MONTRÉAL – Aucune défensive de la Ligue canadienne n’a été plus maltraitée par le jeu aérien que celle des Alouettes la saison dernière. L’unité montréalaise a accordé 5690 verges par la passe en 2019, une moyenne de 316 par match. Elle n’a aussi réussi que 16 interceptions, le troisième plus bas total dans la ligue.

 

Des changements étaient donc à prévoir dans ce département. La semaine dernière, le nouveau directeur général Danny Maciocia a posé ses premiers gestes concrets en libérant le demi de coin Tommie Campbell et en échangeant le maraudeur Bo Lokombo aux Argonauts de Toronto.

 

Et à défaut d’avoir fait venir du renfort sur le terrain – le marché des joueurs autonomes s’ouvrira le 11 février – les Alouettes ont déjà commencé à importer du talent afin de voir à la résolution du problème. Trois jours après la présentation des nouveaux propriétaires de l’équipe, ils ont annoncé l’embauche de Barron Miles au poste d’entraîneur des demis défensifs.

 

Miles n’arrive pas à Montréal en étranger. Il a passé les sept premières saisons de sa carrière de joueur dans la tertiaire les Alouettes, de 1998 à 2004. Il a représenté les Oiseaux trois fois sur l'équipe étoiles de la LCF avant d’être attiré hors du nid par les Lions de la Colombie-Britannique. Il a dominé la LCF avec dix interceptions en 2006. Il en avait réussi un total de 66 lorsqu’il a pris sa retraite en 2009.

 

L’histoire ne dit toutefois pas combien d’entre elles lui donnent aujourd’hui le droit de faire de l’attitude à Khari Jones.

 

« Il te dira assurément ‘aucune’, moi je dirais peut-être deux, réfléchit à voix haute l’ancien maraudeur. Mais honnêtement, je me souviens de tous les quarts-arrières que j’ai piégés et je n’ai pas de souvenir précis sur Khari, alors c’est possible qu’il soit passé sous mon radar. Pour être certain, je lui dis juste qu’il n’osait pas lancer dans ma direction. »

 

« On s’obstine toujours là-dessus, réagit Jones dans un éclat de rire. Moi je lui dis que si ce n’est pas sur vidéo, ce n’est jamais arrivé. Alors montrez-moi les preuves! De toute façon, j’avais pris l’habitude de rester loin de Barron.  Je préférais m’acharner sur le maillon le plus faible de la brigade adverse, alors il n’a probablement pas vu beaucoup de mes passes dans sa direction. »

 

Miles et Jones se sont rencontrés grâce au travail d’entremetteur de l’ancien entraîneur des Alouettes Dave Ritchie. Ce dernier avait deviné des atomes crochus entre les deux athlètes et s’était mis dans la tête de les mettre en contact. Son intuition ne l’avait pas trompé.

 

Les deux hommes ont travaillé ensemble une première fois en 2012 et 2013 en Saskatchewan. Jones était l’entraîneur des quarts-arrières tandis que Miles s’occupait des demis défensifs. Ils ont soulevé la Coupe Grey en 2013, puis leurs carrières ont pris des directions opposées. Quand Jones est devenu entraîneur-chef par intérim des Alouettes l’an dernier, Miles était déjà engagé dans sa troisième saison avec les Eskimos d’Edmonton. Dès que son contrat est venu à terme et que Jones a obtenu le vote de confiance qu’il attendait à Montréal, les retrouvailles se sont matérialisées.

 

« J’adore son esprit compétitif et son éthique de travail, affirme Jones. On partage les mêmes valeurs. C’est l’un des gars sur qui j’ai toujours gardé un œil en attendant de me retrouver dans la position que j’occupe présentement. C’était clair que j’essaierais de l’avoir, simplement parce que je pense qu’il rend les équipes pour lesquelles il travaille meilleures. C’était un choix logique pour moi. »

 

« On aurait aimé l’avoir l’année passée si on avait pu, avoue André Bolduc, le bras droit de Jones au sein du personnel montréalais. C’est super qu’il revienne chez lui, je suis super content. Il va tellement amener à notre défensive. Déjà, en une semaine, sa présence se fait sentir. Des idées de couverture, sa façon dont il fait les trucs, sa façon de penser comme un ‘DB’ et la façon dont il va rassembler ces gars-là, ça va être incroyable. »

 

Miles est bien placé pour savoir que les Als ont des croûtes à manger au niveau de leur tertiaire. La saison dernière, en trois matchs contre les Eskimos, les Montréalais ont accordé 1139 verges aériennes et laissé le quart-arrière Trevor Harris compléter 78,8% de ses passes.Barron Miles

 

« Je ne suis pas prêt à dire que les carences de la tertiaire ont été exposées, répond-il, diplomate. Trevor était en feu, c’est tout. Ça peut arriver. »                        

 

« Je ne veux pas de gars qui jouent sur les talons. Je veux qu’ils jouent sans stress, sans crainte de faire des erreurs. Au niveau tactique, je m’occupe de m’assurer qu’ils soient bien positionnés. Mais au niveau de l’état d’esprit, je veux des gars jeunes, énergiques et affamés pour le ballon. »  

 

Comme leader de sa brigade, Miles pourra compter sur Greg Reid, 29 ans, qui a fait sa place sur l’équipe d’étoiles de la LCF en 2019. Le retour au jeu de maraudeur Taylor Loffler, qui s’est bousillé un genou l’an dernier, sera le bienvenu. Les Alouettes pourraient aussi offrir un nouveau contrat à Ciante Evans, 27 ans, qui a réalisé trois interceptions en 13 matchs après son arrivée à Montréal.

 

Mais Miles, qui occupera aussi le poste de coordonnateur contre le jeu aérien, doit aussi espérer que les mesures nécessaires seront prises pour améliorer un front défensif qui n’a produit que 27 sacs la saison dernière. Sans une pression adéquate sur le quart adverse, les progrès de son unité risquent d’être difficiles à chiffrer.

 

« Bien sûr, tout ça est relié, reconnaît Khari Jones. On ne peut pas isoler la tertiaire ou le groupe de secondeurs pour expliquer nos problèmes contre le jeu aérien. Ça prend aussi une ligne défensive qui facilite la vie d’un peu tout le monde pour qu’on soit, dans l’ensemble, meilleur. » ​