Les négociations entre les Alouettes et leur quart Anthony Calvillo semblent difficiles. L'équipe pourrait devoir se trouver un nouvel homme de confiance si le numéro 13 mettait les voiles vers une autre ville. Je pense que les Alouettes se doivent de trouver les moyens de satisfaire leur joueur. Les deux parties devront mettre de l'eau dans leur vin.

Car dans la structure salariale dans la Ligue canadienne de football, il est impossible de payer un seul joueur 400 000 $. Calvillo, on le comprend, veut en obtenir le plus possible. Dans le jeu des négociations, les agents fixent toujours la barre très haute au début pour ensuite réduire les exigences.

J'aime beaucoup Anthony, avec lequel j'ai joué, mais il faut être réaliste, le plafond salarial dans la LCF est d'environ 2,2 millions par club. Dans ces circonstances, il est impossible de donner 400 000 $ à un seul joueur. Si Calvillo obtenait cette rémunération, que resterait-il pour payer les autres joueurs de l'équipe qui sont des éléments tout aussi importants. Comment les Alouettes pourraient faire pour se payer des joueurs de qualité si l'équipe accordait un montant aussi élevé à un seul homme.

L'approche doit être balancée. Puis il faut éviter de créer un précédent. On se souviendra que la LCF a souvent connu des ennuis financiers par le passé. L'équilibre financier est donc important.

Il y a déjà eu des joueurs qui ont touché des gros salaires par le passé mais le tout a toujours été nébuleux. En principe le plus haut salaire communiqué à la ligue est de 150 000 $ mais parfois il existe des arrangements secrets avec le propriétaire d'équipe, ce qui permet à certains joueurs de toucher une rémunération supplémentaire. Je pense notamment à des gars comme Damon Allen, Matt Dunigan et Doug Flutie. Quoique dans le cas de Flutie, la chose était pas mal publique. On parlait à l'époque d'un salaire d'environ un million de dollars par année.

J'ai joué avec Flutie et ce dernier a gagné deux fois la coupe Grey. C'est un type que j'aime bien mais je ne crois pas qu'il était bon pour la santé financière de la ligue, qu'il ait touché un salaire aussi élevé.

J'estime qu'un joueur comme Calvillo, qui deviendra agent libre le 16 février, doit se comparer à un quart comme Khari Jones des Blue Bombers de Winnipeg qui touche environ 250 000 $ par année. Jones a de plus remporté le titre de joueur par excellence dans la LCF alors que Calvillo était finaliste.

Si on fait le jeu des comparaisons, l'agent de Calvillo pourrait dire que le meilleur quart du circuit touche 250 000 $ et qu'il recherche une entente semblable.

Ce que je trouve dommage toutefois, c'est que les Alouettes semblent utiliser les médias pour faire pencher la balance de leur côté. Comme ancien joueur, je n'aime pas cette stratégie. Alors, je comprends les frustrations d'Anthony. Les médias aiment bien cela car ça leur donne de la copie.

Cette décision des Alouettes de faire connaître les exigences de Calvillo, met de la pression sur le quart. L'équipe sait bien que les amateurs vont se ranger de son côté car tout le monde sait que dans la structure actuelle, la demande est trop élevée.

Si les rumeurs sont vraies, à l'effet que les Alouettes offrent à Calvillo un salaire variant entre 300 000 et 350 000 $, je signerais demain matin si j'étais à sa place.

Anthony doit beaucoup à Montréal car c'est ici qu'il a pu remettre sa carrière sur les rails. Puis, il a épousé une femme de Montréal et je suis convaincu que les deux parties vont s'entendre car Calvillo veut rester ici. Ça ne lui tente pas vraiment de tout recommencer ailleurs.

Agent libre

Il y a sans doute des équipes qui seront intéressées à ses services. Je pense immédiatement aux Argonauts de Toronto qui connaissent des problèmes depuis le départ de Flutie. À Calgary, le nouvel entraîneur Jim Barker adore Anthony. Les deux hommes ont eu une belle complicité avec les Alouettes. De plus, les deux équipes auraient les moyens de le satisfaire.

À Hamilton, les Tiger Cats misent sur Danny McManus et à Winnipeg Jones est bien en scelle. Il y a peut-être les Renegades d'Ottawa qui pourraient être intéressés. Si Anthony ne veut pas trop s'éloigner, Ottawa est tout près de Montréal. Dan Crowley n'a pas connu une grosse saison l'an dernier et cette jeune franchise aimerait bien se donner un élan.

À Calgary, il sera intéressant de voir si Marcus Crandell pourra décortiquer le système à l'attaque de Barker. C'est la force d'Anthony de bien lire le jeu. Dans le système à Barker, cet aspect est très important.

Je pense qu'Anthony pourrait agir comme troisième quart avec une équipe de la NFL. On sait qu'il aura une chance avec les Steelers de Pittsburgh. J'ai plus de doute en ce qui a trait au poste numéro un d'une équipe mais comme réserviste, je le verrais très bien. La question est de savoir sil veut jouer ou se contenter de prendre des notes au cours du match.

Si Calvillo quittait les Alouettes, son départ ferait mal à l'équipe. Jim Popp sait bien qu'il n'y a personne pour prendre la relève actuellement et ça avantage Anthony dans ses négociations. Je ne sais plus combien de fois Don Matthews a déclaré l'an dernier qu'il pouvait remplacer tous ses joueurs sauf un, Calvillo.

Tavares Bolden et Matt Lytle n'ont pas vraiment d'expérience dans la LCF et il ne faudrait pas s'attendre à les voir exceller comme Calvillo l'a fait.

Comme successeur à Calvillo, on a déjà parlé de Joey Hamilton, qui était sur la liste des blessés chez les Buccaneers de Tampa Bay et qui a connu une grosse année universitaire et dont on dit qu'il ressemble à Flutie. Hamilton n'a toutefois jamais joué au Canada. On peut bien dire qu'il s'agit du même football qui se joue des deux côtés de la frontière mais c'est un style différent et les gars doivent se donner du temps pour apprendre.

Les Alouettes se doivent de trouver le moyen de garder Calvillo. Mais est-ce que l'équipe va se dire qu'elle a moins de pression maintenant qu'elle a gagné la coupe Grey et que le temps est venu pour elle d'apporter des changements à la formation?

Un autre argument qui joue en faveur de Calvillo est cette déclaration de Matthews qui a expliqué que le départ d'Anthony l'obligerait à changer son système de jeu.

Montréal pourrait donc présenter un visage différent l'an prochain. Adriano Belli, Keith Stokes et Pat Woodcock tenteront tous leur chance dans la NFL. Ce qui fait encore plus mal, c'est que Belli et Woodcock sont d'excellents joueurs canadiens. Les joueurs canadiens sont toujours plus difficiles à remplacer car le bassin de joueurs au pays est moins gros qu'aux États-Unis. Ça ne veut pas dire qu'ils ne seront pas de retour à Montréal en 2003. S'ils étaient retranchés, leurs droits appartiennent toujours aux Alouettes dans la LCF.

À la prochaine,

Pierre

*Propos recueillis par RDS.ca