MONTRÉAL – À l’écart du football depuis le printemps 2017, le joueur de ligne offensive Kennedy Estelle devrait obtenir, dimanche, la chance de prouver qu’il mérite une autre chance dans la Ligue canadienne de football.

En raison de l’absence du bloqueur à gauche, Tony Washington, pour des raisons personnelles, les Alouettes de Montréal devaient trouver une solution de rechange pour leur affrontement à Moncton face aux Argonauts de Toronto. La première décision a été de déplacer Chris Schleuger du côté gauche et le choix le plus prudent aurait été de ramener Spencer Wilson dans la formation partante en tant que bloqueur ou garde à droite. Toutefois, son rendement n’a pas été assez convaincant depuis le début de la saison et les Alouettes ont accordé une audition à Estelle lors de l’entraînement cette semaine.

Sean Jamieson et Kennedy EstelleMême s’il n’a pas joué un seul match régulier depuis 2016, il semble avoir démontré aux entraîneurs qu’il pouvait relever le défi. Estelle, qui a été embauché le 16 juillet dernier, possède quelques arguments en sa faveur comme une charpente de six pieds six pouces et 290 livres.

« J’ai le sentiment que je suis plus rapide que la plupart des bloqueurs. Je suis fort pour ma grandeur et je peux me rendre au point d’attaque sans tarder. Bien sûr, je suis parmi les grands, ce qui m’aide pour pouvoir placer mes mains plus vite sur mes adversaires », a noté Estelle pour décrire ses atouts. 

Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un pari audacieux puisque son expérience professionnelle se limite à 11 parties avec les Roughriders de la Saskatchewan en 2016.

« On essaie encore de figurer le plan, Kennedy s’est entraîné à cette position. On peut aussi miser sur Landon (Rice) et Spencer. Peu importe qui sera choisi, ils ont fait du bon travail à mes yeux cette semaine », a exprimé l’entraîneur-chef, Khari Jones. 

« Je suis curieux d’en voir plus surtout que ça fait longtemps qu’il a joué », a admis Jones en vantant l’effort déployé par ce colosse originaire du Texas. 

Afin de pousser la question un peu plus loin, on a bavardé avec Luc Brodeur-Jourdain qui épaule Paul Dunn dans la gestion de la ligne offensive et il n’a pas tenté de masquer la vérité. 

« Kennedy est dominant au point de vue physique. Il a un très bon jeu de pieds et un très bon punch. Au niveau tactique, c’est un joueur inexpérimenté. Il a besoin d’un peu plus de formation sur les X et les O », a décrit Brodeur-Jourdain qui accorde une longueur d’avance à Estelle sur Wilson quant aux aspects physiologiques et techniques alors que c’est l’inverse pour la dimension stratégique.  

Lorsque ça fait deux ans qu’on patiente à la maison pour retourner sur un terrain de football, on n’a pas besoin d’un dessin pour comprendre que cette occasion vaut de l’or.

« Je présume que j’ai été chanceux, j’ai appelé mon agent une journée et il m’a dit qu’il y avait de l’intérêt de la part des Alouettes. J’ai fini par me joindre à l’équipe durant la saison », a expliqué celui qui a profité des conseils de son père, un entraîneur d’athlétisme, pour conserver sa condition physique.

Estelle a traversé tout un test pour son humilité car il avait entamé son parcours universitaire avec les prestigieux Longhorns de l’Université du Texas. Il a cependant gaffé dans son comportement à quelques reprises si bien qu’il a été expulsé de l’équipe.

« J’étais jeune et mes parents ne s’y connaissaient pas en football. Je n’ai pas eu cet encadrement dont j’aurais eu besoin. Ce n’est pas une excuse, mais je suis arrivé jeune à l’université sans trop savoir comment me comporter. J’ai commis quelques erreurs et j’ai fini par être libéré de l’organisation. Je me suis donc retrouvé dans un programme de deuxième division. On peut dire que j’ai appris ma leçon quand j’étais jeune. Ça m’a ouvert les yeux surtout que la nouvelle a fait le tour sans tarder. C’est à partir de là que j’ai appris à faire les choses de la bonne manière », a commenté Estelle sans démontrer d’impatience.

L’ajout d’Estelle du côté droit surprendra quelques partisans des Alouettes, mais il faudra surveiller le rendement de Schleuger à gauche. À six pieds quatre pouces et 305 livres, il semble correspondre davantage à un bloqueur à droite, mais c’est plutôt l’inverse.

« Depuis que Chris s’est présenté au camp, j’ai toujours trouvé que c’était un bloqueur à gauche très dominant et qu’il avait des choses à travailler sur le poste de bloqueur à droite. Il a continué de le faire pendant les premières semaines de la saison. Mais l’endroit où il est le plus confortable, c’est comme bloqueur à gauche. C’est sa position naturelle, c’est là qu’on sent qu’il est fort avec sa base et ses mains.  Pendant le dernier match, on a vu qu’il peut aussi exceller à droite », a expliqué Brodeur-Jourdain. 

Après avoir entamé la saison régulière sur l’unité partante, Schleuger a dû prendre son mal en patience alors que les entraîneurs devaient jongler avec le ratio de joueurs canadiens et américains. De plus en plus, on sent que les entraîneurs ne veulent pas se passer de lui.

« Chris a été comme une perle cachée depuis le début de la saison. Le ratio a joué pour beaucoup dans l’équation. C’est assurément un joueur qui sera dominant à long terme », a jugé LBJ.

Si la ligne offensive des Oiseaux a essuyé son lot de critiques dans les dernières années, elle démontre des signes très encourageants présentement. Estelle voudrait devenir le sixième homme de confiance de cette unité derrière Washington, Trey Rutherford, Kristian Matte, Sean Jamieson et Schleuger.  C’est à lui de prouver qu’il peut déloger Wilson et Rice.