NDLR : Cette chronique a été écrite avant l'annonce de l'arrivée de Johnny Manziel avec les Alouettes

Existe-il un nombre maximal de fois qu’une même recette peut se transposer pour les Alouettes? Tout semble indiquer que non!

Encore une fois, samedi à Calgary, l’attaque montréalaise a complètement déserté les lieux face aux Stampeders, ne montrant aucun dynanisme en plus de connaître un long passage à vide comme à l’accoutumée.

Après les 18 premières minutes du match, c’était 15-1 en faveur des Stamps. C’est tout ce que ça a pris aux Alouettes pour se faire sortir du match, avec le manque d’offensive qu’on leur connaît.

Encore une fois, l’équipe de Mike Sherman s’est montrée compétitive par moments. Après tout, les Oiseaux ont quand même remporté la deuxième demie par le score de 7-6; petite victoire morale s’il en est une, bien qu’il faut admettre que les Stamps n’ont pas ouvert la machine durant les 30 dernières minutes, choisissant plutôt de protéger leur avance. Bref, il y a eu des étincelles, mais le feu ne prend pas, et les revirements – il y en a eu cinq samedi – continuent de couler les Als.

La défense continue d’être sur le terrain pendant de trop longues minutes (35 minutes face aux Stamps). Encore là, c’est un refrain auquel on est désormais habitués. Évidemment, ce n’est pas une recette gagnante tout ça.

On ne s’en cachera pas : tout le monde savait que la commande était énorme contre Calgary, la meilleure équipe du circuit en ce premier segment du calendrier. Ce n’est pas pour rien qu’elle affiche un dossier immaculé de cinq victoires et aucune défaite. On ne se faisait pas d’illusions.

Ce qui est frustrant cependant, c’est que les Montréalais revenaient d’une semaine de congé. Normalement, la préparation devrait être à son mieux et le groupe devrait arriver bien reposé. Et pourtant, c’est le début de rencontre qui a fait défaut. Certains prétendent que le synchronisme y est moins quand on revient de la pause. Mais entendons-nous que ça vient aussi avec plus de temps de récupération, de séances d’entraînement et de temps pour décortiquer les tendances de l’adversaire.

Les Stamps forment un exemple assez probant de l’utilité d’une semaine de congé. Ils ont en effet remporté leurs 17 matchs au retour de la pause depuis l’instauration de ce règlement. Les Alouettes, eux, perdaient un 10e match en 17 occasions à cet égard.

Mitchell impressionne même sur une jambe

Ce qu’il ne faut pas perdre de vue non plus, c’est que les Alouettes affrontaient un Bo Levi Mitchell dont la préparation était loin d’être optimale. Le quart vedette n’avait eu qu’un seul entraînement et sa mobilité était assurément affectée par la blessure au genou qu’il avait subie la semaine précédente. Il s’est arrangé pour que ça ne paraisse pas trop : cinq passes complétées en cinq tentatives et un touché lors de la première séquence offensive. Il a fini par réussir ses 12 premières passes tentées et à mener son club à une possession de ballon de 12 minutes au premier quart, contre trois pour Montréal.

C’est bien simple : au premier quart, les Stamps ont engrangé plus de premiers essais (huit) que les Als n’ont tenté de jeux offensifs. Ça décrit assez bien le passage à vide des Als dont je parlais en début de chronique! Le manque de constance a encore fait défaut.

Alouettes 8 - Stampeders 25

D’un autre côté, force est de reconnaître que Calgary forme toute une machine de football. Stabilité et continuité sont les mots d’ordre de cette organisation.

Mitchell est tout un général. Déjà, il ne court pas souvent, et très vite dans le match on a pu constater que son intention était de demeurer dans la pochette et qu’il n’était pas prêt à courir étant donné l’état de son genou. Qu’a-t-il fait en revanche? Il a montré qu’il est à un autre niveau en décochant de courtes passes. Il a attaqué les flancs, laissé partir ses passes rapidement et attaqué les lignes de côté. Les longs tracés étaient plutôt rares.

J’ai été assez ahuri de voir à quel point même sur les petites passes, les receveurs des Stampeders étaient démarqués. Il y avait beaucoup d’espace, et même sur des jeux oscillant autour de cinq verges, il arrivait qu’aucun Alouette n’était dans les parages. C’était rythmé, et ce plan de match a été très efficace.

