Encore une fois, nous avons malheureusement eu la preuve que les Alouettes maîtrisent l’art de se battre eux-mêmes. Ils sont rendus des champions pour se tirer dans le pied.

Après six matchs, dont cinq revers, on pourrait justement dire que les Alouettes ont une fiche de 5-0 contre les Alouettes parce que dans toutes les défaites, ça a été le festival des erreurs, des pénalités, des plaqués ratés, des passes échappées et je vais m’arrêter là. Nous en avons encore eu la preuve hier dans cette défaite de 44 à 23.

Eskimos 44 - Alouettes 23

Je suis conscient bien évidemment que les Alouettes affrontaient une très bonne équipe, alors que les Eskimos d’Edmonton étaient de passage au Stade Percival-Molson. On a vu pourquoi le quart Mike Reilly a été élu l’an dernier joueur par excellence de la Ligue canadienne. Si certains doutaient encore de cette reconnaissance, j’ose croire qu’ils les a convaincus après une prestation de 415 verges et quatre passes de touché.

Malgré ce fort match, le premier point soulevé par le quart des Eskimos après la rencontre était que son équipe devait arrêter d’écoper d’autant de pénalités, alors qu’ils en ont eu pour près de 200 verges contre les Alouettes. La discipline était le point central après une victoire par un écart de près de 20 points!

On avait vu un scénario similaire après la défaite des Alouettes contre Calgary. Les Stampeders étaient déçus de leur match même s’ils l’avaient emporté par 17 points. On voit que ces équipes ne sont présentement pas au même point que les Alouettes, qui sont plutôt à la recherche de victoires morales.

Des opportunités ratées

Avant de pouvoir espérer battre ces formations de premier plan, les Alouettes devront d’abord et avant tout arrêter de se battre eux-mêmes. On a eu droit à tout hier dans une comédie d’erreurs. Les Montréalais ont laissé beaucoup de points sur le terrain au lieu de les inscrire au tableau. Il y a tout d’abord eu les trois placements ratés de Boris Bede et la mauvaise gestion du cadran en fin de première demie qui a privé l’équipe d’au minimum trois autres points. Avant cette séquence, Chris Harper avait eu la chance d’inscrire un touché sur une longue passe de Vernon Adams fils, mais il n’a pas été en mesure de réaliser l’attrapé. Je sais que ce n’était pas un jeu facile. Du haut de la galerie de presse, c’est facile à juger. D'ailleurs vous comprendrez que je n’ai jamais occupé cette position et qu’Harper a donc une meilleure connaissance de la situation, mais tout de même... Il semble qu’il aurait pu poursuivre sa course au lieu de plonger pour tenter de saisir le ballon. Le résultat demeure que les Alouettes ont échappé sept points sur cette séquence et si on additionne le tout, la rencontre aurait été bien plus serrée.

Je veux revenir sur la mauvaise gestion du cadran en fin de demie. Cette situation ne devait pas se produire, alors que les Alouettes avaient leur temps d’arrêt. Adams aurait dû être conscient de la situation et savoir qu’il devait se débarrasser du ballon rapidement. Les entraîneurs auraient aussi pu opter pour les trois points tout de suite au lieu de tenter un autre jeu. Il y avait plusieurs options, mais au final ils n’ont pas profité d’une réelle chance de revenir dans le match.

À cet instant, la marque était de 27 à 13 pour les Eskimos. Imaginez si les Alouettes avaient inscrit des points sur la dernière séquence de la demie, sachant que l’attaque commençait le troisième quart avec le ballon. Il n’y a pas de meilleure situation au football. En deux possessions, le match aurait pu être complètement différent. Finalement, on résume le tout avec un cafouillage et sur cette première séquence au troisième quart, Bede a raté un placement. C’était un point tournant dans le match et ils sont passés à côté.

Cette bévue s’inscrit dans la tendance des quatre défaites des Montréalais : ils se sont fait sortir du match au deuxième quart. Les Eskimos ont remporté cette tranche du match par la marque de 24 à 6, Calgary avait gagné le deuxième quart 10 à 0, le Rouge et Noir avait eu le meilleur 16-0 et Winnipeg a inscrit 24 points contre 7. Au cours de ces quatre matchs, les Alouettes ont donc perdu le deuxième quart par une marque cumulée de 74 à 13. Ils sont donc tout le temps obligés de faire du football de rattrapage en deuxième demie, mais je le répète, ils ne sont pas outillés en attaque pour pratiquer ce style de football.

C’est à se demander à quel niveau est le problème. Une hypothèse serait que les Alouettes perdent la bataille des ajustements. Ils arrivent pour le match à toute fin pratique bien préparés, car ils tiennent le coup au premier quart. Plus le match progresse, plus il faut apporter des ajustements et c’est à ce moment qu’on voit les Alouettes commencer à avoir des ennuis. C’est une mauvaise tendance et ils vont devoir y remédier au plus tôt.

Des preuves à l'appui

Afin de vous illustrer concrètement ce que j’entends lorsque je dis que les Alouettes se tirent dans le pied, je me suis fait une liste de certains jeux au cours du dernier match. Contre les Eskimos, il y a eu un total de 156 jeux, ce qui inclut l’attaque, la défense et les unités spéciales. De ces jeux numérotés dans l’ordre où ils sont survenus au cours de l'affrontement, j’en ai retenu une douzaine que je vous présente.

No 18 : pénalité d’obstruction à Mitchell White qui offre un gain de 51 verges aux Eskimos. Ces derniers en profiteront pour inscrire trois points.

No 28 : botté de placement raté par Boris Bede.

