MONTRÉAL - John Bowman est heureux qu'on annonce des averses pour le match de samedi entre les Roughriders de la Saskatchewan et les Alouettes. De cette façon, les gens ne pourront pas voir les larmes sur ses joues pendant que le club de football montréalais lui rendra hommage.

Les Alouettes honoreront samedi le plus grand ailier défensif à avoir défendu leurs couleurs. En 14 saisons, Bowman a amassé 134 sacs, plus du double que le suivant sur la liste, son bon ami Anwar Stewart, qui en a obtenu 66.

« Ça signifie beaucoup pour moi. Je n'ai jamais vraiment pu dire au revoir aux partisans comme je l'aurais souhaité, a-t-il souligné au cours d'une visioconférence avec la plupart des journalistes montréalais qui ont couvert sa carrière, jeudi. Alors, d'être de retour et de dire au revoir aux gens qui m'ont aidé et m'ont gardé motivé pendant 14 ans, ça signifie beaucoup.

« Je ne sais pas ce que je vais ressentir samedi, a-t-il ajouté plus tard. Pour l'instant, je suis honoré: combien de joueurs ont joué pour les Alouettes? Il faut avoir laissé sa marque longtemps pour faire partie de cette conversation et être honoré. Heureusement, il va pleuvoir, alors vous ne me verrez pas pleurer quand ils vont jouer la vidéo! »

Les Alouettes sont demeurés discrets sur l'allure que prendra cette cérémonie, présentée à la mi-temps. Mais Bowman ne croit pas que son no 7 ira rejoindre les 11 numéros immortaliséspar les Alouettes.

« Je ne pense pas qu'ils vont retirer mon numéro. Pas encore en tout cas. Juste d'être honoré est suffisant pour moi. C'est à la direction de décider de la façon qu'elle le fera et si elle veut retirer ou non le numéro 7. »

Bowman ne quitte pas tout à fait en ses termes: la pandémie l'aura possiblement privé d'une dernière saison sur le terrain. Mais il quitte en santé et la tête pleine de projets.

« Je n'ai pas de blessures, je peux plier mes genoux et je n'ai pas fait de commotion cérébrale. C'est ce qui fait que je suis en paix avec la retraite. Que je croie être en mesure de jouer ou pas ne pèse pour rien: je suis en santé. [...] Je suis aussi à l'aise avec mes réalisations, pas seulement personnelles, mais ce qu'on a accompli en équipe. »

Et ses réalisationssont nombreuses: en plus de ses 134 sacs, Bowman a été des éditions gagnantes de la coupe Grey, en 2009 et 2010. En 231 rencontres, il a réussi 451 plaqués, une interception, provoqué 32 échappés et marqué un touché. Difficile d'ailleurs pour lui d'identifier son plus beau moment avec l'équipe.

« Il y a tant de bons moments dont je vais me rappeler. Sur le terrain, je pense évidemment aux coupes Grey que nous avons gagnées. À l'extérieur, je pense au travail que j'ai fait dans la communauté, la façon dont je me suis attaché à Montréal. Mais pas seulement ce que j'ai fait et qui était rapporté dans les médias, mais les journées où je suis parti seul pour visiter des enfants, m'impliquer dans la communauté.

« Cette ville m'a adopté. Je ne pouvais rien faire de mal! Je n'ai rien fait pour énerver qui que ce soit, mais j'apprécie tellement la façon dont cette ville m'a accueilli.

« (Ce dont je suis le plus fier), c'est d'avoir été là chaque semaine. Que les gens pensent que j'étais le meilleur ailier défensif ou le pire, personne n'a pu dire que je ne donnais pas tout ce que j'avais. La seule chose que tu contrôles, c'est ton effort, ton énergie, ton attitude. Pendant mes 14 années, mes coéquipiers pouvaient compter sur moi pour apporter tout ça. »

Au chapitre des moins bons moments, il y a la coupe Grey 2008, échappée devant les partisans montréalais aux mains des Stampeders de Calgary.

« Je me rappelle que la défense avait joué tout un match, s'est rappelé Bowman, qui compte entreprendre les démarches pour devenir résident permanent. Mais les opportunités ratées au cours de cette rencontre, jouée à Montréal devant plus de 60 000 personnes au Stade olympique, nous ont coulés. L'énergie était fantastique et de gagner cette coupe Grey devant nos partisans aurait représenté beaucoup pour moi. »

Bowman voudrait maintenant redonner aux jeunes joueurs de football et devenir entraîneur. Comme pour sa carrière sur le terrain, il s'attend à devoir travailler d'arrache-pied afin de gravir les échelons.

« Je me vois commencer comme entraîneur de la ligne défensive et gravir les échelons à partir de là. Pour moi, les meilleurs entraîneurs commencent au bas de l'échelle.

« Je voudrais établir les bases de ma philosophie d'entraîneur. Je sais comment jouer sur une ligne défensive et pourchasser les quarts adverses, mais je voudrais apprendre à communiquer ce savoir. Pas aux meilleurs joueurs, mais aux gars comme moi, qui n'étaient pas dotés du meilleur physique, qui doivent travailler pour arriver à leurs fins. »

Aimerait-il travailler à Montréal?

« J'adorerais travailler à Montréal, c'est certain. Mais comme entraîneur, on prend ce qu'on vous offre, surtout à vous début. Je n'ai pas discuté avec les Alouettes: comme vice-président de l'AJLCF, ce serait illégal. »

Une chose est certaine: tous les honneurs qui lui seront rendus samedi et dans les années à venir, Bowman ne les aura pas volés.