Pour ceux qui se demandent ce qui se passe avec les Alouettes de Montréal, j’ai retenu une séquence d’environ cinq minutes au troisième quart du match de vendredi qui selon moi explique non seulement l’allure du match, mais l’allure de la saison.

Les trois unités ont été impliquées et ont mal paru dans la séquence que j’ai retenue.

Alouettes 11 - Stampeders 59

Il reste 10 min 37 à jouer au troisième quart. Greg Henderson a l’opportunité de faire une interception à la ligne de 2 des Alouettes alors que les Stampeders étaient près d’ajouter des points. Bo Levi Mitchell prend l’une de ses rares mauvaises décisions dans le match en lançant une passe sans voir qu’Henderson était entre lui et son receveur de passe. C’est alors qu’Henderson met les mains sur le ballon, mais l’échappe, et les Stamps se contentent tout de même d’un placement. On repart en attaque, à 9 min 52 : sur le premier jeu offensif après le placement, TJ Graham échappe le ballon à cause d’un mauvais synchronisme. Je ne sais pas si on voulait faire un balayage rapide, mais bref, Graham passe entre Luc Brodeur-Jourdain et Drew Willy donc la remise en shotgun lui arrive dans les jambes et ça cause du cafouillage qui permet aux Stamps de recouvrir le ballon. À 8 min 05, touché des Stampeders grâce à Rob Cote alors que ce dernier était complètement seul dans le flanc. Après, à 7 min 20, sur le retour de botté d’envoi après le touché de Cote, voilà un mauvais retour combiné à une pénalité pour avoir retenu. Le ballon est placé à la ligne de 15 des Alouettes. Comment voulez-vous que cette attaque déjà déficiente réussisse à marquer des points à partir de la ligne de 15? Les chances sont pratiquement nulles. Sur le jeu suivant, à 7 min 16, sac du quart. Éventuellement à 6 min 22, les Als ont la possibilité de concéder un touché de sûreté parce qu’on est dans notre zone des buts pour dégager combiné au fait que les Stamps étaient en feu sur les retours de botté de dégagement : on se dit que c’est peut-être mieux de limiter les dégâts et de donner les deux points étant donné que le retourneur des Stamps est déjà au milieu du terrain avant même d’avoir donné le ballon. Voilà qu’on décide malgré tout de dégager et ça résulte en un retour pour le touché des Stamps. À 5 min 48, la transformation d’un point est réalisée.

En cinq minutes de jeu, les Stampeders ont engrangé 17 points et les trois unités des Alouettes ont mal paru.

C’est ça les Alouettes de Montréal en 2017 : des erreurs, un manque d’exécution, un manque de synchronisme et un manque d’opportunisme.

Bowman avait raison

C’est une chose de perdre un match, mais ça dépend de la façon de perdre. C’est là que c’est vraiment désastreux.

John Bowman avait raison de dire que sept défaites d’affilée, c’est honteux, mais le problème ce n’est pas juste les défaites, c’est la façon qu’on se fait lessiver aussi (avec environ 25 points d’écart par match).

Une 7e défaite de suite pour les Alouettes

J’ai retenu une de ses déclarations en particulier.

« J’ai l’impression qu’il y a des gars qui s’en foutent, mais c’est juste mon opinion. »

Les gars dans l’équipe sont les mieux placés pour savoir ce qui se passe : ils savent qui arrive de bonne heure au stade, qui s’entraîne fort, qui fait des heures supplémentaires...

Bowman n’avait pas à marcher sur des œufs. S’il y a quelqu’un qui peut se permettre de parler de la sorte et de brasser ses coéquipiers, c’est bien Bowman. C’est le vétéran qui a le plus d’ancienneté. Si on regarde la longévité de sa carrière, c’est Monsieur Alouettes dans le vestiaire. Il travaille fort et les statistiques sont là. Si c’est sa perception, ça ne doit pas être loin de la réalité.

C’est une année particulière au niveau de la description et de l’analyse des matchs pour moi. Ça fait longtemps que je n’ai pas vu les Alouettes aussi mauvais sur le terrain, il ne faut pas se le cacher. En tant qu’ancien joueur moi-même, j’ai toujours trouvé difficile de critiquer les joueurs. C’est vrai qu’il y a une confrérie des joueurs, et je tiens pour acquis que personne ne fait exprès pour mal jouer. Je ne suis pas parfait non plus.

