ST ALBANS, Royaume-Uni - Le rideau est tombé, samedi au nord de Londres, sur le premier round du combat titanesque qui oppose la dissidente Série de golf LIV, financée par l'Arabie Saoudite, au sacro-saint circuit de la PGA, instance suprême du circuit nord-américain.

Le Sud-Africain Charl Schwartzel, 126e au classement mondial, restera comme le premier vainqueur d'un tournoi estampillé LIV, avec un retour sur investissement imbattable: 4 millions de dollars de gain pour trois jours de compétition et 54 trous seulement, contre quatre jours et 72 trous pour un tournoi « normal ». 

Dirigé par l'ancien numéro 1 mondial Greg Norman et financé par le fonds souverain saoudien, la Série de golf LIV a marqué des points cette semaine, car de grands noms étaient alignés à St Albans, à commencer par Phil Mickelson, six Majeurs à son tableau de chasse, et Dustin Johnson, deux Majeurs et ex-no 1 mondial.

Sans compter d'autres vainqueurs de Majeurs, comme Schwartzel lui-même (Tournoi des Maîtres 2011), Sergio Garcia, Martin Kaymer, Graeme McDowell et Louis Oosthuizen. Deux autres vont s'ajouter à la liste, dès la fin du mois en Oregon, pour la première étape LIV aux États-Unis: Patrick Reed et surtout Bryson DeChambeau.

Bannis par la PGA

Tous ces joueurs de premier plan – dont les Américains, cibles de critiques virulentes d'une association de familles de victimes du 11-Septembre qui tient l'Arabie saoudite pour responsable de ces attentats – sont déjà bannis du circuit de la PGA , ou sur le point de l'être, comme l'a annoncé son patron Jay Monahan, mais pas de l'Omnium des États-Unis prévu... en fin de semaine prochaine (16-19 juin) à Brookline (Massachussetts), ce qui va encore alimenter les débats. 

Des procès vont suivre, et les avocats se frottent les mains, car Mickelson, Johnson et consorts estiment qu'ils sont des travailleurs indépendants et qu'ils ont le droit de jouer où ils veulent, quand ils veulent, surtout si on les paie (très cher) pour leurs prestations. 

Les chiffres donnent déjà le tournis: à chacune des huit étapes du circuit LIV, 25 millions de dollars minimum seront distribués à un plateau de 48 joueurs, le total prévu pour toute cette saison inaugurale s'élevant à 255 millions de dollars.

Encore plus fou, Mickelson aurait reçu une prime de 200 millions de dollars pour son engagement, et Johnson 150 millions, des sommes qui n'ont pas été démenties par les intéressés. En 2024, Greg Norman prévoit un budget global de 2 milliards de dollars pour 14 épreuves.

Greg Norman a déjà gagné son pari, même si certains résistants se sont déjà déclarés, à commencer par Rory McIlroy, Justin Thomas et Scottie Scheffler, le numéro 1 mondial actuel. Ils vont boucler ce dimanche un Omnium du Canada, moins bien doté avec 1,56 M$ USD pour le vainqueur, comptant pour le circuit de la PGA... et le classement mondial !

Le golf au tribunal?

Norman, surnommé « The Shark » quand il était joueur, plaide pour un « marché libre et ouvert » dans le golf et il est prêt à soutenir ses anciens collègues de travail en payant des amendes éventuelles.

Vedette de l'équipe d'Europe en Coupe Ryder, le fantasque Ian Poulter, célèbre pour ses pantalons à carreaux, était à St Albans cette semaine. Il est prêt à faire appel de sa suspension par la PGA. Pour lui, ça n'a « aucun sens » de limiter le choix des épreuves par les joueurs.

Autre sujet au coeur de cette discorde, le classement mondial, car le circuit de la PGA n'est pas prêt à donner des points pour des tournois LIV Golf à des joueurs qu'il a suspendus ou bannis. Alors que le DP World Tour (ex-European Tour), ravi de l'aubaine éventuelle, ne s'est pas encore prononcé sur le sujet.

Les points du classement mondial sont d'autant plus cruciaux qu'ils permettent de déterminer la liste des invités aux quatre tournois Majeurs, ceux qui construisent la réputation des joueurs et leur place dans l'histoire du golf. L'Omnium des États-Unis a dit OK pour cette année, mais il y en a encore deux au menu cette année, notamment l'Omnium britannique à St Andrews.

Reste le débat permanent sur le respect des droits humains en Arabie saoudite. Mickelson prêche pour que le golf permette de faire avancer les choses, dans la bonne direction, comme les promoteurs de la Formule 1 quand ils se rendent à Djeddah. La saga de la Série de golf LIV ne fait que commencer.