Le plus récent match du jeudi soir dans la NFL promettait déjà en début de saison en raison de la confrontation entre les rivaux de division, les Chargers de Los Angeles et les Chiefs de Kansas City, mais avec les enjeux au classement à cette période-ci de la saison, l’engouement était à un tout autre niveau.

Avant cette rencontre, les Chiefs trônaient au sommet de la division ouest dans l’Américaine avec un dossier de 11-2 et les Chargers suivaient avec une fiche de 10-3.

ContentId(3.1301639):NFL : Chargers 29 - Chiefs 28 (football)
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Les deux équipes ne s’étaient pas affrontées depuis la première semaine d’activités alors que la troupe d’Andy Reid l’avait alors emporté 38-28. Cependant, avec leur séquence actuelle, les Chargers se demandaient s’ils pouvaient mettre un terme à leur série de neuf revers de suite contre leurs rivaux de division. On les percevait d’ailleurs depuis quelques années pratiquement comme les petits frères des Chiefs pour cette raison.

Si les Chargers voulaient vraiment être pris au sérieux pour la suite des choses, ils devaient passer un message à Kansas City. C’est ce qu’ils ont fait.

La table était mise et le match a répondu aux attentes, particulièrement à la fin alors que les derniers instants ont été enlevants.

Pourtant lorsqu’on regardait le début de match, on était loin de se douter que la formation de Los Angeles parviendrait à s’imposer au final par la marque de 29-28.

Je me suis même demandé à un certain moment si ce n’était pas dans le plan de match d’Anthony Lynn de tirer de l’arrière. On se souviendra que les Chargers accusaient un retard de 16 points contre les Steelers à Pittsburgh avant de remonter et de triompher. Ils semblent laisser croire à l’adversaire que la rencontre sera facile avant de revenir en force.

Ce n’est évidemment pas le cas, mais ce qu’il faut en déduire, c’est que cette équipe est résiliente. Elle paraît dans son élément lorsque les matchs sont chaudement disputés et elle ne panique pas lorsqu’elle tire de l’arrière. C’est un aspect non négligeable à cette période de l’année alors que les éliminatoires se dessinent à l’horizon.

Une statistique révélatrice quant à leur résilience : ils ont une fiche de deux victoires contre un revers sur la route lorsqu’ils tirent de l’arrière par 14 points à un moment dans un match disputé sur la route. Ils ont signé des victoires à Pittsburgh et Kansas City et leur seule défaite en pareille situation est survenue au domicile des Rams. Pour mettre en perspective, le reste des équipes à travers la ligue ont une fiche combinée de seulement trois victoires et 78 revers dans une telle situation. C’est assez évocateur.

Ce qu’il faut aussi se demander avec un tel résultat, c’est s’il ne viendra pas mettre un doute dans la tête des joueurs et des partisans des Chiefs. Il ne faut pas remonter bien loin pour voir les Chiefs échapper une avance en fin de match. Ils détenaient une avance de 21-3 contre les Titans en éliminatoires en janvier dernier avant de voir l’équipe du Tennessee répliquer avec 19 points pour l’emporter 22-21.

On peut dire que la rencontre les opposant aux Chargers jeudi avait des allures de match éliminatoires. Ça sentait les séries en raison du niveau d’intensité. Cette fois, les hommes d’Andy Reid ont concédé deux touchés dans les cinq dernières minutes du match. C’est évident que les partisans voyaient le tout se produire avec un petit doute dans un coin de leur esprit. Personne ne remet en question la force de frappe de cette équipe à l’attaque, mais en défense, c’est une autre histoire et on a bien vu pourquoi jeudi.

D’ailleurs, autre statistique à l’appui, une équipe qui tirait de l’arrière par 14 points avec moins de cinq minutes à faire au match cette saison présentait une fiche de 0-88… avant le match de ce jeudi. C’est maintenant 1-88 grâce aux Chargers.

Rivers a été fidèle à son habitude

Évidemment, un acteur important de cette remontée aura été le quart Philip Rivers. Lorsqu’il vient le temps de parler de lui, irrémédiablement, il est comparé aux autres quarts de sa cuvée du repêchage de 2004. Il est impossible de passer sous silence les Super Bowls remportés par Eli Manning et Ben Roethlisberger, alors que lui n'en a aucun. C’est vrai qu’il manque quelque chose à sa feuille de route. Par contre, même si on peut critiquer son geste de passes, qui est particulier, et sa mobilité, on ne peut remettre en question son âme de compétiteur.

