peux pas imaginer que tout basculera en quelques heures !

Eh oui ! Le lendemain matin, c’est la vraie catastrophe. Il tombe des clous, le vent souffle avec une vélocité incroyable, davantage sur le bord de la mer.

Je dois dire que pour ce marathon, tout se déroule au même endroit. Le départ, l’arrivée, le souper aux pâtes et la cueillette du dossard se font dans une grande salle annexée à l’hôtel où je réside.

Le matin du marathon, les coureurs sont regroupés dans le hall de l’hôtel et les visages traduisent l’inquiétude. Assis sur un fauteuil, je me demande vraiment ce que je fais là. Je suis l’unique Québécois sur place. Nous attendons à la toute dernière minute pour se présenter au départ. En quelques secondes, la forte pluie nous imbibe. C’est pire que mon Boston il y a quelques années !

Vent de face dès les kilomètres initiaux et ça tombe comme des cordes. J’ai même acheté un imper. Rien à faire. En quelques minutes, je suis détrempé jusqu’aux os. Heureusement, la Daniel #2chaleur de mon corps parvient à compenser. Toutefois, à quelques kilos de la fin de la première moitié,  alors que le fil d’arrivée se situe juste devant l’hôtel, une petite voix m’avise que je dois abandonner. Je n’ai jamais songé à prendre une telle décision en 24 ans de course à pied. Pas le choix car la crainte de souffrir d’hypothermie pour la 2e moitié me hante sérieusement.

Je passe droit au fil d’arrivée et je me dirige vers l’hôtel, amèrement déçu. Une fois dans ma chambre, je me déshabille lentement pour me diriger vers la douche. Je peine à retirer mes vêtements tellement la pluie a fait son ravage.

Dans la douche, j’ai envie de pleurer. Je ne peux pas croire que je me suis tapé sept heures d’auto pour en arriver là. J’écris à Pasquale pour lui dire que je viens d’abandonner. Elle tente du mieux qu’elle peut pour me consoler et fait même des blagues.

Toutefois, en fouillant dans mon sac pour me vêtir, je remarque que j’ai apporté plusieurs vêtements de course, ne sachant pas trop ce que j’allais endosser. Une lumière s’allume. Je pourrais repartir à sec pour compléter ma 2e demie. Mon temps roule encore. Rapidement, j’enfile mes autres vêtements et je repars, en me demandant vraiment ce que ça donnera comme résultat.

Peu importe de quelle façon, je me vois offrir la possibilité de compléter mon marathon. J’ai perdu une trentaine de minutes mais je m’en balance. J’en arrache dans les derniers kilomètres et je vous avouerai que j’ai hâte que ça finisse. Drôle de sensation en franchissant le fil d’arrivée. Je n’en croyais pas mes yeux. Chanceux car on a enregistré 67 abandons !

J’aurai traversé toute la gamme des émotions et je me demandais si un autre coureur avait déjà vécu pareille expérience ? Je ne pouvais croire que mon 94e marathon était dans la poche !

Sur le chemin du retour, le cœur joyeux, je savais que la tempête sévissait. Neige et vent m’attendaient dans les montagnes du Vermont jusqu’à chez moi. Mais que cela ne tienne, je venais de traverser encore pire. Vraiment, une expérience qui m’aura fait grandir.

Quand j’ai communiqué avec Pasquale pour lui dire que j’avais réussi, j’ai ajouté que dorénavant, elle pouvait sans retenue me qualifier de fou !

 

Statistiques de mon 94e marathon

Temps : 4h46 :23

Classement général : 173 sur 214

Catégorie d’âge : 7 sur 10

PROCHAIN MARATHON (95e):       Cornwall en Ontario le 27 avril.