ATLANTA – Il a 70 ans, il est loin d’être grand et costaud. Avec ses allures de professeur d'université retraité, Dante Scarnecchia a l’air de tout sauf d’un entraîneur de football et encore moins d’un gourou de la ligne offensive. Pourtant, c’est LA référence en la matière, celui qui doit s’assurer que ses soldats protègent Tom Brady à tout prix.
 
« On ne peut pas juger un livre par sa page couverture », rigole Marcus Cannon, le bloqueur à droite des Patriots de la Nouvelle-Angleterre qui est immensément plus gros que son sergent.
 
Les termes militaires sont souvent galvaudés quand on les utilise dans un contexte sportif. Une exception s’applique toutefois ici puisque Scarnecchia est justement un ancien sergent de la marine.

Vous comprendrez qu’il ne se laisse pas marcher sur les pieds même par des mastodontes de plus de 300 livres.  
 
« Il faut craindre les plus petits ! », a rajouté Cannon en riant.
 
Cette semaine, Scarnecchia aurait bien voulu s’en passer, mais il est devenu une histoire très intéressante. Sa ligne offensive a effectué de petits miracles devant Brady depuis le lancement des éliminatoires.
 
Le numéro 12 n’a pas subi un seul sac et ce rendement a dirigé les projecteurs vers ce vieux routier. Scarnecchia a commencé à transmettre ses connaissances du football en 1970, il y a près de 50 ans ! Les Patriots bénéficient de son expertise depuis 1982 outre un court de passage de deux saisons avec les Lions de Detroit et une tentative de retraite de deux années en 2014 et 2015.
 
Ça en dit long quand même le taciturne Bill Belichick s’est lancé dans un concert de louanges.  
 
« Dante a eu une carrière formidable. En tant qu’ancien militaire de la marine, il est fort mentalement et physiquement. Il est très exigeant, mais d’une bonne manière. Les joueurs répondent à son niveau élevé d’exigence et ils jouent bien en groupe. […] Je suis si chanceux qu’il ait été présent depuis tout ce temps. Il gère une unité très importante et il a développé tellement de bons joueurs. Je parle de gars repêchés tard ou même ignorés au repêchage, des joueurs que bien des gens ne croyaient pas qu’ils auraient une belle carrière », a propagé Belichick.
 
Mais celui qui a lancé le bal, c’est Brady lui-même.
 
« J’adore parler de mes amis de la ligne offensive, je pourrais le faire toute la journée. Ils ont le meilleur entraîneur de la ligne offensive de l’histoire. Il établit un très haut standard pour eux. Ils sont l’âme et le cœur de notre attaque. Ce sont eux qui nous permettent d’accomplir autant de choses », a décoché Brady en sachant que leur défi sera colossal face au front défensif des Rams.
 
La réaction de Scarnecchia valait 1000$ quand on lui a demandé de parler des éloges lancés par Brady et Belichick. Il aurait sans doute préféré retourner au front pendant quelques minutes au lieu de répondre à cette question.
 
« Je l’ai déjà dit, on se souvient seulement de notre match le plus récent. On sera jugé par la performance au Super Bowl. Il y aura 1000 caméras qui vont tout scruter de cette partie. Il faudra que notre jeu soit à la hauteur. Tout le reste ne veut rien dire à mes yeux », a-t-il répliqué en évitant partiellement la question.

Scarnecchia se rappelle d'un certain Vercheval en 1988
 
Le septuagénaire refuse tout simplement de s’accorder du mérite, mais il était tout de même d’un commerce très agréable. On sentait que ça lui faisait plaisir de partager son vécu. Assis tranquillement à une table avec le RDS.ca et un journaliste de Boston, il partageait sa vision comme un enseignant qui parvient à accrocher ses étudiants.
 
« Ce n’est pas tant ma recette qui fait la différence, mais j’ai la chance d’hériter de bons joueurs à encadrer et auxquels enseigner. Notre organisation et notre système font qu’on cherche des joueurs avec des traits précis. Ils doivent être intelligents et résistants physiquement. Ils n’ont pas besoin d’être des génies, mais intelligents. Ensuite, ils doivent être assez athlétiques pour pouvoir jouer leur position respective », a entamé le Californien.
 
« On ne fait aucun compromis là-dessus. On part avec une philosophie de base et on bâtit là-dessus. C’est juste ça ! Je n’ai rien inventé et personne ne va me décrire comme un génie. C’est la vérité. Je sais ce que je veux enseigner et les choses en lesquelles je crois », a-t-il enchaîné.
 
Disons d’abord, « génie du football » pour le qualifier celui qui a œuvré majoritairement sous les coordonnateurs offensifs Josh McDaniels et Charlie Weis.
 
« Notre système n’a pas tant changé, on ne l’a que modifié. Le groupe actuel traverse une  bonne période, mais je ne tiens rien pour acquis. J’ai trop d’expérience pour tomber dans ce piège », a reconnu Scarnecchia qui s’était ennuyé durant sa brève retraite.
 
Le doyen des entraîneurs des Patriots n’a pas besoin de jouer au petit dictateur pour qu’on l’écoute.
 
« Il impose le respect, tout le monde suit ses directives et on ne pourrait pas faire autrement. Il est tellement intelligent, il sait comment corriger des choses et il trouvera la façon de le faire si ce n’est pas le cas », a raconté Cannon.
 
« Bien sûr, il a des attentes très élevées pour nous, mais j’adore jouer pour lui. La ligne offensive, ce n’est pas la position la plus facile à maîtriser, mais on aime travailler sous ses ordres », a confirmé Joe Thuney qui en sera à son troisième Super Bowl comme partant à sa troisième année dans la NFL.
 
À mi-chemin de la conversation, Scarnecchia y est allé de sa seule réponse sèche. Il a clamé qu’il ne faisait que dire la vérité, tout simplement. On vous raconte ceci parce qu’avant de le quitter, on lui a mentionné que notre collègue et analyste Pierre Vercheval, avait fait belle figure au camp d’entraînement des Patriots en 1988 alors que Scarnecchia était déjà parmi les entraîneurs.
 
« Quel est son nom ? », a-t-il demandé.
 
« Pierre Vercheval », a-t-on répondu.  
 
« Oui, oui, je me souviens de lui, un jeune homme très bien », a-t-il conclu.