MONTRÉAL – L’incertitude qui plane sur la saison 2020 de la Ligue canadienne de football provoque son lot de répercussions comme la perte d’un entraîneur fraîchement atterri dans le nid des Alouettes. Peu importe les circonstances, la formation montréalaise s’attelle à conserver l’élan gagné en 2019. 

Le commissaire Randy Ambrosie a fourni une immense motivation supplémentaire pour capitaliser sur ce regain. En effet, la Coupe Grey aura exceptionnellement lieu – s’il y a une saison - dans la ville de l’organisation qui présentera le meilleur dossier parmi les finalistes des éliminatoires. 

« C’est moins compliqué ainsi et ça donne une chance égale à tout le monde. Chaque équipe peut se dire ‘On a un objectif plus grand cette année, on peut disputer le championnat à la  maison. C’est très rare que ça arrive au football, ce n’est pas comme au hockey. D’ailleurs, c’est rare que les équipes remportent le championnat quand ils jouent devant leurs partisans », a réagi André Bolduc, l’entraîneur adjoint et des demis défensifs chez les Alouettes. 

L’entraîneur-chef, Khari Jones, n’est pas du style à manquer d’entrain et cette décision n’a fait que galvaniser ses énergies. Il se dit convaincu que son club pourrait atteindre cet objectif. Bolduc a voulu sonner plus prudent tout en étant très optimiste. Après tout, plusieurs partants seront de retour alors que des changements auront surtout lieu du côté des demis défensifs et des secondeurs. 

« On avait l’impression qu’on aurait un élan dès le départ. Si on se dirige vers une saison courte, c’est l’objectif de commencer en grande force et de poursuivre sur cette poussée », a noté Bolduc vendredi matin. 

On y faisait allusion en introduction, mais l’autre modification à assimiler sera le départ du nouvel entraîneur de la ligne offensive, Marcel Bellefeuille, qui a choisi d’accepter le poste de pilote des Gee-Gees de l’Université d’Ottawa. Son retour avec les Alouettes n’aura duré que quelques mois, mais Bolduc avait vu venir le tout. 

« Dès que ce poste est devenu disponible, j’ai pensé tout de suite à Marcel parce qu’il vient d’Ottawa. Si les dirigeants sont intelligents, je me disais qu’ils allaient certainement le contacter. À ce moment, on était en préparation offensive, à un rythme de deux rencontres par semaine, mais on ne lui a jamais demandé s’il était impliqué dans le processus, ça ne se fait pas. Finalement, on a vu quatre noms sortir sur Twitter pour les entrevues dont celui de Marcel », a expliqué Bolduc en précisant que Bellefeuille a tout de même hésité avant de reprendre le collier de ce programme qu’il a dirigé de 1998 à 2000. 

André Bolduc« Il y avait donc une grosse possibilité qu’il accepte le poste surtout avec le climat d’incertitude dans la LCF. C’est probablement le facteur qui a penché dans l’équation. Notre saison est repoussée en septembre et est-ce qu’on aura une saison? L’incertitude a sûrement facilité sa décision », a soupesé Bolduc qui affirme avoir adoré travailler avec lui même si ce fut bref. 

La bonne nouvelle, c’est que les Alouettes ne ressentent pas l’urgence de le remplacer. Ils ont malgré tout contacté quelques candidats disponibles et ils vont évaluer le tout selon l’évolution des décisions pour le calendrier 2020. 

Minimum 10 jours de camp d’entraînement SVP

Père de quatre enfants, Bolduc suit les développements du déconfinement avec un grand intérêt. Ainsi, il se doutait bien que la réalité actuelle repousserait le début de la saison 2020 au plus tôt au début septembre. 

« Comme tout le monde, je le voyais venir depuis plusieurs semaines. Je ne voyais pas comment on aurait pu aller à Montréal dans une situation comme celle-ci. On a une pensée pour toutes les personnes qui ont perdu leur travail ou qui ont arrêté de travailler. On est dans le même bateau », a confirmé Bolduc. 

L’entraîneur d’expérience – et ancien joueur – a pu donner un aperçu du plan qui semble réaliste à ses yeux.  