Pour les Alouettes, la ligne défensive a beau gagner son duel contre son rival de la ligne offensive, il n’aura jamais le temps de se rendre au quart. Ça tombe donc entre les mains de la tertiaire, qui en bavé un coup. Les couvertures étaient loin d’être serrées, surtout en première moitié de match. Le premier majeur, inscrit par Eric Rogers sur une passe dans le flanc, illustre très bien ce fait. Il a pu entrer dans la zone des buts sans même passer près de se faire toucher.

Je me questionne à savoir quel était l’état d’esprit des joueurs à la mi-temps, alors que le pointage était de 19-1. On a ici un club qui marque en moyenne 15 points par rencontre en ce début d’année. De l’autre, une formation invaincue qui n’alloue que 9,5 points. Il y avait certainement lieu d’être découragé.

J’ai parlé de ma déception vis-à-vis le travail de la tertiaire et le manque de pression exercé (difficile quand le ballon quitte la main du quart en moins de deux secondes). Par contre, il faut saluer le travail effectué par le front défensif face au jeu de course des Stamps, qui n’a totalisé que 69 verges sur 24 portées pour une moyenne de 2,9 verges. Ce sont de bons chiffres contre une équipe qui prend fierté envers son attaque au sol.

Il faudra être patient envers Shiltz

Le match de samedi a marqué l’entrée en scène du jeune Matthew Shiltz, venu en relève à Drew Willy lorsque celui-ci s’est blessé. J’avais hâte de le voir à l’œuvre. Lorsqu’un jeune quart fait ses débuts, on est impatient de voir comment il va se débrouiller, d’autant plus que plusieurs se disent prêts à passer à un autre appel relativement à l’« expérience Willy ».

Les circonstances ont fait qu’il a été projeté dans le match sans préavis, et on l’a vu « hyperventiler » quelque peu ici et là! On voyait qu’il voulait bien faire, qu’il voulait apporter de l’énergie à son attaque et c’est ce que j’ai apprécié, personnellement. Il a voulu immédiatement prouver qu’il était capable d’avoir de l’initiative et de prendre des décisions rapides. De ce côté, le jeune homme a amené une dose d’énergie dont tout ce beau monde avait bien besoin. Sa mobilité a aussi été mise à l’avant-plan, chose que Drew Willy n’apporte évidemment pas.

Du bon et du moins bon pour les Alouettes

C’était à prévoir, mais il y a eu du bon et du mauvais pour Shiltz.

Comment passer sous silence la passe télégraphiée qu’il a lancée dans la zone des buts lorsqu’il a été victime d’une interception en fin de première demie? Je ne sais pas ce qu’il avait vu comme ouverture avant la remise du ballon, mais une fois qu’il l’avait entre les mains, c’était une mauvaise décision que de s’entêter à le lancer dans cette direction. C’est le genre de gaffe qu’il faut placer sous la colonne « Erreurs d’apprentissage ». Que ce soit une recrue ou un vétéran, il faut absolument que le quart se rappelle de l’importance de protéger le ballon.

Néanmoins, j’ai vu un jeune quart mobile et résilient. Il s’est relevé et est demeuré combatif même après avoir commis des bourdes. Sa dynamique-là est appréciable, mais il y a encore énormément de correctifs à apporter pour l’Américain de 25 ans.

Willy, comme on l’a déjà établi, n’est pas un quart mobile. Ça s’est vu sur la séquence qui a mené à sa blessure lorsque sa main a donné contre le casque de son coéquipier Kristian Matte au moment de décocher une passe. Matte s’est fait repousser à la ligne d’engagement, et la profondeur de la pochette n’était pas suffisante pour un quart comme Willy. Malheureusement, Matte était pratiquement embarqué sur son quart.

Shiltz, lui, court beaucoup plus, et ça pourrait mener à du jeu plus diversifié.

Ses meilleurs moments se sont certainement produits en début de troisième quart. Cette première séquence de huit jeux, 79 verges un touché était belle à voir. Il y avait du jeu au sol, de la passe et plusieurs receveurs sollicités. Bref, un bel équilibre et une belle exécution.

