MONTRÉAL – Non, Hugo Richard n’est plus le quart-arrière vedette de la scène universitaire canadienne, celui qui a mené le Rouge et Or de l’Université Laval à deux conquêtes de la coupe Vanier. Il est désormais le Hugo Richard qui doit repartir à zéro et assimiler les responsabilités effacées des unités spéciales.
 
Chaque saison, la Ligue canadienne de football accueille de nouveaux membres qui doivent s’adapter à une réalité totalement différente. Souvent, ça s’accompagne d’une grande dose d'humilité à ingérer.

Intelligent comme il l’est, Richard savait bien qu’il aurait une tonne de choses à prouver avant de pouvoir être perçu comme un candidat légitime pour la position numéro un, deux ou trois au poste de quart. Les pivots canadiens ne sont pas rares dans la LCF, ils sont pratiquement une denrée inexistante. Le long travail de persuasion s’est amorcé au camp des recrues où il a pu exposer une partie de son potentiel.

Mais ce ne fut pas suffisant pour hériter d’un minimum de répétitions au camp d’entraînement derrière les Antonio Pipkin, Jeff Mathews, Vernon Adams fils et Matthew Shiltz. Nul doute, c’est une épreuve exigeante pour la patience et le compétiteur en soi.
 
« C’est sûr que depuis que le camp a commencé, je n’ai pas eu beaucoup d’implication en attaque. C’est correct, les dirigeants devaient faire des évaluations, il y a beaucoup de vétérans. Peu importe la raison, j’étais correct avec ça », a admis Richard, mardi en fin de matinée.
 
Doté d’un physique intéressant et de capacités athlétiques, Richard savait que les Alouettes voudraient lui apprendre de nouvelles responsabilités et il ne voulait surtout pas rester les bras croisés comme spectateur. Pour l’instant, c’est sur les unités spéciales qu’un rôle lui a été confié.
 
« J’ai trouvé une façon de m’impliquer sur les unités spéciales. C’est la première fois de ma carrière que je suis sur les unités spéciales donc ça demande beaucoup d’adaptation et je pose beaucoup de questions. J’ai plusieurs anciens coéquipiers du Rouge et Or qui sont ici et ils m’aident beaucoup sur les techniques : comment faire certains blocs, comment placer mes mains. J’essaie de suivre les autres et les premières répétitions à pleine vitesse sont survenues au match », a décrit Richard en ne pouvant pas s’empêcher de sourire.
 
« On apprend à la dure, mais je pense que ça va assez bien et je suis plutôt content », a-t-il poursuivi.
 
En tant que recrue, il réalise qu’il doit accepter la situation et il a puisé sa motivation en relativisant les choses.  
 
« C’est sûr que c’est très difficile de rester concentré et aux aguets. C’est un camp d’entraînement, c’est difficile mentalement et physiquement, mais je me disais qu’un mois, ce n’est rien dans le spectre d’une vie. Je me disais surtout que si une opportunité allait se présenter, ce serait là. Il faut que je sois prêt. À quelques reprises, j’ai eu des répétitions et j’ai bien fait. Je prouve que je reste attentif, que j’étudie mes choses et que je suis toujours prêt à jouer », a confié l’athlète de 24 ans avec franchise.

Apprendre deux positions en même temps
 
C’est là que le camp d’entraînement de Richard se démarque du lot. En plus d’apprendre l’univers des unités spéciales, il poursuit son étude de l’attaque comme s’il était un quart-arrière à temps plein. Sans vouloir se plaindre, il a décrit le tout de cette façon.
 
« Je manque souvent les réunions des quarts pour assister à celles des unités spéciales. C’est à moi d’aller ensuite poser des questions pour savoir si on a changé des choses en attaque pour rester au courant des changements. Quand on étudie des vidéos, je dois aussi regarder les unités spéciales. Ça me demande le double d’investissement de temps, mais si ça veut dire que ça va me donner la chance d’être parmi la formation, c’est sûr que je vais le faire », a déclaré celui qui porte le numéro 6.
 
Il ne s’agit pas de son scénario idéal, mais Richard n’a pas l’intention de quitter le nid des Alouettes. Il est prêt à accepter le tout pour sa première année.
 
« Si je suis sur le terrain, définitivement. Étant un quart-arrière, je pratiquerais sûrement pendant la semaine à cette position. Ce serait déjà ça, j’aurais plus d’expérience en banque pour les prochaines années. Si je suis capable de rester sur la formation active cette saison en jouant sur les unités spéciales, je serais tout à fait content. Je pourrais être sur le terrain, côtoyer les joueurs, faire partie du club et emmagasiner de l’expérience », a-t-il jugé.
 
Comme le soulevait Pierre Vercheval vers le milieu de cette chronique, Richard pourrait contribuer de différentes manières sur les unités spéciales. Que ce soit comme tenir le ballon pour les bottés de précision et comme protecteur personnel sur les bottés de dégagement. Depuis quelques jours, Richard a été ajouté sur l’unité partante des retours de botté d’envoi.
 
« C’est différent, mais ce n’est pas tout le monde qui a la même responsabilité non plus. Je ne suis pas sur le mur (le wedge) que l’on doit former. Je ne suis pas l’un des gros bonhommes, mais je suis quand même technique et rapide. Je suis capable de faire des blocs. On ne me met pas en plein milieu de l’action, mais à un endroit où on a besoin d’un bloc et je vais m’arranger pour le faire », a commenté le droitier.
 
Les entraîneurs des Alouettes ne sont pas là pour faire des cadeaux à Richard, mais ils considèrent qu’il peut s’acquitter de quelques missions du genre. Le joueur de football originaire de Saint-Bruno veut relever les défis un à la fois en commençant par survivre à ce camp d’entraînement.  
 
« (Je retiens) Que ce n’est pas facile. C’est une année différente dans mon cas parce que je suis une recrue donc je devais aussi participer au camp des recrues. C’est très demandant mentalement. Oui, ton corps encaisse le choc quand tu as deux entraînements par jour, mais ce sont les réunions après les pratiques, tout est enchaîné. À l’Université Laval, on avait un peu plus de temps pour récupérer et décrocher. C’est complètement différent pour moi donc ça exige une période d’ajustement et il fallait rester vraiment concentré. Ça fait que tu es vraiment fatigué le soir », a reconnu l’ancien du CÉGEP de Vanier.
 
Richard n’est pas prêt à se consacrer aux unités spéciales à temps plein. Il croit encore à une carrière de quart-arrière dans la LCF comme Brandon Bridge et Andrew Buckley ont pu le faire.  
 
« Je m’accroche à pas grand-chose ces temps-ci, mais il va toujours y avoir une opportunité éventuellement. Peut-être qu’on ne me la donnera pas, mais c’est une autre histoire. Mon espoir, c’est qu’une opportunité à un moment donné va me permettre de m’établir comme quart-arrière. Peut-être pas comme partant, mais juste de pouvoir montrer mon savoir-faire, que je suis capable de gérer un match, de prendre de bonnes décisions. Ça peut se présenter dans les pratiques comme dans un match préparatoire ou même pendant la saison. On ne sait jamais quand ça va se pointer le nez donc je dois toujours être prêt. C’est  difficile de rester concentré et engagé, mais ça va bien pour l’instant. Avec le volume d’entraînement du camp, c’est la portion la plus difficile de la saison selon moi », a ciblé Richard qui parvient à trouver le positif.