« Mon avis, c’est qu’on aura besoin d’un camp d’entraînement d’un minimum de 10 jours pour s’assurer que les joueurs soient bien préparés, pour qu’on limite les risques sur leur santé physique. Ensuite, on pourrait avoir un calendrier de huit ou neuf matchs. On doit s’assurer que ces joueurs soient préparés pour assumer la charge de course, les contacts et tout ça avant de commencer la saison », a-t-il souhaité. 

Ce camp d’entraînement succinct se déroulerait vers la fin août. Plutôt étrange pour un entraîneur qui devrait multiplier les heures de travail ces jours-ci.   

« Habituellement, après la Fête des mères, on fait les bagages et on part en camp d’entraînement. Donc même à la maison ici, il y a une adaptation. Je ne suis plus supposé être ici. Parfois, j’ai l’impression que je les dérange un peu. Je suis plein d’énergie et je travaille normalement de longues journées avec deux entraînements par jour. J’essaie de passer cette énergie à l’extérieur. Mais avec tout ce qui se passe, c’était la meilleure décision à mes yeux de reporter le tout », a décrit Bolduc qui se défoule notamment sur un projet de pergola. 

« Le football reste dans nos pensées. C’était plus difficile de jour en jour cette semaine. On pense aux joueurs qu’on devait évaluer. Mais comme tout le monde, on ne peut rien y faire et c’est la partie difficile. On doit attendre alors qu’on est habitués, en tant qu’entraîneur, de contrôler des éléments », a poursuivi avec pertinence celui qui vient d’obtenir sa promotion d’entraîneur adjoint. 

Bolduc voit Wilder parmi l’élite de la LCF 

En attendant d’en savoir plus, Bolduc s’assure que ses « poulains » de l’attaque au sol ne négligent pas leur condition physique malgré des circonstances peu évidentes. D’ailleurs, on a vu qu’un joueur de l’Impact, Steeven Saba, s’est fracturé le pied gauche en courant dans les rues de Montréal. 

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les joueurs n’ont pas tous la même chance que les fils de Bolduc alors que Thomas, le quart-arrière, et Raphaël, le receveur, peuvent s’entraîner ensemble à leur guise. 

« C’est difficile à recréer et il y a des limites dans tous les domaines. On peut être créatifs comme les circuits de cross fit, mais ça prend du désir. Si des gars se laissent aller ou qu’ils n’ont pas le désir de se garder en forme, ils vont être dans le trouble », a reconnu Bolduc. 

À titre d’exemple, Tyrell Sutton, dont la conjointe vient d’accoucher, n’a pas autant de la latitude pour s’entraîner à Montréal comparativement à James Wilder fils aux États-Unis.

À propos de Wilder, Bolduc prévoit que l’athlète de 28 ans rebondira de manière fabuleuse.  

« Il a besoin de la confiance de ses entraîneurs. Même avant de lui accorder un contrat, on avait eu des contacts ensemble. Il avait été libéré par Toronto donc on pouvait le faire. Je lui avais écrit que je voulais le prendre en main pour qu’il se concentre sur le football. Qu’il n’ait pas de frustration face à son utilisation. Qu’il ne traîne pas ça en lui et que ça provoque des blessures et tout. Je lui ai dit qu’on désirait qu’il soit avec nous. Quand il a signé son entente, on a annoncé qu’il serait le remplacement de William Stanback. On ne lui garantit rien pour le nombre de portées, mais on lui a fait la promesse qu’il aura toutes les chances de s’épanouir. Je pense que ce gars-là peut être l’un des meilleurs joueurs de la LCF s’il garde la tête froide, s’il fait ce qu’on lui demande et qu’on lui donne confiance », a prétendu Bolduc. 

Le Québécois se dit ravi de son unité composée qui dispose d’une belle variété d’expérience et de jeunesse avec trois Américains (Wilder fils, Sutton et Dominick Bragalone) et trois Canadiens (Shaquille Murray-Lawrence, Jeshrun Antwi et Colton Klassen) en plus de Spencer Moore, Christophe Normand et Étienne Moisan à la position de centre-arrière. 

Au passage, il a admis que le camp d’entraînement écourté provoquera inévitablement un impact sur les jeunes joueurs qui seront privés d’une expérience complète. La logique laisse donc croire que les joueurs repêchés qui disposent d'une dernière année universitaire d’admissibilité devront privilégier ce scénario.