MONTRÉAL – Luc Brodeur-Jourdain l’avait vu venir, mais ça n’a pas saboté son professionnalisme. À l’approche de ce qui devrait être sa 10e saison avec les Alouettes de Montréal, il a été relégué sur la deuxième unité de la ligne offensive.

 

Le vétéran de 35 ans aurait pu être d’une humeur massacrante au terme du lancement de ce camp d’entraînement sous les commandes de Mike Sherman. Réfléchi et dévoué à la cause, il a plutôt choisi de garder la tête haute.

 

« Je vais être honnête, je m’y attendais. Je voyais avec l’échange de Ryan Bomben qu’on se retrouve avec trois joueurs canadiens qui ont un très bon potentiel. Ils sont dans la fleur de l’âge, au sommet de leur forme et ils ont été épargnés majoritairement par les blessures majeures. Ce sont des joueurs qui sont en pleine possession de leurs moyens, c’est ce que tu cherches à avoir sur le terrain », a reconnu Brodeur-Jourdain avec lucidité.

 

Ça bouge déjà chez les Alouettes

Le Québécois parlait ici de Kristian Matte (32 ans) qui l’a remplacé au poste de centre sur l’unité de partante, de Bomben (31 ans) et de Philip Blake (32 ans) qui a été employé comme bloqueur à droite dimanche. Le garde à droite était Sean Jamieson (23 ans) tandis que Xavier Fulton était l’unique Américain du lot en tant que bloqueur à gauche.

 

La nouvelle redoutée a été confirmée samedi à Brodeur-Jourdain, qui a encaissé le tout avec son réalisme habituel au lieu de le teinter d’une couche d’orgueil.

 

« J’ai toujours cru que je devais mériter ma place. Étant un joueur de 35 ans magané, d’avoir une opportunité au camp d’entraînement cette année, de pouvoir démontrer ce que je peux faire, d’aller chercher du temps de jeu de quelque façon que ça va être. Je pense que j’ai encore une fougue et un dynamisme... », a exprimé l’homme qui n’est pas du style à accepter un non sur un terrain de football.  

 

« J’ai le syndrome de la tortue, si tu n’arrêtes pas de courir, tu finis par arriver premier quand même », a ajouté Brodeur-Jourdain qui conserve donc son esprit de compétiteur.

 

On ne lui en demandait pas autant, mais le numéro 58 a même trouvé des éléments positifs à évoluer sur l’unité de réservistes.

 

Des partisans de Luc Brodeur-Jourdain« De jouer avec des jeunes qui apprennent la game, ça implique beaucoup de communication. Ça change le portrait des années antérieures. Leur donner des conseils, embarquer dans le mode de partager mes apprentissages de carrière, je trouvais ça le fun », a soutenu l’un des favoris du public comme on a encore pu le constater avec les nombreux chandails à son effigie pour l’ouverture du camp.

 

La déduction était facile après cela, Brodeur-Jourdain se dit prêt à accepter un rôle plus effacé.

 

« Je suis ouvert à vraiment tout, j’ai toujours été, dans mon esprit, un joueur qui aidait l’équipe à gagner », a précisé le tout dernier choix au repêchage de 2008.

 

Difficile de dire si la pilule est plus facile à avaler, mais Brodeur-Jourdain se retrouve, pour l’instant, à céder son poste à Matte, qui est un ami. Ce dernier a été invité à parler de cette nouvelle dynamique plutôt particulière. Par le passé, Matte était celui qui avait été formé pour quitter son poste de garde et remplacer Brodeur-Jourdain si celui-ci était blessé.

 

« On est des professionnels, si je me fais demander de jouer centre, je vais le faire. C’est la même chose pour lui s’il doit jouer garde. On est des joueurs d’équipe, on veut juste gagner, on va faire ce qu’on nous demande. C’est ma neuvième saison et j’ai toujours connu Luc comme le centre. Le camp d’entraînement n’est pas fini. C’est un gars qui m’a beaucoup appris aussi. Il est là pour m’aider ou pour être le centre », a témoigné Matte qui a occupé ce poste lorsque Brodeur-Jourdain se remettait d’une déchirure ligamentaire à un genou.

 

Luc Brodeur-Jourdain (58)Un DG prêt à le garder comme réserviste

 

La plupart du temps, les réservistes de la ligne offensive qui enfilent l’uniforme pendant les matchs peuvent évoluer à plusieurs positions. Malgré son passé de garde, Brodeur-Jourdain est reconnu avant tout comme un centre. Tout de même, le directeur général Kavis Reed a démontré une ouverture pour miser sur lui comme sixième ou septième joueur de ligne offensive si les plans ne changent pas d’ici le début de la saison régulière.

 

« C’est le camp d’entraînement, c’est une compétition. L’endroit où les gens sont placés au départ, ce n’est pas coulé dans le béton. On ne sait pas comment ça va finir, on ne sait pas ce qui arrivera. Cet homme a accompli un boulot formidable et il a été exceptionnel pour son implication dans la communauté. Il est à une étape de sa carrière à laquelle on doit regarder quelle est la meilleure option en tant qu’organisation. Mais il peut encore se battre pour gagner le poste », a souligné Reed.

 

Par la force des choses, la ligne offensive constituera un sujet intrigant pendant ce camp d’entraînement. Brodeur-Jourdain a profité de l’occasion pour louanger deux ressources à cette position.

 

Selon lui, Blake peut s’acquitter de la mission comme bloqueur à droite.

 

« Il a un très bon jeu de pieds et il est fort physiquement. Il n’a pas la grandeur qu’on voit normalement dans la LCF alors qu’on cherche plus autour de six pieds six ou même sept pouces. Mais, dans son cas, le meilleur parallèle que je peux faire, c’est Uzooma Okeke qui n’a pas connu une méchante carrière avec un gabarit plus petit. Phil, c’est un gars extrêmement puissant avec une mobilité de ballerine », a décrit LBJ en souriant.

 

Il a aussi apprécié la découverte de Trey Rutherford que les Alouettes ont sélectionné au deuxième rang du repêchage.  

 

« Il a très bien fait. Au point de vue physiologique, on dirait qu’il a déjà une maturité. Il est très impressionnant au niveau physique. C’est sûr que c’est un ajustement qui prend du temps. Au football universitaire américain, on t’enseigne à agripper le plus rapidement possible et ensuite bouger les pieds. Dans la LCF, tu dois bouger les pieds, te positionner et ensuite envoyer le fameux punch. Pour lui, c’est un ajustement, mais je vois déjà une très bonne éthique de travail et une bonne écoute. C’est un joueur qui est prêt à recevoir l’enseignement », a conclu Brodeur-Jourdain qui sera vraisemblablement en mesure d’aider comme partant ou comme réserviste.

Westerman sera un joueur clé