On avait tout un contraste hier dans le style alors qu’il y avait la fluidité de Mahomes d’un côté et la mécanique de Rivers de l’autre. Malgré ses deux interceptions, une mauvaise passe et une mauvaise décision, son manque de précision alors qu’à un moment du match son receveur était fin seul dans les zones profondes, les cinq sacs qu’il a encaissés et les 12 plaqués subis, il a terminé le match en force. Lors des deux dernières séquences, il a tout d’abord complété six de ses neuf passes pour 69 verges et ensuite quatre de ses huit passes pour 60 verges. Avant de lancer sa dernière passe de touché, il avait lancé une passe de 30 verges sur un premier essai et 20 verges en raison d’une pénalité. Il a ensuite déposé le ballon parfaitement dans les mains de Travis Benjamin sur un quatrième essai pour que la séquence se poursuive.

J’ai parlé des difficultés avec sa mécanique, mais il a un sens de l’anticipation incroyable. Il peut voir le jeu se développer de manière unique. Mahomes peut se permettre de prolonger le jeu à son maximum avec ses qualités athlétiques, mais Rivers n’a pas cette carte et doit donc anticiper que son receveur va se libérer et non pas qu’il va être libre au moment où il décoche sa passe.

Un pari réfléchi et payant

Si Rivers a impressionné avec ses décisions sur le terrain, que dire de l’entraîneur-chef des Chargers qui a osé tenter la transformation de deux points. La réflexion derrière ce choix est intéressante.

Tout d’abord, s’il évolue à la maison, je ne sais pas s’il tente le coup. Par contre, sur la route, alors que son équipe a le vent dans les voiles, que les Chiefs sont dans les câbles, que la foule qui est habituellement très bruyante est en état de choc, il se dit que pour mettre fin à la série de revers contre la troupe de KC, il doit faire les choses différemment. Donc, tous ces facteurs ont sans doute été rapidement analysés et on en est arrivé à la tentative de deux points. C’était au final le bon choix, car malgré un temps d’arrêt, l’unité défensive des Chiefs était effectivement désorganisée puisqu’elle a laissé Mike Williams fin seul dans la zone des buts. Pourtant, le tracé était loin d’être compliqué, mais une mauvaise communication et l’enjeu en fin de match ont sans doute pesé dans la balance.

Lynn ne voulait probablement pas que le match se rende en prolongation et qu’il voie à ce moment les Chiefs remporter le tirage au sort, décider de prendre le ballon et d’éventuellement mettre fin à la rencontre en inscrivant un touché. Même si les Chiefs avaient été menottés en attaque en fin de rencontre, il ne voulait pas prendre de chances. On peut réaliser également que les Chiefs avaient inscrits des touchés sur leur première séquence au 1er quart, en deuxième demie, donc c’était à ce demander s’il ferait de même en prolongation.

Lynn avait peut-être vu également ce qui s’était produit la semaine auparavant entre les Eagles de Philadelphie et les Cowboys de Dallas. Les Eagles avaient réussi à remonter tout comme les Chargers en fin de match avec dans leur cas deux touchés dans les trois dernières minutes. Doug Pederson, qui est connu pour ne pas avoir peur d’aller à Vegas en tentant sa chance sur des quatrièmes essais ou des transformations de deux points, décide d’y aller pour un seul et opte pour la prolongation. Les Cowboys ont enchaîné lors du temps supplémentaire avec une séquence de 13 jeux en un peu plus de huit minutes pour le touché et mettre fin au match. Les Eagles n’ont finalement jamais eu leur chance.

L’entraîneur-chef des Chargers a pu être influencé par ce résultat et il savait que les Chiefs avaient gagné en prolongation contre les Ravens de Baltimore une semaine plus tôt. Même si dans ce match les Ravens ont eu une possession de ballon en prolongation, l’équipe avait tout de même une expérience positive dans cette situation. La décision de Lynn pouvait donc se comprendre sur le moment et on peut dire en plus qu’elle lui a souri avec la tournure des événements.

Des points à corriger pour KC

Malgré le résultat négatif, il faut encore dire que Mahomes est parvenu à sortir un lapin de son chapeau. En début de match, on voyait sur une reprise d’un troisième jeu qu’il a parcouru près de 50 verges en courant derrière sa pochette avant de rejoindre son receveur pour un premier essai. Évidemment, sa première passe de touché est sensationnelle, alors qu'il’ parvient à rejoindre Demarcus Robinson dans la zone des buts après une feinte et alors qu’il est déporté vers l’extérieur du terrain.

Toutes les semaines, la mâchoire nous décroche devant ses prouesses. Par contre, on parle de lui à l’extérieur de sa pochette, ce qui me fait dire que la pression se rend de plus en plus à lui. C’est spectaculaire et les partisans apprécient, mais sans doute beaucoup moins son entraîneur qui voit son quart tenter d’éviter sans arrêt d’être rabattu au sol.

Point à ne pas négliger, les Chiefs évoluaient pour l’occasion sans leurs deux gardes partants alors que Laurent Duvernay-Tardif et Cam Erving n’étaient pas en uniforme. C’est évident que ce facteur rattrape les Chiefs à un certain moment.

