MONTRÉAL – En 1976, Vince Papale a accompli le fantasme de tous les sportifs du dimanche. À 30 ans, il s’est taillé un poste avec les Eagles de Philadelphie à partir d’un essai accessible à tous. Quatorze ans après la sortie du film Invincible inspiré de son histoire, c’est au tour de son fils, Vinny, de vouloir confondre les sceptiques avec les Alouettes de Montréal. 

Précisons-le tout de suite, Vince Papale n’était pas un sportif du dimanche. Il avait excellé en athlétisme, mais il n’avait jamais joué au football au niveau universitaire. Ça rendait son exploit absolument fascinant surtout qu’il travaillé comme professeur et barman au moment de convaincre les Eagles avec lesquels il a joué de 1976 à 1978. 

Vinny Papale n’avait que huit ans quand le tournage de ce film d’envergure - mettant en vedette Mark Wahlberg - a pris son envol. Il ne le savait pas encore, mais l’histoire de son père allait devenir sa source d’inspiration. 

« À cet âge, je ne réalisais clairement pas la magnitude de ce qui se passait. Je ne savais même pas ce que mon père avait vraiment accompli dans la vie. Je savais qu’il avait joué au football, mais c’était à peu près tout. C’est plutôt quand je suis arrivé vers la fin de l’école secondaire que j’ai constaté à quel point c’était fascinant qu’il ait pu jouer dans la NFL sans avoir joué universitaire », a-t-il raconté au RDS.ca. 

« C’est de là que j’ai tiré ma mentalité de ne pas jamais abandonner. Mon père a vécu son lot d’obstacles avant de réussir. J’ai fini par comprendre que ça ne se déroule pas souvent comme tu l’avais imaginé dans la vie. Il s’est accroché à son rêve et c’est ce que je fais. Dans la dernière année, je me suis fait dire non l’équivalent d’un million de fois, mais il faut continuer de pousser et défoncer des portes pour y parvenir », a poursuivi l’athlète de six pieds un pouce et 205 livres. 

Le nouveau receveur des Alouettes exagère pour le bien de la figure de style, mais pas tant. Dès sa première année avec l’Université du Delaware, il a subi une blessure. La saison suivante, il s’est déchiré deux ligaments d’un genou. Pour sa troisième campagne avec les Blue Hens, il a dû tenter de convaincre un nouvel entraîneur de sa valeur. 

Il a fini par se faire justice en 2018 avec 36 attrapés pour 618 verges et 6 touchés. De nouveau blessé pour sa journée de tests devant les recruteurs de la NFL, il n’a pas été repêché. Son hernie sportive l’a embêté de nouveau pour ses participations aux mini-camps des Raiders et des Redskins en vue de la saison 2019. 

Ce n’est pas tout, il n’a pas été en mesure de convaincre la XFL de le repêcher. Et le comble, ses nouvelles auditions du printemps – dont trois devant des équipes de la LCF - ont été annulées en raison de la pandémie de la COVID-19. 

« C’était l’équivalent d’encaisser un coup de poing au ventre l’un après l’autre. J’ai eu l’impression qu’un énorme poids avait quitté mes épaules quand j’ai reçu cette offre des Alouettes », a admis Papale. 

Cette nouvelle chance tant attendue est arrivée via Tom Gamble, le directeur général adjoint du club montréalais. 

Vinny Papale« Je suis vraiment emballé par cette occasion particulièrement avec tout ce qui s’est passé de mon côté. Ce fut définitivement éprouvant pour moi. Je me suis retrouvé sans équipe durant l’automne et je n’ai jamais vécu ça depuis l’âge de cinq ans. C’était assurément difficile par moments, ça me rongeait surtout pendant la saison de football », a admis Papale qui espère relancer sa carrière. 

