MONTRÉAL – Un Québécois, Laurent Desmarchais, qui, à 19 ans seulement, remporte un premier tournoi professionnel du Mackenzie Tour. Ça ressemble de plus en plus à un signe fiable que des golfeurs d’ici parviendront enfin à s’établir sur le circuit de la PGA. 

C’est vrai, ce refrain a été utilisé aussi souvent que la promesse de rallonger l’autoroute 30 ou celle de prolonger le métro jusqu’à Laval. Mais dans les deux cas, l’immense patience a été récompensée et cette fois-ci semble la bonne pour la relève en golf. 

Afin de vous rassurer, l’affirmation ne vient pas d’un parti politique, mais bien de Daniel Langevin, un réputé entraîneur de golf, qui est au cœur de ce développement québécois.

« Non seulement la PGA est accessible pour lui, mais à un haut niveau également », a jugé Langevin qui encadre le développement de Desmarchais - originaire de Longueuil - depuis quelques années. 

« Les gens vont toujours dire ‘Ouais, mais aucun golfeur québécois n'a réussi et ils ont été plusieurs à être bons. Ç’a l’air du Mont Everest vu que personne ne l’a fait. Mais je pense qu’à partir du moment qu’un Québécois sera régulier sur le circuit ou proche de ça, ça deviendra possible. D’ailleurs, je m’attends à en voir trois, quatre et cinq. Le contingent d’athlètes au Québec en golf est vraiment bon et Laurent est l’un des meneurs de ce groupe », a enchaîné Langevin qui entend sans cesse ce débat refaire surface. 

Desmarchais, un grand droitier de six pieds cinq pouces, ne se démarque pas uniquement par la qualité de son jeu pour son âge, il affiche aussi une savoureuse confiance. Lui, il ne rêve pas de la PGA. Il aspire d’y devenir l’un des meilleurs joueurs au monde ou même le meilleur. C’est carrément rafraîchissant comme discours. 

D’ailleurs, il n’était pas surpris de l’emporter la semaine dernière. Il en était rendu à son quatrième tournoi contre cette opposition et il s’était habitué au calibre de ses adversaires. 

« Oui, absolument, j’y croyais. Il le faut pour que ça fonctionne », a exposé Desmarchais au RDS.ca qui a raconté sa victoire dans cet article de l'agence Sportcom

Mais ce sera sa progression dans les prochaines années qui déterminera l’aboutissement de son parcours sportif. Ça tombe bien puisque sa première ronde de 62 à Toronto ne serait qu’un aperçu de son talent. 

« Il a raison d’avoir une belle confiance. Dans le jargon, on dirait qu’il est loin d’avoir la face dans le mur, il est encore loin d’avoir atteint son sommet », a noté Langevin en soulignant que sa charpente sera encore plus solide après deux ou trois autres années à pousser en gymnase. 

Ça ne veut pas dire que Desmarchais ressent cette confiance depuis toujours. 

« Pour être honnête, ça s’est développé au fil des expériences. Un jeune athlète, ça rêve. Ensuite, ça prend conscience et, finalement, ça devient acharné ou ça abandonne. Ce serait malhonnête que je dise que Laurent a toujours dit ‘Je veux gagner’. C’est plus arrivé dans les dernières années », a constaté son entraîneur. 

Laurent DesmarchaisLà pour gagner chaque tournoi

« Quand il était plus jeune, un tournoi de développement, ça pouvait exister pour lui. Mais ça fait plusieurs mois que c'est clair, entre lui et moi, que chaque fois qu’il arrive à la plate, qu’il se sente bien ou non, que son élan ait bien ou non, il est là pour gagner. Tu ne peux pas vouloir devenir le meilleur si tu es là juste pour faire bonne figure », a-t-il ajouté. 

Justement, c’est au niveau psychologique que Desmarchais a remarqué ses plus grands progrès. 

« On a eu accès à un spécialiste et je suis souvent accompagné de Daniel pour jouer des segments de neuf trous. Il peut corriger certaines de mes erreurs et m’expliquer le bon état d’esprit à avoir », a indiqué Desmarchais qui s’entraîne quatre mois par année à Victoria avec l’équipe nationale junior tout en gardant une supervision à distance de Langevin.  

