MONTRÉAL – Lorsqu’il a été repêché au 41e rang par les Flyers de Philadelphie en 2007, le Québécois Kevin Marshall ne connaissait rien d’Ängelholm, une petite ville côtière de moins de 25 000 habitants située au sud de la Suède.

C’est pourtant là-bas que le défenseur de 26 ans a retrouvé tout le plaisir de jouer au hockey au sein du Rögle BK dans la Ligue élite suédoise.

Le lieu de son « exil » étonne par rapport aux grandes destinations européennes pour le hockey de la Suède, de la Finlande, de la Suisse ou de la Russie par exemple. Après un purgatoire qui s’éternisait dans la Ligue américaine de hockey, Marshall a lui-même commencé à chercher le prochain arrêt de sa carrière et cette occasion s’est présentée à lui.

« J’ai regardé pendant mes deux dernières années avec les Marlies (de Toronto). Je voulais un nouveau défi et je souhaitais vivre l’expérience de l’Europe », a expliqué Marshall à propos de la voie empruntée par plusieurs de ses amis en Allemagne et en Autriche notamment.

Kevin Marshall« C’est Kelsey Tessier, un de mes anciens coéquipiers des Remparts, qui m’a aidé à trouver cet endroit. Il appartenait à l’équipe et on s’entraîne ensemble l’été donc il savait que je me cherchais quelque chose. Il a constaté que le club pourrait avoir besoin d’un défenseur. Le directeur général a regardé mon profil, il a fait ses devoirs pour en connaître plus sur mon jeu et ma personnalité. Il m’a présenté une offre et ça me convenait », a développé l’habile communicateur.

Marshall était peut-être emballé par cette possibilité, mais elle aurait pu en effrayer plusieurs. L’organisation du Rögle BK n’est pas reconnue pour attirer des Québécois et les Canadiens ne sont pas vraiment plus nombreux à s’y joindre.

« Ça peut demander une plus grosse adaptation pour certaines personnes, mais je désirais tenter ma chance en Europe, j’avais le goût d’apprendre une nouvelle culture et voir le monde. D’ailleurs, les Suédois sont vraiment accueillants et, peu importe où je vais, les gens parlent bien anglais. Je me sens vraiment bien en Suède, un pays souvent comparé au Canada », a raconté Marshall qui est installé tout près de la frontière du Danemark et de plusieurs autres nations européennes.

Au niveau sportif, l’aventure s’annonçait palpitante puisque son équipe d’adoption vient de réintégrer la Ligue élite suédoise. Ceci dit, ça ne garantissait pas qu’il allait développer des affinités avec son nouveau groupe.

« Je me donnais un an pour déterminer si j’allais aimer ça. Je me disais que je n’avais qu’à revenir si ça ne marchait pas, que la glace était trop grande ou que je m’ennuyais. Je suis bien tombé », a confié le gaucher de six pieds un pouce et 200 livres.

Sans surprise, le club orné de vert et de blanc ne se classe pas parmi les puissances du circuit en 2015-16. Ça ne l’empêche pas de s’amuser avec ses coéquipiers européens et les trois Américains (Jordan Lavallée-Smotherman, Jack Connolly et Taylor Matson) de la formation.

En fait, dans le temps de le dire, Marshall est devenu l’un des joueurs les plus appréciés de l’équipe et un meneur dans l’équipe. L’organisation n’a donc pas tardé à lui offrir une prolongation de contrat de deux saisons à son grand bonheur et la personnalité de l’entraîneur Anders Eldebrink a pesé dans l’équation.

« Il a connu une bonne carrière comme défenseur assez offensif et certaines personnes le voient comme une légende du hockey en Suède. Comme entraîneur, il est très positif, il dégage une belle énergie. Il communique bien avec nous et c’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai accepté la nouvelle entente », a précisé le robuste défenseur.

Laissé en plan par les Maple Leafs

Son état d’esprit actuel détonne par rapport à la frustration qui l’habitait lors de ses derniers miles en Amérique du Nord. Il avait déchanté en raison du traitement des Maple Leafs à son endroit.

« Je me disais que j’avais pas mal fait le tour avec Toronto, ils étaient vraiment axés sur le développement. Même si je n’étais âgé que de 25 ans, ils me voyaient comme un vétéran, j’ai été un peu mis de côté dans les plans. Je n’ai pas du tout aimé cette expérience », a admis celui qui a été repêché deux rangs avant nul autre que P.K. Subban.

« Je me suis toujours beaucoup investi dans mes équipes, le sentiment d’appartenance est important à mes yeux. Je n’ai vraiment pas apprécié ce sentiment et je voulais une nouvelle expérience », a exprimé Marshall qui a été rejoint en Suède par sa copine un peu plus d’un mois après son départ.

À bien y penser, le plus étonnant dans l’histoire de Marshall, ce n’est pas l’endroit où il a abouti, mais plutôt le fait qu’il ait convaincu une équipe de haut calibre européen à miser sur lui, un défenseur nettement plus reconnu pour son travail défensif et ses minutes de punition que ses points.

Kevin Marshall

En entendant la question, Marshall sourit.

C’est loin d’être la première fois qu’on lui fait remarquer que les joueurs nord-américains avec des statistiques comme les siennes se trouvent rarement des emplois en sol européen.

« Je suis bien d’accord que ce n’est pas si fréquent, mais mon rôle est sensiblement le même qu’en Amérique du Nord. Je demeure un grand travaillant qui se concentre sur la zone défensive. Je me suis adapté à créer un peu plus d’offensive, malgré le fait que mes statistiques (1 but, 4 passes en 41 parties) ne le prouvent pas vraiment. Je trouve que ma confiance et ma créativité avec la rondelle ont augmenté.

« Comme j’en parlais avec des gens qui m’ont abordé sur le sujet, il y a des joueurs avec des statistiques d’enfer qui arrivent en Europe et ça ne fonctionne pas pour eux. L’inverse se produit aussi. L’année de transition a été très importante comme c’est le cas pour tous ceux qui font le saut en Europe », a décortiqué l’athlète qui a évolué pour les MAINEiacs de Lewiston pendant trois saisons.

« Même si je n’ai pas les plus grosses statistiques, j’ai réussi à m’adapter et je me sens bien sur la glace. Dans le fond, ça dépend ce qu’on fait de son opportunité », a conclu Marshall qui prouve son point.