MINNEAPOLIS - Ceux qui pensent que les livres de jeux et la planification des matchs sont complexes dans la Ligue nationale de football devraient jeter un coup d'oeil aux mesures qui seront déployées en fin de semaine pour assurer la santé des joueurs pendant la grand-messe du football américain, le Super Bowl.

La ligue en a donné un exemple il y a quelques jours au Stade US Bank de Minneapolis, où s'affronteront les Patriots de la Nouvelle-Angleterre et les Eagles de Philadelphie dimanche.

De la cabine du guetteur dans les hauteurs du stade jusqu'aux salles d'examen, vestiaires et installations ambulancières dans ses entrailles, en passant par la tente bleue sur les lignes de côté, des dizaines de personnes contribuent aux protocoles de santé et de sécurité.

Qu'il s'agisse de médecins spécialisés en traumatismes neurologiques, de soigneurs, de techniciens spécialisés en données, de conducteurs d'ambulances ou de personnel d'urgence, une trentaine d'employés médicaux seront déployés.

Même l'arbitre sera mis à contribution.

La NFL est critiquée depuis plusieurs années pour son manque d'intérêt envers la santé de ses joueurs, et elle y accorde dorénavant une grande importance.

Nouveauté la saison dernière, tous les employés médicaux assignés à un match se rencontrent une heure avant le botté d'envoi.

« C'est un bon groupe », a dit le directeur médical de la ligue, le docteur Allen Sills.

Ce groupe épluche le Plan d'action d'urgence, qui explique en détail qui fait quoi lors de pratiquement n'importe quelle blessure ou situation d'urgence. Le document est si détaillé qu'on y retrouve même des gestes du bras ou de la main pour guider tous les intervenants.

« L'effort de collaboration entre les équipes est exemplaire... sans failles », assure le soigneur en chef des Vikings du Minnesota, Eric Sugarman.

L'accent est évidemment accordé au traitement immédiat de toute blessure.

La pertinence de la rencontre d'avant-match d'une heure est devenue évidente quand l'ailier rapproché des Bears de Chicago, Zach Miller, s'est disloqué le genou gauche lors d'un affrontement à La Nouvelle-Orléans, sectionnant du fait même l'artère qui alimente en sang tout le bas de sa jambe. Il aurait pu perdre le membre sans l'intervention rapide du personnel médical bien entraîné.

« C'est le genre de situation pour laquelle on se pratique, a dit le docteur Sills. Elles sont incroyablement rares, mais on veut être prêts. »

Ces employés doivent être en mesure de réagir à toutes les blessures, petites et grosses - qu'il s'agisse de simplement enrubanner de nouveau une cheville sous la tente bleue ou d'envoyer un joueur vers une salle d'examen, voire à l'hôpital, pour un problème plus sérieux.

Le Stade US Bank, comme tous les autres de la ligue, est équipé d'une « salle tranquille » spéciale réservée à l'évaluation des commotions cérébrales, conséquence directe des découvertes effectuées depuis quelques années concernant les dangers de ce type de blessure.

On retrouve dans cette salle le spécialiste indépendant des traumatismes neurologiques, un médecin de l'équipe ou un membre du personnel médical de l'équipe. Ils comparent le test de base du joueur à son état actuel. Sugarman assure n'avoir jamais été témoin de la moindre mésentente pendant cet examen d'une dizaine de minutes.

« Parfois, au bout de deux ou trois minutes, on sait qu'il (le joueur) va échouer au test », dit-il.

Les entraîneurs, dirigeants et propriétaires des équipes sont interdits d'accès dans les salles d'examen, ou même dans la tente bleue à quelques mètres des lignes de côté.

« Je n'ai pas de propriétaires qui me demandent de le renvoyer sur le terrain le plus tôt possible », poursuit M. Sugarman.

Le rôle des guetteurs, qui doivent repérer d'éventuelles commotions cérébrales, est maintenant plus crucial que jamais. Plusieurs joueurs - dont le quart des Texans de Houston Tom Savage - ont clairement été blessés, sans pour autant recevoir immédiatement les soins requis. Il y aura donc quatre spécialistes indépendants des traumatismes neurologiques au Super Bowl, alors qu'on en retrouve habituellement un de chaque côté du terrain.

Après la blessure à Savage en décembre, le protocole a été changé pour en ajouter un troisième lors des matchs de séries, en plus d'un spécialiste au siège de la ligue. C'est ce dernier qui sera dans la loge du guetteur au Super Bowl.

Ces postes sont habituellement confiés à des soigneurs qui doivent repérer, des airs, les blessures à la tête des joueurs. Ils sont jumelés à des techniciens vidéo qui regardent le match à la télévision et identifient les jeux qui causent des blessures - même s'ils ne sont pas toujours faciles à repérer.

Un guetteur peut communiquer avec le personnel médical le long des lignes de côté. S'il y a lieu d'interrompre le match pour déplacer un joueur blessé hors du terrain, il en a le pouvoir et n'a qu'à crier « temps d'arrêt médical » dans son micro.

L'arbitre interrompra alors la rencontre : selon le docteur Sills, cela s'est produit huit ou dix fois au cours de la dernière saison.

Le personnel médical de l'équipe ou des experts indépendants pourront alors prendre connaissance du jeu en question sur un écran, sur les lignes de côté. Une décision plus rapide et plus précise pourra être prise concernant la suite des choses, s'il y a lieu; le personnel médical n'aura pas non plus à se fier à la seule description que pourra faire le joueur du jeu.

Sugarman salue la technologie qui rend tout ça possible.

« Des gens comme moi auraient pu regarder ça de travers, admet-il en souriant. "Big Brother" qui regarde par-dessus ton épaule. Mais on ne pourrait pas s'en passer. On ne peut pas tout voir. C'est très rassurant d'avoir une telle protection. »

La ligue a réuni pour la première fois, l'été dernier, le personnel médical des équipes et des experts indépendants dans le cadre d'une grande rencontre consacrée aux commotions cérébrales et aux traumatismes neurologiques. Ces formations se poursuivront.

Le docteur Sills se hérisse quand il entend que la NFL ne fait pas assez pour combattre les blessures à la tête. Debout dans la salle à rayons X du stade où se décidera le Super Bowl, il défend vigoureusement la politique de la ligue concernant les commotions cérébrales.

« J'aime dire que ça n'a pas été écrit au dos d'une enveloppe dans un ascenseur, lance-t-il. Ça implique une grande quantité de planification, d'étude, de préparation, d'opinions d'experts. Et honnêtement, je trouve ça très insultant d'entendre les gens dire, "Le protocole de commotions cérébrales est une vraie farce". Parce que c'est un document scientifique très rare. »

« Aucun protocole n'est parfait. Aucun protocole ne prévoit chaque scénario médical, et c'est pourquoi il faut continuer à l'améliorer. Mais nous sommes incroyablement dévoués à le rendre aussi bon que possible. »