Mais tu dois être capable de reproduire ça plus d’une fois dans un match. Et à partir de ce moment, la défense des Stamps a démontré qu’elle n’entendait pas à rire. C’est comme si elle avait été piquée au vif de voir la recrue parcourir le terrain méthodiquement et mener son club à un majeur. « Tu as eu ton moment de gloire? Maintenant, attèle-toi! »

Voici dans l’ordre le résultat des séries offensives des Als suivant immédiatement ce touché : interception, revirement sur troisième essai, revirement sur troisième essai, dégagement après deux jeux, dégagement après deux jeux, dégagement après deux jeux et revirement sur troisième essai. Lorsqu’on parle de domination complète d’une défense, c’est dur de trouver mieux!

Trois jeux qui ont anéanti les chances des Als

On parle souvent de jeux qui sont symptomatiques des ennuis récurrents des Alouettes. Il y en a eu encore samedi à Calgary. Je parle ici de bêtes erreurs qui empêcheront les Montréalais de gagner tant qu’elles se répèteront d’un match à l’autre.

J’ai déjà souligné la mauvaise passe de Shiltz dans la zone des buts des Stamps, quelques instants après que Sherman ait eu raison de contester une décision des arbitres relativement à une situation d’obstruction envers un receveur des Als.

Que dire des fameuses situations de courts troisièmes essais? Celui qui s’est produit profondément en territoire montréalais a fait très mal. Avec un peu plus d’une verge à franchir à partir de ligne de 19, on a décidé d’ignorer la faufilade du quart, mais plutôt d’opter pour la formation parapluie (« shotgun »). Ça demande en réalité de récolter entre cinq et six verges, puisque le ballon est remis plus loin dans le champ-arrière.

Ce n’est pas un automatisme et tu affrontes la meilleure unité défensive du circuit. Nul besoin que c’était un choix audacieux, et que l’option de dégager aurait été sage, sachant que les Montréalais avaient le vent dans le dos.

C’est le jeu d’option qui a été l’alternative privilégiée. Résultat? Un sac du quart qui a mené à une perte de six verges. Et comble de malheur, c’est sur ce jeu que le nouveau venu Tyler Johnstone est tombé au combat en bloquant. On ne connaît pas la sévérité de sa blessure, mais je trouve néanmoins que ça encapsule bien la saison des Alouettes jusqu’à maintenant.

C’est facile de critiquer le jeu après les faits, mais de remettre le ballon à Tyrell Sutton aurait été un choix plus avisé.

Plus tard dans le match, un échange raté entre le centre Luc Brodeur-Jourdain, entré en relève, et Shiltz a mené à un autre revirement sur un troisième essai. Au football, il n’y a rien de plus fondamental du côté offensif que la remise. Tous les jeux commencent ainsi. Et on a trouvé le moyen de le rater sur un jeu qui revêtait une importance considérable.

Tant que des situations semblables aux trois jeux énoncés viendront ralentir les Alouettes, les victoires seront difficiles à obtenir. C’est toute une mission de compenser pour des jeux comme ceux-là.

À travers tout ça, je dois respecter l’effort déployé par le collectif dans ce match. Cette équipe s’est battue jusqu’à la fin samedi, et ça démontre une certaine forme de caractère. Toutes les excuses pour baisser les bras y étaient et ce n’est pas ce qu’on a vu.

 Reste que lorsque tu perds la première demie de manière aussi nette, de revenir en force en deuxième ne change pas grand-chose dans l’équation.

Le calendrier n’est pas trop tendre envers les Alouettes pour la suite des choses. La LCF ne leur a pas fait une faveur, puisqu’ils joueront de nouveau dès jeudi, en accueillant les Eskimos d’Edmonton.

C’était une semaine courte pour les hommes de Sherman, et parallèlement à cela, les Eskimos reviendront pour leur part d’une semaine de congé. Il y a fort à parier qu’un troisième quart-arrière partant (Shiltz) sera envoyé dans la mêlée pour l’occasion. Pas l’idéal côté stabilité!

Un élément d’espoir auquel s’accrocher à l’approche de ce duel? La défense des Eskimos n’est pas du tout au niveau de celle des Stampeders. Sa moyenne de points alloués après cinq parties n’est pas particulièrement bonne, à 24 points par rencontre.

À l’attaque des Alouettes de démontrer qu’elle peut en profiter.

* propos recueillis par Maxime Desroches