MONTRÉAL – Est-ce que Khari Jones parviendra à résoudre l’énigme de relancer l’attaque des Alouettes de Montréal après les échecs de Jacques Chapdelaine, Turk Schonert et Anthony Calvillo? Peu importe ses atouts de coordonnateur offensif, le mandat semble impossible sans l’ajout de joueurs dominants.

 

Il y a quelques semaines, Jones croyait en ses chances de devenir le nouvel entraîneur-chef de la formation montréalaise. Finalement, le directeur général lui a préféré Mike Sherman, mais il a hérité du prix de consolation pour diriger l’attaque de l’ancien patron des Packers de Green Bay. Buck Pierce, l’entraîneur des quarts des Blue Bombers de Winnipeg, aurait d’abord décliné l’offre.

 

Jones est devenu disponible sur le marché puisque les Lions (7-11) ont décidé de rompre leurs liens avec lui après quatre saisons à titre de coordonnateur offensif.

 

L’Américain de 46 ans, qui a fait son arrivée au Canada en 1997, a tout de même convaincu Sherman et le directeur général Kavis Reed de miser sur lui. Logiquement, Jones est excité à l’idée de fusionner sa vision du football canadien aux connaissances offensives de Sherman. Le hic, c’est que même le meilleur gourou offensif du football a besoin d’un quart-arrière efficace pour transposer son plan sur le terrain.

 

Pour l’instant, Jones doit se contenter de Darian Durant qui a connu une saison atroce en 2017, Drew Willy qui n’a pas su se démarquer à la place de Durant, Matthew Shiltz qui manque d’expérience et Antonio Pipkin qui n’a rien prouvé.

 

« Il faudra analyser la situation en profondeur et voir quel sera le plan. J’étais l’entraîneur des quarts en 2013 en Saskatchewan quand on a gagné le championnat avec Darian. Je suis au courant qu’il a eu une saison difficile, mais je sais ce qu’il peut réussir sur un terrain. Je connais également Drew et j’ai regardé Shiltz de près. On étudiera le dossier des athlètes qui peuvent être disponibles. Ce n’est pas trop à moi de trancher, mais je serai impliqué dans les discussions. Chose certaine, je veux que mes quarts puissent jouer au sommet de leur potentiel. Je vais m’assurer de soutirer le meilleur d’eux », a exprimé Jones dans une entrevue téléphonique.

 

En plus de ses expériences en Saskatchewan, comme entraîneur des quarts, et à Vancouver comme coordonnateur offensif, Jones a occupé ces deux mandats avec les Tiger-Cats à Hamilton. Sa carrière de joueur l’a mené chez les Lions, les Blue Bombers, les Stampeders, les Eskimos et les Tiger-Cats. Avec une telle feuille de route, il n’est pas effrayé par l’ampleur de la tâche montréalaise.  

 

« À peu près chaque fois que je suis embarqué dans un nouveau défi, ça ne regardait pas très bien sur papier au départ. Mais j’ai toujours abordé le tout en voulant améliorer les choses et je suis parvenu à le faire en tant que joueur et entraîneur », a-t-il maintenu.

 

Cette fois, Jones sera sous la supervision d’un entraîneur qui pense d’une manière différente. Sherman n’est pas débarqué à Montréal avec ses gros sabots, mais il veut utiliser certaines de ses recettes de la NFL dans la LCF. On pourrait donc assister à une attaque hybride.

 

« Je crois que ce sera une bonne combinaison des deux. Évidemment, il détient une grande expérience de la NFL et la NCAA tandis que je me fie sur mon parcours dans la LCF. Mais je sais déjà qu’il n’y aura pas de guerre d’égos quant à savoir qui a proposé le jeu qui a fonctionné. C’est certain qu’on va intégrer des éléments des deux circuits », a raconté Jones. Khari Jones

 

On peut présumer que l’ancien quart a été choisi également pour ses capacités à aiguiser le regard de Sherman sur les particularités de la LCF.