Les chiffres ne sont pas si éloquents, alors qu’il n’a été victime que de deux sacs et de cinq plaqués au cours de cette rencontre, mais combien de fois a-t-il été forcé d’acheter du temps avec ses jambes en quittant sa pochette? C’est là que c’est préoccupant. Contre les Ravens, Mahomes avait été frappé 15 fois, dont trois sacs du quart, et encore une fois, il avait dû montrer toute sa mobilité. Cette lacune devra être corrigée dans les prochaines semaines. C’est évident que les Chargers et les Ravens possèdent deux excellents fronts défensifs, mais c’est ce genre d’équipe que les Chiefs risquent d’affronter en séries, alors ils devront être prêts.

Avant de s’inquiéter de l’attaque, il faut s’attarder à la défense de Kansas City. Dans leurs trois défaites, l’équipe avait les devants au quatrième quart. Contre les Patriots de la Nouvelle-Angleterre, Tom Brady a hérité du ballon en fin de match et il a su mener son équipe en position pour réaliser le placement victorieux. On se souviendra du feu d’artifice offensif contre les Rams et ces derniers avaient ultimement pris les commandes 54-51 avec un placement alors qu’il restait un peu moins de deux minutes à la rencontre. C’est vrai dans le cas présent que Mahomes a eu une chance de répliquer, même qu’il a lancé deux interceptions en 1 min 49 secondes, mais entre nous, une équipe ne doit pas perdre un match en ayant inscrit 51 points. Je ne lancerai donc pas la pierre à l’unité offensive des Chiefs pour ce match.

Si on ajoute donc la défaite contre les Charges, les Chiefs ont perdu leurs trois matchs par un cumulatif de seulement sept points. Ils peuvent s’encourager en disant qu’ils sont dans le coup, mais une remontée comme celle des Chargers ramène le spectre de la dernière défaite en éliminatoire dans le portrait.

C’était aussi possible de conclure jeudi que si le front défensif des Chiefs ne parvient pas à appliquer de la pression, la tertiaire ne peut arrêter une attaque adverse alors qu’elle a été une véritable passoire devant Rivers et ses receveurs. Ce dernier ne pouvait d’ailleurs pas compter sur Melvin Gordon pour ce match et qui a perdu les services de Keenan Allen tôt dans la rencontre.

Si Chris Jones, Dee Ford et Justin Houston ne parviennent pas à malmener le quart adverse, la tertiaire n’est pas capable de faire le gros. C’est un point à corriger pour la fin de la saison et pour les éliminatoires.

Les mouchoirs volaient à KC

Avant de me pencher sur ce qui attend les deux équipes pour la fin de la saison, je veux glisser un mot sur le travail des officiels qui me laisse perplexe depuis quelques semaines. On entend souvent que peu importe le moment du match, si une pénalité doit être décernée, elle va l’être.

Par contre, il me semble que plusieurs de leurs décisions sont discutables au cours des dernières semaines. Lors du match entre les Chargers et les Chiefs, pas moins de 21 pénalités pour un total de 195 verges ont été décernées. Nous sommes à la fin de la saison, donc il n’est plus question d’établir des standards comme on peut le faire en début de campagne.

La pénalité qui me dérange le plus, c’est celle pour avoir retenu qui est donnée à un demi-défensif et qui accorde automatiquement un premier essai. On l’a vu lors de ce match et je ne suis pas certain qu’elle était toujours méritée. Je n’ai jamais eu les qualités athlétiques pour être demi-défensif, mais je ne voudrais pas de toute façon être à cette position à ce moment alors qu’il devient très difficile d’arrêter un receveur, même si je comprends qu’on tente de plus en plus de protéger les joueurs lors des impacts. C’est tout de même difficile de connaître la limite permise.

Des gestes sont également demeurés impunis alors qu’à la toute fin, il semblait que Rivers a été frappé à la tête, mais il a été jugé que non. On a vu aussi une pénalité dans la zone des buts et sur le moment je pensais même que la pénalité était au receveur alors qu’il semblait avoir créé de la séparation avec son bras. C’est finalement le demi-défensif qui a été pris en défaut. Au final, je suis d’avis que 21 pénalités dans un match, même si l’allure de celui-ci a une influence sur le travail des officiels, c’est trop.

Les Chiefs ont toujours le contrôle

Malgré cette situation et le résultat, les Chiefs sont toujours aux commandes de la division bien que les deux équipes présentent des dossiers identiques de 11-3. La fiche au sein de la division explique que les Chiefs sont toujours en tête. Ils ont encore leur destinée entre leurs mains, mais on va garder un œil attentif sur les matchs de la prochaine semaine qui opposeront les Chiefs aux Seahawks à Seattle, alors que les Chargers affronteront les Ravens à domicile. Les Chiefs auront ensuite rendez-vous avec les Raiders, tandis que Los Angeles terminera sa saison à Denver contre les Broncos.  

*Propos recueillis par Maxime Tousignant