« On était en contact depuis un certain temps. Je lui ai envoyé des extraits de mes entraînements. Parce qu’à l’origine, j’étais supposé d’avoir un essai avec les Alouettes, mais le tout a été annulé en raison du coronavirus. Bref, c’était juste un autre obstacle qui s’ajoutait. Je suis demeuré en contact avec Tom, il m’a rappelé pour me dire qu’il avait constaté que je continuais de bûcher pour réussir et que l’équipe était prête à m’accorder cette chance. C’est encore plus satisfaisant après tous les efforts investis », a confié », a témoigné celui qui a étudié en finances. 

D’un côté, il aurait pu renoncer à son souhait le plus précieux. De l’autre, il pouvait s’y accrocher de toutes ses forces. 

« Je suis arrivé à un point que je voulais simplement jouer au football de nouveau et je me foutais bien de l’endroit. Je savais que j’allais continuer de m’entraîner jusqu’à cette prochaine occasion. Je suis vraiment content d’avoir persévéré. Je ne voulais surtout pas jeter l’éponge. Bien sûr, parfois, je finissais par me demander pourquoi je m’entraînais autant, je n’appartenais à aucune équipe. La récompense n’est que plus savoureuse à mes yeux, a noté Papale pour expliquer sa persévérance. 

Parmi les informations moins connues à propos de l’histoire de son père, il y a son passage avec le Bell de Philadephie dans la World Football League avant de se joindre aux Eagles. Ainsi, il serait tentant de dresser un parallèle avec cet arrêt dans la LCF qui pourrait propulser sa carrière vers la NFL. 

« Ouais, c’est possible. Chaque année, on voit des joueurs de la LCF accéder à la NFL et je l’ai remarqué depuis un certain temps. Par contre, je n’y pense pas présentement, je veux me concentrer sur cette nouvelle réalité. Je suis prêt à jouer plusieurs années dans la LCF, ce serait un grand privilège avec les embûches que je viens de traverser », a-t-il répondu. 

Quand on analyse froidement cet ajout à la formation des Alouettes, on se demande comment sa mission sera atteignable. Après tout, les Oiseaux misent sur de beaux atouts à la position de receveurs, mais ça lui reviendra de démontrer qu’il peut constituer une ressource productive et pas trop dispendieuse. 

« Il n’était pas question que je sois difficile, je voulais simplement une ouverture. Je n’avais pas encore regardé le portrait à la position de receveurs. J’ai obtenu ce que je voulais et je dois maintenant foncer pour gagner un poste », a déclaré celui qui peut également effectuer des retours de botté. 

Ce contexte le ramène inévitablement à l’exploit de son père. Ce serait illogique pour lui de s’avouer vaincu. 

« Je n’ai que 23 ans et j’ai de la misère à comprendre comment il a pu devenir une recrue dans la NFL à 30 ans, c’est assez fou quand même. »

À vrai dire, il prévoit se régaler du jeu présenté dans la LCF tout en sachant qu’il devra s’habituer à quelques nuances. 

« Je devrai probablement faire un peu plus de course pour être bien prêt au délai plus court entre les jeux. Ça va venir vite et je veux être encore plus en forme. Je sais aussi que le jeu aérien accapare beaucoup de place et c’est un rêve pour les receveurs. C’est encore plus vrai alors que je viens d’un programme universitaire qui ne tentait pas énormément de passes », a exposé Papale qui se décrit comme un grand travaillant.

En attendant, il devra s’armer de patience comme ses nouveaux coéquipiers. Ça lui permettra de raffiner ses connaissances en immobilier, un domaine qui le passionne grâce à sa mère, une ancienne gymnaste de haut niveau. Mais avant de s’y plonger à temps plein, il doit assouvir sa soif de football et il lorgne vers une carrière dans l’armée de la marine comme plan B.  

« Un peu comme le football professionnel, je vois ça comme une mission difficile à accomplir. Dans la vie, quand on me dit que je ne peux pas y arriver, j’ai encore plus le goût de réussir. J’ai toujours pensé que ce serait une avenue que j’allais choisir si les portes du football se refermaient », a conclu Papale qui sait que ce ne sont pas tous les scénarios qui se concluent par une fin hollywoodienne.