MONTRÉAL - Si le Canadien était toujours l’une des organisations phares de la LNH, s’il flirtait avec le premier rang du classement général ou simplement celui de sa division au lieu de croupir dans la cave et d’afficher quelques-unes des pires statistiques du circuit, la Ligue reporterait le match de samedi au lieu d’envoyer le Tricolore au bûcher, en Floride, contre les Panthers.

 

En fait, si Gary Bettman tenait vraiment à respecter l’intégrité de sa Ligue, à respecter le moindrement le niveau de compétition de la meilleure ligue de hockey au monde, le commissaire annulerait illico cette partie.

 

Pourquoi?

 

Parce qu’à l’impossible, nul n’est tenu.

 

Le Canadien joue du hockey affreux depuis le début de la saison. Il a accumulé les revers et multiplié les mauvais matchs alors que Dominique Ducharme avait sous ses ordres un club de la LNH. Un club privé de Shea Weber, Carey Price, Joel Edmundson et quelques autres piliers, c’est vrai, mais un club de la LNH quand même.

 

Jeudi soir en Caroline, le Canadien ne formait pas un club de la LNH. Après le retrait de dernière minute de Jonathan Drouin – l’ailier gauche a déclaré forfait après l’échauffement en raison d’un malaise «non-covidien» –  et la perte de Brendan Gallagher qui a quitté après deux périodes, le Canadien ne respectait même plus les conditions minimales exigées par la LNH dans le cadre des matchs préparatoires.

 

Pour afficher un minimum de respect à l’égard des amateurs qui viennent assister à ces matchs présaison, matchs qui ont de match que le nom, la Ligue impose à ses 32 équipes «d’habiller» huit vétérans.

 

Selon les dispositions de la convention collective, sont considérés vétérans:

 

  • Les joueurs qui ont un minimum de 100 matchs d’expérience dans la LNH ou qui ont disputé 30 matchs la saison précédente;

 

  • Les gardiens qui ont disputé 30 matchs la saison précédente ou qui ont été en uniforme pour un minimum de 50 matchs en carrière.

 

  • Les choix de première ronde de l’année courante.

 

Brendan Gallagher, Cédric Paquette, David Savard, Brett Kulak, Nick Suzuki, Jake Evans et Alexander Romanov étaient les seuls patineurs à respecter ces conditions jeudi soir.

 

Samuel Montembeault, qui n’a que 35 sorties officielles en carrière, mais qui a franchi le cap des 50 matchs en uniforme en raison des parties au cours desquelles il était auxiliaire en Floride et à Montréal s’ajoutait à la liste.

 

Après les forfaits de Drouin et Gallagher, David Savard (3,5 millions $) et Brett Kulak (1,85 million $) étaient les seuls joueurs à franchir la barre du million en salaire annuel chez le Canadien.

 

La masse salariale totale du club qui a terminé la rencontre s’élevait donc à 18,9 millions $. C’est 41,3 millions $ de moins que le plancher salarial (60,2 millions $) établi cette saison dans la LNH. C’est 62,6 millions $ de moins que le plafond salarial. Plafond avec leurs adversaires de jeudi en Caroline flirtent cette saison.

 

Samedi, à Sunrise, si la Ligue ne reporte pas le match Canadien-Panthers d’ici là, le Tricolore comptera encore sur un club qui ne respectera pas, ou respectera tout juste, les exigences minimales imposées pour un match préparatoire.

 

Je veux bien croire que Gary Bettman a déjà 82 parties à reprendre et que ce sera tout un casse-tête de réintégrer ces rencontres au calendrier.

 

Je veux bien croire que le Canadien est moribond cette année et que ses chances de battre les Panthers, en Floride, dans des conditions plus normales seraient déjà bien minces.

 

Mais quand même : un duel Canadien-Panthers dans les conditions actuelles qui minent le Canadien minerait aussi la crédibilité de la Ligue et surtout l’intégrité du niveau de compétition qu’elle doit maintenir.

 

Ça n’excuse pas tout!

