MONTRÉAL – Autant physiquement que mentalement, Pier-Olivier Lestage n’est du style à se faire ébranler facilement. Mais il admet qu’il a été émerveillé à quelques reprises depuis qu’il a entamé ses premiers pas avec les Seahawks de Seattle. 

Ça fait déjà une dizaine de jours que le joueur de ligne offensive québécois est plongé dans son rêve au complexe d’entraînement des Seahawks qui est situé à une quinzaine de minutes de leur stade. 

« C’est super le fun, ça faisait tellement longtemps que je n’avais pas joué au foot. J’étais bien content de mettre mon casque pour la première fois depuis pratiquement 18 mois. Bien sûr, il a fallu que je m’arrête quelques fois pour me dire ‘Je suis là, je suis vraiment dans la NFL’. C’est comme si j’avais accompli une partie de mon rêve, mais il me reste encore bien des choses à faire. Mais c’est super amusant, on est vraiment bien traités et les entraîneurs sont excellents. Je ne pourrais pas demander mieux », a confié Lestage lors d’une entrevue avec l’auteur de ces lignes et l’estimé confrère Stéphane Cadorette. 

Ce serait étonnant que Lestage ne soit pas emballé par l’ampleur de ce qu’il vit. Ça demeure un exploit de taille quand un Québécois obtient la confiance d’une équipe de la NFL, mais Lestage a réussi ce tour de force sans avoir joué en 2020. Bref, on présume que peu de joueurs savourent autant cette occasion dans la NFL. 

« Ouais, ç’a été plus compliqué que n’importe quelle année. Ç’aurait été plaisant de vivre le tout dans une année normale pour montrer quel genre de joueur je suis lors de ma dernière saison et accéder à la NFL de manière un peu plus conventionnelle. Il y a beaucoup de changements de dernière minute à gérer avec mon agent Sasha (Ghavami), mais ça fait partie de la game, on ne peut pas contrôler ce qui se passe avec la COVID. Mais quand même, tout ce que je voulais, c’est de pouvoir rivaliser dans cette ligue. Je vais faire tout en mon possible pour réussir et me faire un nom dans la NFL », a raconté l’athlète de six pieds trois pouces et 312 livres. 

De ce qu’il voit jusqu’à présent, Lestage considère qu’il se débrouille bien tout en réaliste sur l’adaptation qui s’impose venant de son parcours au football universitaire canadien. 

« Ouais, je me sens à ma place, je ne me sens pas déclassé à aucun niveau », a-t-il d’abord noté.  

« C’est sûr que, comparativement à tous les gars qui sont là, j’ai un peu plus d’ajustements à faire versus les règles au Canada. Ça me fait un peu plus de choses à travailler, mais je m’améliore et je corrige des choses chaque jour. Ça ne prendra pas beaucoup de temps avant que je sois au même niveau que tout le monde de ce côté, que je sois un joueur de foot américain et pas un joueur de foot canadien qui essaie de le devenir », a enchaîné le joueur de 23 ans. 

Inévitablement, à court terme, il doit s’habituer à la guerre des tranchées sans l’espace d’une verge du football canadien.  

« Ici, le gars de ligne défensive que tu veux bloquer, il est directement dans ta face. Il faut que tu réagisses plus rapidement », a convenu Lestage qui apprend à effectuer de plus petits pas, à effectuer son deuxième pas plus rapidement et à lever les mains plus vite pour effectuer la technique requise. 

Lestage démontre son intérêt au poste de centre

Les ennuis de protection de la ligne offensive des Seahawks sont bien connus et le quart-arrière Russell Wilson pourrait en parler – en privé - longtemps. Ainsi, Lestage a été encore plus attiré par l’attrait des Seahawks. 

Jusqu’ici, les Seahawks l’emploient surtout à sa position naturelle de garde, mais Lestage a gentiment passé le message qu’il aimerait acquérir de l’expérience comme centre. 

« C’est un plan qui me satisfait. C’est sûr que j’aimerais prendre des répétitions à la position de centre et je l’ai mentionné à mon coach de la ligne offensive (Mike Solari). Mais, pour jouer centre, il faut que tu connaisses le cahier de jeux de A à Z. C’est peut-être pour ça que je joue garde présentement, ce sera plus facile tout en apprenant le livre de fond en comble. Jouer centre, je crois que c’est la position qui me convient le mieux en raison de mon gabarit », a commenté l’ancien des Carabins de l’Université de Montréal. Pier-Olivier Lestage

D’autant plus que la relève est peu présente au poste de centre avec Ethan Pocic qui possède un contrat d’une saison. 

« C’est l’une des raisons pour lesquelles Seattle était si haut sur ma liste, je voyais une possibilité là-bas. En ce moment, je ne me bats pas pour un poste de partant, ce serait sauter des étapes, je commence par me familiariser avec le cahier de jeux et corriger des fautes liées aux différences avec le Canada. Quand ce sera fait, je suis un grand compétiteur donc je vais avoir en tête un poste de partant et une place dans la formation active de 53 joueurs », a élaboré Lestage. 

L’intérêt était réciproque pour les Seahawks. Lestage avait même eu droit à trois discussions avec Solari avant de signer son contrat de joueur autonome en plus de parler avec l’entraîneur-chef Pete Carroll. 

« Mes vidéos étaient très bonnes, ça démontrait que je suis un très bon athlète capable de jouer dans l’espace, avec un centre de gravité bas et que je finissais tous mes blocs. Ce sont trois choses recherchées sur la ligne offensive. Peut-être le fait que je jouais au Canada devenait un point d’interrogation. Mais, si tu mettais quelqu’un devant moi, mes qualités athlétiques ressortaient, c’était attrayant », a cerné Lestage qui a été repêché par les Alouettes de Montréal du côté de la LCF. 

Réaliste face à l'enthousiasme de Pete Carroll à son sujet

Pete Carroll lance des fleurs à Lestage

D’ailleurs, la présence de Lestage a suscité de la curiosité chez les journalistes qui couvrent les activités du club et qui le surnomment «Pier» pour faciliter la prononciation. Ainsi, Carroll a rapidement été questionné sur lui et il n’a pas caché son enthousiasme.  

« Ouais, j’ai entendu (l’extrait), c’est sûr que c’est flatteur. Mais je ne me fais trop d’idées avec ça, la question a été posée et il n’était pas pour dire que je le décevais ou autre. C’est encourageant, mais je dois travailler fort pour faire ma place. C’est définitivement plaisant d’entendre ça de la part de Pete Carroll », a-t-il réagi avec réalisme.

Lestage au camp des Seahawks

Son expérience avec les Seahawks s’est amorcée avec le mini-camp des recrues d’une durée de deux jours. Il a enchaîné avec le programme de développement des recrues qui se poursuivra jusqu’au 20 juin. 

« On a un gros horaire du lundi au jeudi avec des entraînements et beaucoup de réunions et d’efforts sur le cahier de jeux. Ça fait de très longues journées de travail, mais c’est notre passion, ce n’est pas trop en demander, c’est trippant », a décrit Lestage alors que les photos laissent croire que le site est fabuleux en bordure du Lac Washington. 

Contrairement à d’autres organisations, ce sont uniquement les joueurs qui participent au programme des recrues qui se présentent au complexe des Seahawks ces jours-ci. Ainsi, Lestage n’a pas croisé les Wilson, DK Metcalf, Jamal Adams et compagnie. Le seul contact qu’il a eu avec des vétérans s’est effectué virtuellement lors des réunions. Il pourra amplement se reprendre à partir du 20 juillet durant le camp d’entraînement.