No 39 : autre pénalité à Mitchell White pour conduite antisportive. Non seulement les Eskimos vont poursuivre leur séquence, mais ils vont ultimement inscrire un touché.

No 48 : Vernon Adams fils est victime d’une interception.

No 50 : à la suite de cette interception, il y a rudesse contre Mike Reilly alors que c’était premier essai et 20 verges à parcourir. Encore une fois, Edmonton inscrira un touché.

No 69 : passe échappée de Chris Harper pour le touché.

No 85 : en toute fin de demie, les Alouettes ont un premier essai à la porte des buts à la ligne de 10. Adams est victime d’un sac du quart et l’attaque recule de 15 verges.

No 86 : on perd la notion du temps alors qu’Adams court pour éviter la pression et il lance sa passe. Le problème c’est qu’il n’y a plus de temps au cadran et les Alouettes ratent une belle occasion d’inscrire des points.

No 91 : autre placement raté de Bede.

No 100 : troisième placement raté du match.

No 124 : pénalité d’obstruction à Chip Cox qui offre 22 verges aux Eskimos et comme la pénalité a eu lieu dans la zone des buts, le ballon est placé à la ligne de 1 des Alouettes. Vous devinerez que le touché ne sera qu’une formalité.

No 142 : pénalité contre Chip Cox qui annule une interception de Dominique Ellis. Les Alouettes n’avaient pas provoqué de revirement jusque-là, mais tout a été annulé en raison d’une pénalité. L’attaque des Eskimos a produit une séquence de 13 jeux et 73 verges en six minutes et 31 secondes pour ajouter trois autres points.

Lorsque je vous dis qu’ils ont développé l’art de se battre eux-mêmes, cette liste illustre mon point de vue.

Un peu d'aide pour Adams

Outre les bévues, la brigade défensive des Alouettes n’a pas été capable de déranger Mike Reilly, d’appliquer une pression constante avec plusieurs sacs du quart et de provoquer des revirements. La défense doit générer quelque chose afin de produire une étincelle pour aider l’attaque. Elle ne l’a pas fait, mais celle des Eskimos y est parvenue.

On l’a bien vu avec l’interception de Vernon Adams fils. À ce moment, le match était de 10 à 10 et cette interception a lancé les Eskimos, car ils ont inscrit 17 points contre trois. C’est ce que la défense des Alouettes doit réussir. Au lieu de ça, elle s’est fait tailler en petits morceaux par Reilly qui a connu tout un match. Il a fait de bonnes passes, mais il a aussi compté sur ses receveurs pour réaliser de gros attrapés. Encore une fois, ceux des Alouettes n’ont pas été capables de faire le même boulot pour leur quart. C’était loin d’être leur meilleur match. Je suis d’accord que certaines passes étaient difficiles à saisir, mais c’est du football professionnel. Ils ne sont pas payés pour attraper les ballons faciles dans les numéros. À ce niveau de jeu, ils doivent réaliser des attrapés contestés et difficiles.

Preuve que ce n’était pas une grande soirée de ce côté dans le camp montréalais, le meilleur receveur aura été Tyrell Sutton avec quatre attrapés pour 82 verges. S’il y en a bien un qui n’a pas grand-chose à se reprocher dans ce match, c’est bien le porteur de ballon. Il a encore répondu présent comme il le fait toujours.

Les receveurs ont laissé tomber beaucoup de ballons et par le fait même leur quart-arrière.

En ce qui concerne Vernon Adams, j’ai apprécié son effort. C’est vrai que par moments, il avait l’air de courir comme une poule pas de tête alors que la pression semblait arriver trop vite pour lui et il se devait alors d’improviser. La faute revenait en effet à la ligne à l’attaque sur certains jeux et d’autres fois, c’est lui qui conservait le ballon trop longtemps. Je ne remettrai cependant jamais en doute son désir de bien faire. Il a tout donné sur le terrain afin de se sortir de certaines situations. J’ai beaucoup apprécié.

En raison de cet effort, j’ai trouvé dommage les huées alors qu’il revenait sur le terrain en fin de match. Je comprends que ce n’était pas dirigé directement à l’endroit d’Adams alors que les gens espéraient voir Johnny Manziel. Je pense que les cibles étaient davantage les entraîneurs dans le cas présent, mais c’était dommage qu’Adams fasse partie de ça. Il s’est démené et au final, les Alouettes ont inscrit 23 points, soit leur plus haut total cette saison avec la victoire de 23-17 en Saskatchewan. On ajoute à ça les points laissés sur le terrain et on peut encore augmenter ce chiffre.

Adams n’a donc pas eu l’appui de ses receveurs et la ligne à l’attaque a concédé six sacs du quart. Même si cette statistique n’est pas directement liée à la ligne, c’est un bon indicateur. J’ai trouvé que les joueurs de ligne semblaient surpris par certaines pressions appliquées par les Eskimos. Malgré tout, je regarde la composition de cette ligne et je crois que sur papier, elle pourra connaître du succès.

Philip Blake était de retour au jeu et Tony Washington disputait un premier match après seulement deux entraînements. Il faut donc qu’ils travaillent ensemble pour développer une cohésion. Je pense que c’était la meilleure ligne à l’attaque que nous avons vue cette saison et elle a du potentiel.

Les Alouettes disposent donc de trois jours de congé avant d’entamer leur préparation en vue de leur match la semaine prochaine contre les Tiger-Cats de Hamilton. J’ai de la misère à croire que Manziel ne passera pas du temps au Stade olympique durant cette période pour peaufiner sa préparation. Ce n’est pas parce qu’ils ne vont pas sur le terrain qu’il ne se passera rien en réunion. Il n’y a pas une minute à perdre.

*Propos recueillis par Maxime Tousignant

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