MONTRÉAL – Chip Cox aime tellement le football qu’il serait incapable d’être entraîneur... Ayant été si dédié à ce sport, cet ancien joueur émérite des Alouettes ne pourrait pas tolérer le manque de rigueur de certains athlètes. 

Cox a connu une fabuleuse carrière, de 2006 à 2018, dans l’uniforme des Alouettes. Tassé cavalièrement par l’ancien directeur général Kavis Reed après cette saison 2018, Cox n’a plus jamais été en contact avec aucun des dirigeants des Alouettes. 

On sent le pincement au cœur de Cox quand il aborde ce sujet. Mais l’occasion est parfaite pour y remédier puisque Cox a été élu, dès sa première année d’admissibilité, parmi la cuvée 2022 qui fera son entrée au Temple de la renommée du football canadien. On présume que l’organisation montréalaise lui préparera un hommage plus que mérité. 

Mais on se dit surtout que ce serait dommage que l’héritage de Cox soit oublié. Loin d’être le plus bavard de son équipe, ce maître de la défense aurait tant eu à partager. 

« L’affaire avec moi, c’est que si tu me regardais chaque jour dans ma préparation, tu pouvais apprendre beaucoup. Mais si tu ne faisais que m’écouter, tu n’apprenais probablement pas beaucoup de trucs. Je n’étais pas du style à dire ‘Il faut qu’on fasse ça ou ceci de cette manière’ », a décrit Cox lors d’une visioconférence. Chip Cox

Perfectionniste et compétitif à l’extrême, Cox utilisait un truc de recrue pour raffiner son art. Pendant les entraînements, il s’élançait toujours en dernier dans les exercices afin de constater les erreurs commises par ses coéquipiers et s’inspirer de ceux qui excellaient. 

« Mais, une fois rendu à la journée du match, j’y allais en premier. Parce que c’était le temps de montrer ce que je peux faire », a indiqué Cox. 

Il était justement intraitable quand ça comptait. Il a terminé sa carrière avec 977 plaqués défensifs dont 115 en 2013 en route vers le titre de joueur défensif par excellence de la LCF. 

Une deuxième carrière d’entraîneur permettrait de transmettre cette expertise, sauf que. 

« J’y pense, mais le football veut tellement dire à mes yeux, que ça pourrait être difficile pour moi d’être entraîneur. Dans le sens que le football a eu un immense impact dans ma vie. J’aurais fait bien des bêtises, mais je ne voulais pas en être privé », a-t-il d’abord prononcé.  

« Mes enfants me demandent toujours pourquoi je ne suis pas entraîneur. Ils ne connaissent pas cette explication, mais c’est la vraie raison, je deviendrais frustré avec ceux qui ne sont pas 100% dédiés à la tâche », a ajouté Cox qui fêtera son 39e anniversaire le 24 juin. 

Le père de quatre enfants se garde une petite porte ouverte. Peut-être que la sagesse fera son œuvre avec les années et qu’il parviendra à se lancer dans ce métier. En attendant, toujours en excellente forme physique, Cox a plutôt acquis un terrain de golf de neuf trous, il détient un restaurant et un gymnase en plus d’avoir entamé une formation pour devenir policier où il réside, à Columbus, en Ohio.

La position Chip Cox

Trouvaille de l’ancien directeur général Jim Popp, Cox a eu besoin de temps avant d’accepter le plan qui a propulsé sa carrière à son sommet. Popp l’avait attiré en sol canadien pour l’employer comme secondeur du côté large, cette position qui s’apparente plus à celle d’un cinquième demi défensif. 
 
« Je ne voulais pas. J’arrivais des États-Unis et je ne connaissais rien à la LCF. Quand j’étais recrue, j’ai dit que je n’étais pas intéressé, que ce n’était pas pour moi », a-t-il raconté.

En 2009, Popp a libéré T.J. Hill et il est revenu à la charge avec le coordonnateur défensif Tim Burke. Cox a craint de subir le même sort s’il ne parvenait pas à le remplacer adéquatement. 

Chip Cox« Jim m’a rappelé qu’il m’avait embauché pour ce rôle. Quand ton DG te dit qu’il a besoin de toi là, tu fais tout ce que tu peux pour le groupe. Au départ, j’étais contre l’idée, mais j’ai compris que cette position était faite pour moi », a constaté Cox qui aurait rêvé qu’un mandat similaire existe dans la NFL. 

Popp avait vu juste et Cox a aidé les Alouettes à atteindre un autre niveau. Ce n'est pas pour rien que le collègue Pierre Vercheval a plusieurs fois fait référence à cette position comme celle de Chip Cox. Son aplomb a aidé le club montréalais à savourer la conquête de la coupe Grey en 2009 et 2010. Son souvenir éliminatoire préféré est survenu lors du deuxième sacre. 

« Il y a une photo sur laquelle Billy Parker et moi, nous nous tenons avec le bras autour du cou. Si vous regardez notre visage, ça veut dire ‘On l’a fait encore!’ Son interception venait de confirmer notre victoire. Mais cette photo veut dire bien plus, elle me fait monter les larmes aux yeux. On était la meilleure équipe, la pression était sur nos épaules et on a réussi de nouveau », a témoigné Cox. 

Pour accomplir cette ascension, Cox est très reconnaissant du support obtenu via Davis Sanchez et Anwar Stewart. Deux coéquipiers qui lui ont appris à devenir un professionnel tout en pouvant s’amuser. Du côté des entraîneurs, il vante Chris Jones, Marc Trestman et ajoute le nom de Popp dans ce lot. 

Jones lui a fait comprendre « qu’il y avait quelque chose de bon pour moi dans la LCF, au Canada ». Quant à Popp, il a su le compenser financièrement alors que la NFL l’attirait encore. 

L’autre lien fort a été celui qui s’est tissé avec les partisans. Malgré sa personnalité réservée, il s’est établi comme un favori de la foule montréalaise.

« J’adorais les partisans. Ils m’aimaient et ils m’ont accepté, ils étaient très respectueux. Ils comprenaient que je ne recherchais pas vraiment l’attention, je voulais simplement jouer au football. Je n’aurais pas pu rêver de meilleurs partisans », a cerné Cox avec justesse. 

L’Américain a enfilé l’équipement de football sur le tard et il n’a pas reçu les plus grands éloges au niveau universitaire. Mais, même s’il n’a jamais joué pour la gloire et les honneurs, cette intronisation précoce au Temple de la renommée du football canadien le touche grandement. 

« Ça veut dire beaucoup, c’est vrai. Je savais que, la journée que j’aurais ma chance, je ne perdrais pas ma place sur le terrain. Ça valide tout ça, c’est comme la cerise sur le sundae. Ç’a pris du temps, mais j’obtiens ma reconnaissance », a conclu Cox qui aurait été intéressant à écouter plus souvent en entrevue.