 

Le fait que le Canadien soit enlisé comme il l’est dans les blessures et les infections à la COVID doit être pris en considération dans l’analyse du revers de 4-0 encaissé jeudi en Caroline. Un troisième par jeu blanc cette saison

 

Le contraire serait injuste, voire malhonnête.

 

Mais attention! Cette situation, aussi difficile soit-elle, n’explique pas tout. Elle n’excuse pas tout non plus.

 

Elle n’explique pas le fait que le Canadien qui est passé à 20 secondes de battre le Lightning, à Tampa Bay, pas plus tard que mardi, s’est fait manger tout rond par les Hurricanes jeudi. Que les jeunes qui se sont signalés par les efforts déployés et le travail abattu tout au long de la rencontre de mardi se sont fait beaucoup plus discrets jeudi.

 

Elle n’excuse pas le fait qu’en dépit du peu de chances qu’ils avaient de sortir avec une victoire ou simplement un autre point prime obtenu dans le cadre d’un revers encaissé en prolongation ou tirs de barrage, les joueurs présents devaient offrir le maximum qu’ils avaient à offrir. Ils devaient limiter les erreurs. Limiter les cadeaux offerts à un club qui n’avait vraiment pas besoin de cadeaux pour mousser ses chances de gagner.

 

Et ça, le Canadien ne l’a pas fait en Caroline.

 

Un Bing! qui a réveillé les Canes

 

Contre des Hurricanes qui n’avaient pas joué depuis 12 jours et qui n’avaient pas le début d’un commencement de raison de craindre un adversaire décimé par les blessures et la COVID, le Canadien devait compter sur l’effet de surprise, sur beaucoup de travail efficace et aussi sur beaucoup de chance pour espérer gagner.

 

Jake Evans est passé à un cheveu de surprendre les Canes lorsqu’il a déjoué le gardien Antti Raanta avec un bon tir dès les premières minutes du match.

 

L’ennui, et il est de taille, c’est que ce tir d’Evans a ricoché sur le poteau plutôt qu’atteindre le fond du filet. Au lieu de mettre les Canes un peu plus sur les talons qu’ils ne l’étaient depuis le début de la rencontre en marquant le premier but, le tir d’Evans a plutôt réveillé les Hurricanes.

 

Car après le «Bing!» qui a résonné aux quatre coins du PNC Arena lorsque la rondelle a touché le poteau à la gauche du gardien Raanta, ses coéquipiers ont pris le contrôle du match. Ils ne l’ont ensuite jamais perdu.

 

Il faut dire que le Canadien n’a rien fait pour aider sa cause.

 

Contre un club qui était déjà dans le top-10 de la Ligue en avantage numérique et qui affichait sept buts marqués en 19 occasions obtenues lors de ses huit derniers matchs (36,8 %), le Canadien a offert cinq attaques massives.

 

Les Canes ont marqué trois fois.

 

C’était la troisième fois cette saison – à Buffalo le 14 octobre et à Los Angeles le 30 octobre – que le Canadien accordait trois buts en désavantage numérique au cours d’une seule et même partie.

 

Il a perdu les trois fois!

 

Contre un club qui occupait le 2e rang de la LNH en désavantage numérique et qui était parfait (14 pénalités consécutives écoulées sans accorder de but) à ses cinq derniers matchs, le Canadien n’a pas seulement été blanchi en cinq occasions, mais il a même été victime d’un but.

 

C’était la troisième fois cette saison – à Buffalo le 26 novembre et contre Colorado le 2 décembre – qu’il concédait un but bien qu’il évoluait en attaque massive.

 

Il a perdu les trois fois!

 

Ce bilan des unités spéciales vous donne une très bonne idée de l’allure du match.

 

Avec leur victoire de 4-0 – un deuxième gain par jeu blanc cette saison – les Hurricanes ont amélioré leur fiche en 2021. Forts de 58 gains en 85 matchs de saison régulière disputés cette année (57-19-9) les Canes présentent la meilleure fiche de la LNH au grand complet depuis le 1er janvier 2021.

 

Ces 58 gains, les 125 points récoltés et un taux de réussite de ,735 représentent des records pour cette équipe qui est bien plus qu’une «bande de couillons» comme Don Cherry avait surnommé les Canes – Bunch of Jerks – il y a quelques années.