Déjà reconnu pour ses coups de départ et ses coups roulés, ses approches deviennent graduellement une autre de ses forces. 

« Pour Laurent, c’est une progression marathonienne et constante. Ça n’arrête pas. En fait, ça traduit son acharnement et sa résilience à atteindre l’objectif », a expliqué Langevin. 

Le portrait d'ensemble exposé par Desmarchais ne fait aucun doute, il se démarque dans son groupe d’âge au Québec et même davantage. Ainsi, est-il le Québécois qui possède le plus de chances de percer dans la PGA ? 

« Il est l’un de ceux avec les meilleures chance comme Joey Savoie (26 ans) et Hugo Bernard (25 ans) qui sont un peu plus vieux que lui. Ils sont beaucoup plus près qu’on peut penser. On est dans les petits détails, les millimètres », a maintenu Langevin. 

« Déjà de voir un joueur québécois enchaîner avec deux parcours de 67 après une ronde initiale de 62, il faut que tu joues au golf pour vrai. Personne ne va te le donner. Il y a aussi Joey qui a fini sixième de la Canada Life Series en participant seulement à trois des quatre événements. Ça donne une idée du calibre québécois présentement », a-t-il ajouté. 

Un parallèle est facile à établir avec Tennis Canada qui a favorisé une éclosion de talent au pays en investissant dans l’encadrement. Loin de se plaindre du support accordé aux golfeurs québécois, Langevin croit qu’une autre étape serait utile pour rendre le tout optimal. 

« Il manquerait un pôle d’entraînement dans l’Est du pays. Tennis Canada a fait des pôles d’entraînement dans quelques régions et je sais que c’est plus facile avec le tennis qui se joue bien à l’intérieur. Mais, si on pouvait avoir un pôle dans l’Est et un pôle dans l’Ouest, tout en ayant un peu plus d’athlètes dans ce bassin d’entraînement et un peu plus d’entraîneurs impliqués, je pense qu’on pourrait avoir les mêmes succès qu’au tennis. Il faut faire attention, on a quand même beaucoup de succès avec plusieurs Canadiens sur la PGA. Mais est-ce qu’on pourrait en avoir plus du Québec et du Canada? Je pense qu’on pourrait doubler le contingent parce que le talent est là », a-t-il avancé. 

Bien sûr, les athlètes établis à l’Est partiraient pendant quatre mois pour s’entraîner au chaud. 

Trois Québécois sur le trio des meneurs 

En terminant, il faut absolument noter que trois Québécois composaient le trio des meneurs pour la dernière ronde du tournoi remporté par Desmarchais. Il était accompagné par Savoie et Bernard qui peuvent également compter sur Langevin comme entraîneur. 

« Habituellement, je ne suis pas très émotif, mais il reste que de voir trois Québécois sur le dernier trio d’un tournoi de la PGA Canada, je ne crois pas que ça s’était déjà vu et que ça va se répéter. C’est quand même rare. J’aurais dû aller m’acheter un billet de loterie. Ce matin-là, les émotions étaient très fortes. Quand les trois ont fini leur premier neuf, c’est sûrement la fois dans ma vie que j’ai pesé le plus souvent pour rafraîchir l’écran de mon ordinateur. Normalement, je suis sur place avec eux, mais ce n’est pas possible avec la COVID-19. J’aurais dû être présent pour voir la satisfaction de Laurent et voir que ses efforts ont été payants », a confié Langevin qui devrait pouvoir se reprendre dans les prochaines années. 

Après avoir acquis d’excellentes bases avec son premier entraîneur, Pierre Dugas, Desmarchais a poursuivi son ascension auprès de Langevin. La prochaine étape sera de raffiner son arsenal avec l’Université du Tennessee. La compétition y sera féroce, les terrains seront plus exigeants et il sera épaulé par deux entraîneurs. Ça ne pourra que l’aider pour parvenir à s’imposer sur la PGA.