Si ma mémoire est bonne, j’ai totalisé 232 matchs en carrière. Après chaque match, on reçoit une évaluation notée sur 100. Je n’ai jamais eu de note parfaite dans ma carrière. Il y a toujours des jeux que j’ai regrettés dans mes matchs, qui parfois m’empêchaient de dormir. C’est pourquoi je trouve que le côté le plus difficile de mon travail, c’est de critiquer les joueurs. Moi le premier, je ne suis pas parfait. J’en ai fait des erreurs, j’en ai eu des mauvais matchs. À ma dernière année avec les Alouettes en 2001, on a nous aussi perdu sept matchs d’affilée en plus du premier match éliminatoire. Notre fiche de 9-2 a chuté à 9-9 et on a quand même fait les éliminatoires même si on a vite été exclus. Au moins on restait compétitifs, on se battait, on se présentait.

Mais ce qui me dérange présentement, c’est ce que Bowman a dit. Ça fait quelques semaines que je le ressentais de l’extérieur, mais lui, il le vit de l’intérieur. Les joueurs ont l’air d’accepter facilement la situation, ça n'a pas l'air de leur faire mal.

En plus, on se fait outcoacher, il ne faut pas avoir peur des mots. Hier, on a affronté LA meilleure équipe avec un personnel d’entraîneurs chevronnés. On s’est fait donner une leçon de football, pas juste au niveau des joueurs, mais aussi au niveau des entraîneurs. Il y a un gros examen de conscience à faire à tous les égards. Quand tu te fais battre 59-11, tout le monde est dans le même bateau. J’espère que personne ne se déresponsabilise.

Rien ne va plus pour Montréal et ça s'empire

Les coordonnateurs Anthony Calvillo et Greg Quick sont clairement débordés. Je ne sais pas à quel point AC connaissait le système de Jacques Chapdelaine, mais quand Chapdelaine est parti, il est parti avec son système aussi. Personne ne connaît mieux le système que l’architecte de celui-ci. Ç’a l’air d'aller vite pour eux. Hier, en fin de match, il semble même y avoir eu des flammèches entre Calvillo et Reed. Je ne sais pas exactement pour quelles raisons, mais peut-être qu’on va le savoir quand les joueurs vont reprendre l’entraînement.

Il y a quelques semaines Luc Brodeur-Jourdain se demandait si c’était le fond du baril et j’ose espérer qu’on y est aujourd’hui. J’ai de la misère à croire que ça puisse être pire. Les Alouettes vont probablement reprendre l’entraînement mardi avant de jouer le lundi de l’Action de grâce. Ils auront beaucoup de temps pour récupérer et se préparer. Je ne peux pas croire qu’il n’y aura pas de changements. Des messages doivent être lancés.

Shiltz, une lueur d’espoir?

Je veux quand même conclure sur une note positive en parlant du jeune quart-arrière de 24 ans Matthew Shiltz, qui est arrivé en relève dans les derniers instants du troisième quart. Il a été 8 en 10 pour 102 verges hier, et les deux passes incomplètes ont été causées par des échappés de Graham sur deux longues passes qui auraient peut-être donné deux longs touchés. C’est de loin lui l'aspect le plus positif de ce match. Comme c’était déjà 49-11 quand il est apparu, c’est vrai que l’équipe adverse n’avait plus besoin de faire des choses complexes. C’est toujours plus facile de rentrer comme réserviste quand on n’a plus rien à perdre et que le match est hors de portée, car il n’y a aucune pression sur soi. Le quart partant, lui, doit se préparer toute la semaine avec une certaine pression. Le réserviste a le luxe d’arriver et d’avoir observé le plan de match défensif depuis le début du match à partir des lignes de côté.

Mais quand même, je me souviens des performances de Shiltz durant le camp, contre Bishop's notamment. C’est lui qui faisait marquer le plus de points à l'attaque en présaison. Il me semble être un gars intelligent qui a un bon langage corporel de par sa façon de se tenir et de donner les directives. Il a quelque chose d’intéressant qui ne se calcule pas. Ça ne veut pas dire que Schiltz va être le partant lors de la prochaine rencontre, mais il a bien paru hier et au moins c’est une lueur d’espoir. On ne sait jamais, c’est peut-être le quart du futur. On ne savait pas qui était Bo Levi Mitchell quand il est arrivé dans la LCF, puis il est devenu une vedette. Pensons aussi à Jonathon Jennings et Travis Lulay.

*Propos recueillis par Audrey Roy