De tous les sports qui peuvent être pratiqués de manière sécuritaire en temps de pandémie sur notre belle planète éprouvée, la course à pied occupe le haut du pavé! Je l’ai écrit à maintes reprises au cours des dernières semaines.

C’est le cas, bien sûr, si vous êtes seuls ou avec un ami dans les rues de votre quartier et que vous respectez une distanciation sociale. Mais si vous êtes un coureur élite et que vous souhaitez vous mesurer aux meilleurs de la planète, ça peut devenir plus difficile.

Eliud KipchogeLes organisateurs du Marathon de Londres ont pourtant réussi l’exploit le 4 octobre dernier. Seuls les coureurs élites étaient conviés et toutes les courses de catégories amateurs furent annulées. Le parcours consistait en une boucle de 2,15 kilomètres au tour du parc St-James en plein cœur de la capitale britannique. Aucun spectateur n’était admis et des clôtures de sécurités empêchaient les plus téméraires d’accéder au site.

Mais les choses évoluent rapidement avec la COVID-19, particulièrement en Europe où la deuxième vague frappe fort. La France impose même un couvre-feu nocturne pour faire diminuer la courbe des cas.

C’est la raison pour laquelle Athlétisme Canada a annoncé cette semaine qu’elle préférait retirer son équipe d’athlètes des Championnats du monde de demi-marathon qui se tenait samedi (17 octobre) à Gdynia, en Pologne, un pays où les cas de COVID-19 explosent! Il s’agissait pourtant d’une course réservée, comme à Londres, à l’élite. Mais lorsque la sécurité de tous est en jeu, il n’y a plus de chances à prendre!

Je souligne au passage que plus d’une vingtaine de records nationaux masculins et féminins furent réalisés à ces championnats, ce qui relance le débat sur les fameuses chaussures avec plaques de carbones. J’y reviendrai certainement dans une prochaine chronique tellement ce phénomène prend de l’ampleur.

J’ai l’habitude de dire que les compétitions de course à pied sont un peu comme le canari apporté par les mineurs dans les mines de charbon au XIXe siècle. Très sensible aux émanations de gaz toxiques, ce petit oiseau jaune servait d’outil de référence. Si on ne peut tenir les compétitions de course pour l’élite, alors ce n’est vraiment pas une bonne nouvelle pour tous les autres sports. Il semble bien qu’on en soit rendu là.

Dans son communiqué publié le 14 octobre, Athlétisme Canada expliquait que « tenant compte de la santé et de la sécurité de nos athlètes, entraîneurs, membres du personnel et bénévoles, l’organisme a retiré son équipe de cinq athlètes qui devaient représenter le pays aux Championnats du monde de demi-marathon de World Athletics 2020 ».

C’était effectivement la bonne chose à faire. La Pologne, je le mentionnais, a vu son nombre de cas de COVID-19 augmenter en flèche récemment. La réflexion des membres d’Athlétisme Canada est certainement le fruit d’une profonde réflexion qui a fait l’objet de longues discussions à l’interne. Car ça brise le cœur de devoir annoncer à des athlètes qui se préparent depuis si longtemps qu’ils devront renoncer à un des grands moments de leur carrière de coureur.

Le directeur de la haute performance d’Athlétisme Canada, Simon Nathan, a confirmé qu’il s’agissait d’une décision difficile à prendre, mais il croyait qu’elle s’inscrivait dans l’intérêt supérieur des athlètes et du personnel de l’équipe. Il ajoutait du même souffle qu’il ne doutait pas que World Athletics et le comité d’organisation local auraient déployé tous les efforts nécessaires pour protéger les participants, mais les membres de direction d’Athlétisme Canada percevaient un trop grand nombre de risques que personne ne pouvait raisonnablement contrôler.

Courir demeure encore sécuritaire, même pour des athlètes élites. Ce n’est pas sur le parcours, lors du demi-marathon, qu’ils auraient été à risque.

C’est plutôt lors des déplacements et transferts dans les aéroports ou lorsque les athlètes se rencontrent dans des zones communes auxquelles le public a accès comme le hall d’un hôtel ou les aires de repas, sans compter le niveau incertain de conformité des personnes en matière de protocoles de sécurité.

À l’origine, l’événement devait se dérouler le 29 mars dernier avant d’être reporté au 17 octobre. Le Canada devait être représenté chez les femmes par Rachel Cliff et chez les hommes par Justin Kent, Ben Presiner, Philippe Parrot-Migas et Thomas Toth.

Le Canada n’était qu’un des derniers pays à retirer sa délégation de coureurs, puisque de nombreuses autres nations, dont les États-Unis et le Japon, l’avaient déjà fait. Certains athlètes n’avaient pas attendu la décision de leurs dirigeants. C’est le cas de la grande favorite, la Néerlandaise Sifan Hassan, qui avait mentionné mardi dernier qu’elle ne se rendrait pas en Pologne.

Comme bien d’autres athlètes, Hassan annonçait du même coup faire l’impasse sur le reste de la saison en raison de l’incertitude qui règne sur le calendrier de compétitions. Il est difficile de s’entraîner et de planifier sa préparation lorsqu’on ignore quand on devra courir dans un environnement compétitif!

De voir que même la simple course à pied doit commencer à se mettre sur pause fait resurgir à quel point la pandémie mondiale affecte tout l’univers sportif.

Un petit canari qui commence à avoir la tête qui tourne...