 

« C’est vrai que c’est particulier comme situation, mais j’ai été impressionné par son état d’esprit. Il sait qu’il plonge dans un type de football bien différent. Il veut apprendre les rudiments du football canadien. D’un autre côté, vous comprendrez que je suis bien prêt à apprendre de lui et voir comment on peut intégrer des éléments de ses connaissances ici », a noté Jones qui adorait regarder Brett Favre à l’action même si Joe Montana était son préféré.

 

Jones est persuadé que Sherman a choisi la meilleure approche en s’entourant de coordonnateurs issus du football canadien.  

 

« Oui, puisque ça m’a donné cet emploi », a-t-il lancé avec humour.

 

« Je crois que c’est un geste intelligent. C’est un jeu différent et j’irais même jusqu’à dire que je continue d’apprendre des choses sur ce football malgré mes 20 années au Canada. »

 

Cette blague au passage témoigne de la personnalité de Jones. Après des coordonnateurs offensifs plus cérébraux comme Chapdelaine et Calvillo, l’attaque des Alouettes sera entre les mains d’un entraîneur plus émotif.

 

« Je suis quelqu’un qui ne craint pas de sourire et d’être positif avec les joueurs. Je veux pousser pour eux sans que ça m’empêche d’être très exigeant avec eux parfois. Je souhaite avant tout être le meilleur enseignant parce que je sais que c’est difficile sur le terrain. Ça prend des gens pour te supporter et t’encadrer pour que ça fonctionne. Je n’ai pas peur de laisser ma personnalité transparaître. Je ne suis pas aussi sérieux que certaines personnes, vous allez voir mes émotions sur mon visage », a révélé Jones. 

 

Peut-il relancer Ernest Jackson et Chris Williams?

 

Malgré les changements effectués, les partisans des Alouettes conservent leur scepticisme et Jones le comprend très bien.

 

« Ça me semble évident qu’il y a eu trop de changements de direction dans les dernières années à Montréal. Ce n’est pas facile pour une organisation de traverser ça. J’espère qu’on pourra avoir une stabilité pour permettre aux joueurs de grandir avec nous. On veut que les partisans soient fiers de l’équipe. J’aime ce que Kavis est en train d’assembler, il prend son temps pour que ça dure à long terme », a prononcé Jones, le père de deux adolescentes qui viendront à Montréal durant l’été.

 

Khari JonesMais le débat revient à la même question : cette constance exige de bons joueurs. Prudent sur le dossier des quarts, Jones semble espérer du renfort chez les receveurs.  

 

« On peut toujours effectuer des progrès, on doit voir ce qui se passera au niveau des joueurs autonomes et des transactions. Mais j’ai déjà dirigé Ernest Jackson à Vancouver et il est l’un des meilleurs depuis quelques années. J’ai aussi été l’entraîneur de Chris Williams à Hamilton et Vancouver. Il revenait d’une blessure la saison passée et je ne pense pas qu’il était rétabli à 100%. Cette fois, il sera bien prêt », a déclaré Jones.

 

Le coordonnateur offensif prétend qu’il a retenu plusieurs leçons des mésaventures qui ont mené à son départ des Lions.

 

« Cette saison décevante (fiche de 7-11) a provoqué des changements, mais je suis content de me retrouver à Montréal. J’ai toujours aimé jouer et diriger contre les Alouettes. Je veux revivre ces années à Montréal », a commenté celui qui a été acteur à ses heures.

 

Jones s’amène également dans la métropole québécoise avec l’intention d’effacer un mauvais souvenir.  

 

« Mes filles ne sont jamais venues ici alors que la dernière visite de ma femme remonte à 2001 pour la dernière coupe Grey. On avait malheureusement perdu celle-ci. On va créer de meilleurs souvenirs dans les prochaines années », a conclu Jones.