« Aujourd’hui, c’est une journée qu’on espérait qui n’arriverait jamais ». Mark Weightman, le président des Alouettes de Montréal, a résumé à la perfection la journée de la retraite d’Anthony Calvillo, le plus grand passeur de l’histoire du football professionnel qui est demeuré un modèle d’humilité jusqu’au dernier jour de sa carrière.

Les statistiques exceptionnelles du vétéran quart-arrière de 41 ans auraient pu retenir l’attention en cette journée spéciale, mais ce sont plutôt les qualités de l’homme et les émotions qui ont animé le moment. 

« Je le sais depuis la saison dernière »

Dès le premier pas dans la salle réservée pour tourner cette page inoubliable dans le parcours des Alouettes, on pouvait déceler l’importance de l’annonce. Les coéquipiers (actuels et anciens), les employés, les amis et les connaissances qui ont côtoyé cet athlète synonyme de persévérance et de rigueur au fil des ans se comptaient par dizaines.

De nature réservée et cérébrale, Calvillo n’a pu retenir ses émotions quand il a dû prononcer le mot retraite.

« Je suis si nerveux, je ne l’ai jamais été autant de toute ma vie ! Je croyais que ce serait beaucoup plus facile, mais j’aimerais annoncer ma retraite de ce si beau sport qu’est le football », a déclaré Calvillo avec la voix étranglée par les émotions.

Le visage des Alouettes ne s’imaginait sans doute pas qu’il allait laisser une empreinte honorable sur la Ligue canadienne de football quand il a fait ses débuts dans ce circuit en 1994 en s’entraînant dans un stationnement d’un casino de Las Vegas dans l’uniforme du Posse, la défunte équipe du Nevada.

Vingt saisons plus tard, grâce à ses 16 saisons avec les Alouettes, l’Américain a réécrit une grande partie du livre des records du circuit canadien sans jamais chercher à attirer les réflecteurs sur lui.

« Je suis vraiment fier que nous ayons participé à huit matchs de championnat pour remporter trois fois la coupe Grey. Je vais quitter la tête haute en raison de cela. Je n’ai jamais été très intéressé par les statistiques », a dévoilé Calvillo à propos de la plus grande source de fierté de sa carrière.

Avant d’y arriver, Calvillo a dû gagner ses « épaulettes » et il a tenu à remercier particulièrement Tracy Ham pour son rôle dans son développement à un point tournant de sa vie professionnelle.

« Quand je suis arrivé à Montréal, la chose la plus importante était d’abord de gagner la confiance de mes coéquipiers et j’ai pu apprendre cela du grand quart-arrière Tracy Ham. Il a été sensationnel avec moi et je veux le remercier de m’avoir appris à devenir un quart », a mentionné AC dans un autre instant d’émotion.

Il faut rappeler que Calvillo est débarqué à Montréal après trois saisons ordinaires avec les Tiger-Cats de Hamilton. Selon Jock Climie, qui était avec les Alouettes à son arrivée, la partie n’était pas gagnée pour Calvillo puisque les joueurs remettaient en doute son acquisition par Jim Popp.

« Dans le vestiaire, les joueurs se demandaient pourquoi Jim l’avait amené avec nous. On pensait même que sa carrière était finie, mais on a rapidement compris à quel point il était un professionnel et il a changé beaucoup de choses grâce à son dévouement au football », s’est rappelé Climie qui conserve un excellent français.

Devenu le quart partant des Alouettes en 2000, tout le potentiel de Calvillo a pu s’exprimer grâce à la contribution de deux entraîneurs marquants dans sa vie : Don Matthews et Marc Trestman.

Une retraite émotive pour Calvillo

Matthews lui a permis d’atteindre un niveau plus élevé menant, en 2002, les Alouettes à la première conquête de la coupe Grey depuis 1977.

« J’étais nerveux à ma première rencontre avec lui, mais il m’a annoncé qu’il allait changer le système offensif et qu’il allait le bâtir en fonction de mes atouts. Je serai toujours reconnaissant de ce genre de confiance de la part d’un entraîneur surtout qu’il a influencé le cours de ma carrière », a remercié Calvillo.

