NOLA : dépaysant et... familier
LA NOUVELLE-ORLÉANS – « On pense se rassembler et poursuivre la NFL ». Quand un artiste, croisé sur Frenchman Street, nous lance cette affirmation, ça nous rappelle que rien n'est parfait lors de la présentation d'un Super Bowl.
Jeudi soir, après une longue et amusante journée de travail, on a bravé la fatigue en étant attiré par la musique de la Louisiane. Un ami, amoureux de l'endroit, nous avait fourni une liste de repères incontournables pour s'abreuver des notes ensorcelantes de la musique de la région.
Une marche de 25 minutes nous mène à découvrir les charmes du Quartier français dont la cathédrale St. Louis qui est illuminée majestueusement, en soirée, cette semaine. En contournant le Jackson Square, un lieu historique, on aboutit sur un artiste qui imprime ses œuvres sur des chandails.
Impossible de résister à son talent, on lui achète un souvenir et c'est là qu'on apprend qu'on a été le seul client de sa soirée. « C'est terriblement mort, beaucoup plus qu'en temps normal. Avec toute la sécurité qui boucle la ville, personne ne s'est déplacée jusqu'ici. On pense se rassembler et poursuivre la NFL », a-t-il pesté.
Une remarque qui nous enfonce un coup au cœur alors qu'on avait si hâte à ce Super Bowl pour venir encourager les artistes, ceux qui donnent cette couleur si particulière et attachante à la Louisiane. Vite, il fallait se réfugier dans un lieu réputé pour la musique.
Les excellentes adresses sont si nombreuses sur Frenchman Street qu'on se permet une petite tournée de trois arrêts et le Spotted Cat a été notre préféré. À la pause, la curiosité invite à demander à la chanteuse du groupe pourquoi son prénom s'écrit Jenavieve et non Geneviève. « J'ai changé l'écriture pour que ce soit plus facile à prononcer pour les anglophones », nous apprend-elle.
C'est un peu ça, le paradoxe de La Nouvelle-Orléans. On s'y sent pratiquement à la maison avec le nom français de la ville et les centaines de commerces portant des noms francophones. En marchant, un sourire respectueux nous vient au visage en s'imaginant des anglophones tenter de prononcer le nom de la boutique « Le coffre au Trésor ».
Ensuite, on pense aux fleurs de lys qui tapissent la région et bien sûr, la musique qui possède certaines ressemblances avec celle du Québec.
Pourtant, bonne chance pour y trouver des gens qui parlent français. Voilà qui rend encore plus précieuse la contribution de Louis Michot et son groupe (Lost Bayou Ramblers) qui chantent en français depuis plus de 20 ans pour préserver la langue en Louisiane.
D'un autre côté, c'est charmant d'être immergé dans un lieu dépaysant et familier. La découverte culinaire de l'alligator aura été un point fort, au-delà des écrevisses.
Que dire aussi des petites maisons colorées des rues résidentielles de la ville. Une ville qui doit, visiblement, composer avec de grands enjeux de pauvreté et d'itinérance comme tant de cités incluant Montréal.
Même une balade sur le long du fleuve Mississippi nous fait penser à la métropole québécoise. Car oui, comme à Montréal, une grande portion du fleuve est cachée par des rails et un quartier industriel. L'aménagement d'un parc linéaire n'aura pas sauvé la mise parce qu'il est caché, amoché et abandonné même en pleine semaine du Super Bowl.
Le contraste aura été le thème de la semaine. Après avoir croisé nombre d'itinérants ayant un matin laborieux, on aperçoit un immense yacht accosté au loin. Une recherche avec son nom, le Kismet, nous apprend qu'il appartient au propriétaire des Jaguars de Jacksonville et qu'il a coûté plus de 300 millions…
Mais le contraste le plus frappant restera l'immense sécurité déployée. Des centaines de policiers et militaires positionnés – et surtout armés jusqu'aux dents - à presque tous les coins des rues achalandées.
La NFL et La Nouvelle-Orléans ont joué de prudence pour éviter une autre tragédie comme celle de l'attaque au camion-bélier – qui a tué 15 personnes - durant les célébrations du Nouvel An.
Une sécurité impossible à oublier dans nos souvenirs de cette édition tenue dans un lieu, ironiquement, si accueillant et chaleureux.
Le Super Bowl LIX aura donc été, à la fois, dépaysant et familier. On a déjà hâte de retourner en Louisiane dans une période moins occupée. Si on avait besoin d'un signe pour valider ce souhait, un immense brouillard voilait le fleuve Mississippi en semblant nous dire « vous n'aurez pas le choix de revenir pour me voir ».