MONTRÉAL – Frustration et incompréhension. Johnny Manziel entend demeurer un bon coéquipier, mais il est envahi par ces deux sentiments alors qu’il s’explique mal le fait de ne pas avoir repris son poste de quart-arrière partant une fois qu’il était rétabli de sa commotion cérébrale.

 

La journée semblait se dérouler à merveille lors du dernier entraînement des Alouettes de Montréal avant leur duel de vendredi soir (dès 19h à RDS) contre les Lions de la Colombie-Britannique. Le soleil rayonnait dans un ciel d’un bleu immaculé. C’était jusqu’au moment où Manziel est venu s’adresser aux médias.

 

Enfin de retour après une absence de trois jours en raison de maux d’estomac, Manziel a senti qu’il devait exprimer le fond de sa pensée. Peu importe le nuage que ça peut provoquer au-dessus de l’organisation, Manziel a parlé avec franchise et on doit respecter cette honnêteté.

 

« Si le club croyait en moi, je serais le partant »

« C’est difficile pour moi d’être de retour et de ne pas jouer. Je me rappelle que Coach Sherman avait dit quand je suis arrivé ici : ‘Il faut que ça fonctionne et ça va fonctionner’. Je me sens un peu frustré présentement parce que je reviens d’une blessure et je n’obtiens pas la chance de jouer. Ensuite, je suis malade et je dois manquer quelques jours. J’ai l’impression de m’être causé un retard », a d’abord exprimé Manziel qui était en verve malgré son état de santé encore chancelant.

 

« J’ai de la misère à cerner mon rôle, je ne suis pas un gars bâti pour les courts gains en troisième essai et je n’ai pas vraiment de rôle dans le plan de match. C’est difficile de demeurer impliqué », a-t-il poursuivi.

 

Même si Antonio Pipkin n’a disputé que trois matchs, Manziel sent clairement que le temps presse.

 

« J’espère que cette organisation et les gens d’ici n’ont pas perdu espoir en mes capacités de jouer. Je souhaite obtenir une autre chance de revenir avec les partants et de jouer. C’est pour ça que je suis venu ici et c’est ce que je veux faire », a précisé le quart de 25 ans.

 

On a relancé Manziel à ce sujet puisque c’est intrigant de découvrir que de telles pensées le tracassent déjà.

 

« C’est juste la réalité de la situation présentement. Si le club avait confiance en moi, je crois que je serais leur homme, que j’aurais été leur quart partant quand je suis revenu de ma commotion cérébrale, mais ça ne s’est pas produit. J’ai besoin de ces répétitions pour laisser le moins de doutes possibles sur ce que je peux accomplir. Je pense que ça va venir avec du temps. Je dois me relever de cet obstacle sur mon chemin et revenir au niveau auquel je suis capable. Je n’ai aucun doute en mes habiletés. J’ai encore toute la confiance », a-t-il réagi.

 

Très impliqué dans toutes les facettes de sa carrière, Manziel ne comprend pas comment il a abouti aussi vite sur les lignes de côté.

 

« J’ai l’impression qu’ils ont pratiquement échangé la moitié de l’équipe pour acquérir mes services. J’aurais pensé que j’aurais encore la chance de jouer et c’est là que j’ai un peu de misère à comprendre. J’avais le sentiment qu’on avait été me chercher pour que je sois une partie importante de cette équipe. Après mon premier match qui n’avait pas été très bon, on avait bâti sur mes débuts, mais on ne m’a pas fait jouer depuis que je suis revenu de la commotion cérébrale.

 

« C’est frustrant, c’est clair. Parce que je sentais qu’il avait beaucoup d’espoirs fondés en moi pour que je devienne l’homme de confiance. Finalement, tout a changé si rapidement et c’est difficile », a décrit le numéro 2.

 

Bien sûr, la réalité du sport professionnel n’a pas de pitié. Un athlète doit d’abord et avant tout être assez en santé pour jouer. Quand il ne l’est pas, il peut perdre son poste à chaque partie.

 

« Oui, mais j’étais en mesure de jouer lors des deux dernières parties », a réagi vivement Manziel pour répondre à cet énoncé.

 

Un confrère a ensuite rappelé à Manziel que les Alouettes ont perdu énormément de matchs au cours des dernières années et que ça pourrait expliquer leur raisonnement de demeurer fidèle au quart-arrière qui obtient des victoires.

 

« Ce n’est pas à moi de trancher, je dois suivre la décision qui est prise. Mais, de mon point de vue, c’est difficile de patienter et de regarder la situation comparativement à mon arrivée et maintenant », a-t-il noté.

 

« Je trouve que j’ai accompli ce que je devais faire au sein de l’équipe peu importe mon état de santé. Je m’attendais à reprendre ma place à mon retour et être l’homme de confiance. Je vais continuer d’être le meilleur coéquipier que je peux, être la meilleure personne peu importe qui joue », a conclu Manziel avant de retraiter au vestiaire.

 

Les hommes de Mike Sherman sont à égalité avec les Argos au dernier rang dans l’Est avec une fiche de 3-8 cette saison. Les Alouettes ont toujours des chances mathématiques de participer aux éliminatoires, mais ont peu de marge de manœuvre.

 

Kavis Reed tempère la situation

 

Encore présent aux abords du terrain pour évaluer des prétendants, le directeur général Kavis Reed a répondu aux questions à propos des commentaires de Manziel.

« Les athlètes professionnels seront frustrés de ne pas être les partants, mais Johnny comprend la situation. Il ne s’est passé une journée sans que Coach Sherman ou moi discutions avec lui. On fait la même chose avec Antonio. Quand la situation sera un peu plus facile, Johnny sera le premier à dire qu’il respecte notre organisation. Ça ne m’inquiète pas du tout.

 

« Je ne suis pas frustré qu’il ait manifesté son mécontentement. Ça peut sembler stupide, mais je suis content qu’il ne soit pas satisfait », a réagi Reed.

 

« On est très contents que Johnny ne soit pas à l’aise d’être un réserviste. Ça veut dire qu’il a la bonne mentalité et qu’il désire aider cette organisation à obtenir du succès. C’est ainsi qu’il doit se sentir. Tu dois vouloir être le partant quand tu es talentueux comme il l’est », a ajouté le DG des Oiseaux.

 

Dans une autre de ses réponses, Reed a confirmé que l’équipe doit s’accrocher à l’espoir présenté par Pipkin.

 

« Cette organisation a souffert longtemps pour trouver un quart-arrière partant. On a tenté notre chance avec sept quarts cette année. Quand on a transigé pour Johnny, on savait exactement ce qu’on obtenait, on connaissait les détails de son contrat et on était à l’aise de céder ce qu’on a donné. Notre but est d’accorder une chance à cette équipe d’obtenir du succès.

 

« Quand Johnny a été placé sous le protocole, Antonio a senti l’opportunité et il l’a très bien saisie. On veut voir où tout ça mènera », a-t-il raconté.

 

Le hic, c’est que Manziel pourrait vouloir quitter les Alouettes l’an prochain malgré l’autre année à son contrat. Le club montréalais aurait donc payé très cher en envoyant Chris Williams, Jamaal Westerman et leurs choix de première ronde en 2020 et 2021.

 

« Une de nos conversations portait sur le fait que sa manière de réagir face à l’adversité va lui permettre de maximiser son potentiel. C’est un défi qu’on veut traverser avec lui, je ne crois pas que ça va l’affecter à long terme. Johnny est un professionnel, il va comprendre », a prétendu Reed alors que deux nouvelles ligues de football risquent de s’intéresser aux services de Manziel.