 

On se console comme on peut!

 

L’entraîneur-chef Dominique Ducharme et les joueurs qui ont défilé au podium après la rencontre se sont assurés de rappeler à tout le monde qu’ils n’avaient pas accordé de but à cinq contre cinq. Qu’ils avaient fait de bonnes choses à forces égales.

 

Je veux bien. Mais il s’agit là d’une bien mince consolation. Surtout qu’ils n’en ont pas marqué non plus! Mais bon, dans la situation actuelle, on se console comme on peut il faut croire…

 

Outre le poteau frappé par Evans en début de match, Cédric Paquette, deux fois, Lukas Vejdemo et Kale Clague ont été les seuls à obtenir de bonnes occasions de marquer sur les 41 tirs décochés (26 cadrés) jeudi.

 

Les Canes en ont obtenu une bonne douzaine de plus sur les 60 tirs qu’ils ont décochés dont 36 ont atteint la cible.

 

Moins fumant qu’il ne l’avait été mardi, à Tampa, le gardien Samuel Montembeault a quand même réalisé quelques arrêts solides. Il a été le meilleur joueur du Canadien jeudi.

 

D’où viendra le renfort maintenant?

 

Si la LNH maintient le match de samedi après-midi au calendrier et que Jonathan Drouin et/ou Brendan Gallagher ne peuvent endosser l’uniforme, le Canadien aura besoin de renfort.

 

D’où viendra-t-il?

 

Pour le moment, le Tricolore n’a qu’un seul joueur disponible au sein du club de réserve: l’attaquant Cameron Hillis.

 

Il pourra toujours lancer un SOS à Jean-Sébastien Dea qui est le seul attaquant encore disponible (contrat de la LNH) avec le club-école de Laval. Jan Mysak, qui évolue avec les Bulldogs d’Hamilton dans la Ligue de l’Ontario et qui défendait les couleurs de sa Tchéquie natale au Championnat du monde de hockey junior, pourrait être rappelé par mesure d’urgence.

 

À la ligne bleue, le Canadien peut toujours compter sur Xavier Ouellet, le capitaine du Rocket de Laval. Il pourrait aussi aller du côté de la Ligue canadienne en cas d’urgence et faire appel à Arber Xhekaj ou même Kaiden Guhle. Dans le cas du premier choix de l’été dernier, le Canadien devrait toutefois d’abord lui faire signer un contrat d’entrée dans la LNH.

 

Entre les lignes

 

  • Le Canadien a connu, jeudi, son pire match de la saison aux cercles des mises en jeu avec seulement 17 duels gagnés sur les 60 disputés. Le taux de réussite de 28 % est le plus bas cette année…

 

  • Nick Suzuki (4 en 18) et Jake Evans (6 en 18) ont été les principales victimes de Jordan Staal (17 en 21), Vincent Trocheck (10 en 12) et Sebastian Aho (6 en 8)…

 

  • Jesperi Kotkaniemi – une passe, trois tirs et six mises en échec en 17 présences totalisant 13 min 11 s de temps d’utilisation – a été parfait (3 en 3) aux cercles des mises en jeu contre son ancienne équipe…

 

  • Le 30 octobre à Anaheim, le Canadien n’avait gagné que 29 % des mises en jeu disputées (14 gagnées sur les 49 disputées) dans un revers de 42 encaissé aux mains des Ducks…

 

  • Avec ses deux passes récoltées jeudi, Sebastian Aho a prolongé à six sa séquence de matchs consécutifs avec au moins deux points. Il revendique cinq buts et 14 points au fil de ces six parties…

 

  • Aho est le troisième joueur de l’histoire des Hurricanes et des Whalers à réaliser cet exploit après Mike Rogers (19791980) et Kevin Dineen (1988-1989)…

 

  • Le Canadien a accordé le premier but pour la 21e fois en 33 matchs cette saison. Sa fiche en pareille circonstance : 218-1-0

 

  • Le Canadien est toujours en quête d’une première victoire et même d’un premier point cette année (019-0-0) dans le cadre des matchs au cours desquels il a accusé un recul de deux buts...