Ce retour sur le triomphe de 2002 lui a donné l’occasion de remercier, avec une profonde sincérité et quelques mots de français, les nombreux fidèles des Alouettes.

« Les amateurs ont été merveilleux et s’ils ont vécu de beaux moments avec les Alouettes, je veux leur dire que j’ai aussi vécu de belles choses grâce à eux. Je n’oublierai jamais le premier défilé, celui de 2002, qui était si spectaculaire », a soulevé l’athlète originaire de Californie.

Les rôles majeurs de Trestman, Jim Popp et Robert Wetenhall

En 2008, un autre point tournant est survenu pour Calvillo quand Trestman a accepté de traverser la frontière pour devenir entraîneur-chef au niveau professionnel pour une première fois. La suite est connue alors que les Alouettes ont atteint la finale dès la première saison avant de soulever le précieux trophée lors des deux saisons suivantes.

Par l’entremise d’une vidéo, l’entraîneur des Bears de Chicago a surtout insisté sur les valeurs humaines de Calvillo en plus de répéter qu’il n’aurait jamais obtenu sa chance comme entraîneur-chef dans la NFL sans son association avec lui.

« Il a amené une nouvelle dimension pas seulement à mon jeu, mais à toute l’organisation avec plusieurs petites actions spéciales. Nous avons tous embarqué dans son approche », a remercié Calvillo qui a évolué sous neuf entraîneurs à Montréal et plus d’une douzaine de coordonnateurs offensifs.

À l’origine de ce coup de génie par les Alouettes se trouve le directeur général Jim Popp qui a perçu son potentiel qui était freiné par un entourage moins talentueux. Anthony Calvillo et Robert Wetenhall

« Jim, tu es la raison pour laquelle nous avons connu autant de succès à Montréal. Merci également de m’avoir donné une vraie chance quand peu de gens croyaient en moi », a-t-il noté en enchaînant avec un hommage au propriétaire Robert Wetenhall qui est devenu un ami proche au fil des ans. Il n’a pas oublié tous les autres employés de l’organisation dont les médecins, les thérapeutes et les responsables de l'équipement.

Calvillo a également été très émotif quand il s’est adressé à tous ses coéquipiers avec lesquels il a partagé de nombreux souvenirs qu’il ne peut pas tous partager. Signe de leur camaraderie, ses coéquipiers qui étaient présents n’ont pu s’empêcher de le taquiner gentiment quand il a annoncé qu’il allait compléter ses études.

Le dernier revirement majeur dans la vie de Calvillo s’est produit à l’extérieur du terrain quand sa femme Alexia a été atteinte d’un cancer. Cette bataille a rendu Calvillo encore plus ouvert sur les autres et il a réservé ses derniers mots à sa complice et ses deux filles.

« Je sais que je vous rends folles depuis que je suis toujours à la maison, mais ce sera ainsi pour un petit bout », a raconté, avec humour, celui qui remplira des missions d’ambassadeur pour les Alouettes en 2014.

Vers une carrière d’entraîneur à … Montréal

Sa présence accrue à la maison ne s’éternisera pas puisqu’il a l’intention d’entamer une nouvelle carrière d’entraîneur à moyen terme. Fidèle à personnalité, il considère qu’il a encore plusieurs choses à apprendre avant d’enfiler ce nouveau chapeau et il veut aussi s’accorder au moins une année loin des terrains.

Il aurait pu être tenté par une aventure dans ce sens à Chicago, sous l’aile de Trestman, mais il semble convaincu qu'il demeurera à Montréal, sa nouvelle maison.

« Je veux me diriger vers cette avenue parce que ça me passionne et j’aimerais commencer en 2015. Mais je veux être entraîneur dans cette ville et pour les Alouettes », a-t-il lancé avec conviction.

La note finale d’une carrière aussi prolifique aurait sans doute été un dernier championnat, mais une commotion cérébrale l’aura empêché de tenter sa chance. Calvillo, qui a recouvré la santé, a tout de même indiqué qu’il croyait se diriger vers la retraite même s’il n’avait pas été blessé en 2013.
 

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