MONTRÉAL – Est-ce que les Alouettes se tirent dans le pied en s’entraînant trop? On vous le concède, la question peut sembler absurde puisque le club montréalais ressemble plutôt à une formation qui a besoin d’une tonne de pratique.

Mais ce questionnement ne provient pas de quelqu’un qui parle à travers son chapeau. Il a été soulevé par Pierre Vercheval qui a connu une grande carrière dans la Ligue canadienne de football. L’analyste de RDS a détaillé ses observations à ce sujet dans le dernier segment de sa plus récente chronique.

En résumé, il a constaté que les séances d’entraînement des Alouettes sont très longues et elles incluent beaucoup de répétitions à pleine vitesse. De plus, Vercheval a remarqué que les Alouettes en arrachent nettement plus à domicile (moyenne de 45-16 contre 21-13 à l'étranger) alors qu’ils disposent d’un entraînement supplémentaire par semaine considérant l’absence de voyagement.

Il s’est également souvenu que Don Matthews et Marc Trestman préféraient accorder du répit à leurs joueurs en se tournant souvent vers des simulations de jeux et même des congés d’entraînement pour Matthews.

Son exemple le plus probant remonte à la saison 2001 avec les Alouettes. Sous les ordres de Rod Rust, qui était exigeant dans les entraînements, l’équipe s’était effondrée après un départ de 9-2.

La question devait donc être refilée à Mike Sherman surtout que l’entraîneur des Alouettes s’expliquait mal que la qualité des entraînements de sa troupe ne se transposait pas dans les parties.

« On pratique moins que n’importe quelle équipe que j’ai pu diriger auparavant. J’aurais de la difficulté à justifier cette hypothèse », a répondu Sherman qui prendra sans doute le temps de repenser à cet enjeu.

Ce sont des commentaires de Patrick Lavoie qui ont mené Vercheval à réfléchir à cette possibilité. Le Québécois avait notamment déploré que l’équipe avait « manqué de jus » en début de rencontre contre Hamilton. On l’a donc invité à se prononcer sur le sujet. 

« Ce n’est pas à moi de décider. Je pense que Coach Sherman et ses adjoints veulent voir des choses. On a un nouveau quart-arrière qui a besoin de répétitions et de voir le terrain un peu plus. C’est à eux de répondre. Nous, on est là pour exécuter et non pour critiquer la quantité de répétitions.

Johnny Manziel« Si on commence à faire ça comme joueur, c’est là que ça va s’en aller dans la mauvaise direction. C’est là qu’on va perdre le vestiaire et la relation qui existe avec les entraîneurs. On ne veut pas faire ça. Au contraire, on veut être un groupe et pousser dans la même direction. J’ai fait partie d’une équipe qui a terminé une saison 2-16, mais on a toujours poussé dans la même direction. L’année suivante, on a perdu en finale et on a soulevé le trophée l’autre année d’après. Ce ne serait pas la bonne solution de commencer à dire qu’on pratique trop », a déclaré Lavoie en faisant référence à son passage avec le Rouge et Noir.

Comme le dit Lavoie, ce n’est pas aux joueurs de trancher là-dessus, mais il importe de constater que les réalités de la NFL et de la LCF sont différentes. Au sud de la frontière, Sherman avait le luxe de posséder plus de joueurs à sa disposition ainsi que des moyens plus élaborés. On peut également présumer que plusieurs athlètes de la NFL ont moins de contraintes quotidiennes à l’extérieur du terrain grâce à leurs revenus plus élevés.

Bref, le dossier a été abordé et Sherman demandera peut-être l’avis de ses adjoints qui oeuvrent en sol canadien depuis de nombreuses années.

Manziel devra être plus patient

Le premier départ de Johnny Manziel dans la LCF a été analysé en détails. Désormais, c’est sa réponse à sa deuxième sortie qui importe. La patience devra dicter son approche pour cette prestation.

« Ce fût une expérience d'humilité pour moi. Il faut grandir de cela »

Les entraîneurs lui ont rappelé l’importance de mieux gérer ses actions sur le terrain même s’il est loin d’avoir été l’unique coupable sur ses quatre interceptions.

« Évidemment, il aurait pu prendre de meilleures décisions à certains moments. C’est lui le commandant sur le terrain. On voudrait le voir amener le ballon loin dans le territoire adverse avec succès et avec l’aide de ses coéquipiers. Il ne peut pas le faire par lui-même », a noté Sherman en rappelant que la ligne offensive doit mieux s’acquitter de sa tâche.

« La débâcle de vendredi est survenue sur plusieurs fronts pas seulement pour notre quart-arrière. Toute l’équipe doit se relever de ce match. Johnny arrive tôt et il quitte tard, il fait tout ce qu’il doit pour être le quart-arrière qu’il souhaite et dont on a besoin », a ajouté Sherman.

Manziel l’admet d’emblée, le sommeil a été difficile à trouver après une telle dégelée. En plus d’impressionner ses nouveaux coéquipiers, il aurait voulu envoyer une belle réplique à ses dénigreurs.

« Je me sentais mal, je voulais tellement gagner ce match, plus que n’importe quel auparavant. Mais tu encaisses le tout comme un homme et tu dois contribuer à remonter le moral de l’équipe. Après tout, le calendrier ne s’arrête pas, on a encore 11 ou 12 matchs à jouer », a-t-il confié. 

« Je regarde ça comme un test, j’ai été à l’écart pendant deux ans. […] J’aurais pu me dire que des millions de personnes regardaient mon premier match. Plusieurs de ces personnes vont déjà perdre confiance en nous en raison de ce match. Mais je ne vais pas le faire, je le vois comme un défi », a évoqué le quart-arrière.

À ne pas en douter, ses nouveaux coéquipiers vont lui permettre de se reprendre. Après tout, son potentiel se démarque parmi les candidats qui ont tenté de succéder à Anthony Calvillo.

« Je sens que cette équipe croit en moi et j’espère que ça continuera d’être le cas. Je sais que ce n’est pas facile après m’avoir vu commettre quatre interceptions et c’est encore plus vrai avec l’engouement autour de ce match. Mais c’est arrivé et j’ai une bonne relation avec ces joueurs. J’ai parlé à quelques gars de l’attaque après la partie et j’ai assumé une grande part du blâme. Je retire de la fierté de mon travail », a spécifié Manziel. 

Le produit de l’Université Texas A&M s’est justement entretenu avec plusieurs joueurs offensifs et défensifs dans les derniers jours. Il souhaite acquérir des connaissances détaillées et partager les siennes afin d’atteindre la plénitude qui a appartenu aux Tiger-Cats à son baptême au Canada.

« On a besoin d’apprendre à jouer ensemble, d’être sur la même longueur d’onde. Quand tu atteins ce point, c’est amusant. On a pu voir que Hamilton avait du plaisir, ils sont ensemble depuis longtemps. On va atteindre ce point, on va sourire nous aussi à notre tour, il faut juste traverser des choses », a conclu Manziel.