« J’ai une histoire bien ordinaire », m’avait-il dit au téléphone au moment de fixer notre rendez-vous.

Patrice Brisindi ne comprenait pas pourquoi je désirais le rencontrer afin d’écrire sur lui. Souvent, je reçois des informations d’intermédiaires que me renseignent sur les prouesses des gens car on s’entend qu’il m’est impossible de tout savoir.

Je savais que ça pouvait devenir captivant. Au terme de notre rencontre, je lui ai dit : « Pas si pire pour quelqu’un d’ordinaire ! » Vous comprendrez rapidement pourquoi.
 
Il se remet d’ailleurs d’une malencontreuse chute en pelletant, un peu avant les Fêtes  « Le deux pieds vers l’avant, je me suis ramassé sur le dos. Rapidement, je me suis relevé.  Ça ne faisait pas trop mal. » Quelques jours plus tard, un sérieux malaise à l’épaule a surgi, incapable de courir. « Jadis, je poursuivais l’entraînement, aujourd’hui, je suis devenu plus sage ».
 
Natif de Montréal-Nord d’un père italien, Patrice fut initié très jeune aux sports. Alphonso courait. « Je le voyais s’entraîner régulièrement. Tôt le matin, il partait ». Pourtant, il ne ressent aucune envie d’en faire autant. Il joue au soccer, pratique la natation et fume de un à deux paquets de cigarettes par jour ! Le 5 mars 2000, alors qu’il se retrouve dans un restaurant et qu’une tempête sévit à l’extérieur, il constate qu’il n’a plus aucune cigarette sur lui. Dans le but d’en acheter, il part vers le dépanneur non loin et réalise combien il est esclave de cette dépendance.  Il n’y goûtera plus jamais par la suite.
 
«  Ce fut ma première réussite personnelle. » Alors s’amorce une série de visites au gymnase et il passe de 225lb à 160lb ! En 2005, il saute dans la course à pied, puis le vélo en 2006. Il rencontre alors un ami membre du club de triathlon de Saint-Lambert qui l’invite à se joindre à eux. Et l’aventure commence.
 
Une métamorphose qui se transforme en mode de vie. « Parfois, les gens me demandent si je profite d’une vie sociale ? Bien sûr que oui car cette implication m’incite à voyager, à rencontrer des gens de cultures différentes et même m’impliquer dans le bénévolat ».
 

Patrice Brisindi#2Passer au travers deux cancers, rien de facile pour personne et encore moins lorsque vous êtes un athlète.

Après trois années d’enseignement au primaire en informatique, Patrice devient chauffeur d’autobus pour la STM. Il adore conduire, aime le monde et ne cache pas que les conditions s’avèrent avantageuses. « Mon horaire est génial, il permet de m’entraîner adéquatement. » Important, car Patrice nage, Patrice court et Patrice roule !

 Alors, qu’en est-il d’une compagne ? « Pas évident car je possède des objectifs agressifs. »

Patrice aura pris du temps pour nous dire qu’il avait remporté le championnat du monde chez les 45-49 ans en 2016, terminant 3e au classement général à l’ITU présenté à Oklahoma City, un triathlon longue distance avec 4km de nage, 120km de vélo et 30km de course à pied. Bien sûr qu’il a écarquillé les yeux….et grands ouverts par surcroît!

Le voilà maintenant avec un objectif pour 2021, boucler la boucle pour ses 50 ans à l’Ironman d’Hawaii avec un podium dans son groupe d’âge, non pas sans s’être qualifié en novembre 2020 en Arizona. « Une mission qui exige une facette égoïste et une grande discipline », fait-il remarquer.

Mais ce qui devait suivre allait me traumatiser. Tout d’abord, Patrice a vécu un énorme traumatisme nerveux lorsqu’il a perdu trois de ses amis lors d’un accident de vélo en 2010. « Nous étions deux groupes et nous devions nous rejoindre. Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux du drame, je fus incapable de rentrer seul à la maison. Une scène effroyable m’a secoué. »

Puis, en avril 2011, son autobus écrase accidentellement un jeune planchiste qui venait à peine de sortir de l’autobus. Il subit un effroyable choc nerveux et perd connaissance. Il ressent alors de vives douleurs à la poitrine. Quelques mois plus tard, il participera à l’Ironman d’Hawaii. Au retour, il ne se sent pas bien. Il remarque deux bosses sur chacun de ses seins. Il voit son médecin Serge Tremblay qui le dirige vers un spécialiste. Ce dernier n’y voit rien de très sérieux. Mais, Serge reste sceptique.

Ce dernier insiste pour approfondir les examens. Le 7 janvier 2012, il le convoque pour lui apprendre qu’il souffre de deux cancers du sein dont celui de gauche très agressif. Il doit subir une intervention chirurgicale le plus rapidement possible. « Je me souviens avoir littéralement figé sur les lieux. Je ne comprenais pas. » Le jour de son anniversaire de naissance, le 3 février, il se retrouve sur la table d’opération.

Suivront de mars à juillet des traitements de chimiothérapie épouvantables. « J’ai bien essayé de poursuivre l’entraînement, de peine et de misère. J’insistais car ça m’évitait de jongler à la maison. J’ai traversé une période où je voulais tout laisser tomber, me laisser aller. Puis, je me suis dit que j’avais déjà traversé un ironman et que je pouvais en faire autant avec ces traitements. Suite à mes traitements de radiothérapie, j’ai célébré cette victoire en m’inscrivant au demi-ironman de Montréal ! ».

Quelque temps après ce malheur, les gens lui disaient qu’il n’allait plus jamais devenir aussi Patrice Brisindi #3performant. Quoi de mieux comme source de motivation pour procéder à sa propre relance !

Pour son ironman d’Hawaii de 2013, Patrice a reçu beaucoup de soutien financier de la part de trois camarades de sa ligue de garage au hockey. « Je dois une fière chandelle à André Hébert de SiS Services, François Painchaud de la firme d’avocats Robic ainsi que Jean-Paul Servant de Boomerang qui n’ont jamais cessé de me supporter. Que dire maintenant de mon médecin, Serge Tremblay, qui sans son intervention, je ne serais pas là aujourd’hui pour te parler ».

En terminant, disons que notre athlète élite a décidé de s’impliquer comme instructeur privé avec Bartcoaching, ce qui lui permet de partager sa passion. Jean-Sébastien Martel, Kevin Thomassin, Frédéric Bouchard, Louis-Philippe Gauthier ainsi que Catherine Lambert peuvent se considérer privilégiés de pouvoir compter sur une personne de cette valeur.

Tellement impressionné par son parcours de vie, que j’ai omis de lui parler des photos qu’il devait m’envoyer au terme de notre rencontre. Faut croire que son histoire était tout…. sauf ordinaire.