LAVAL – Qu’a fait Ryan Poehling aujourd’hui? Si vous adhérez à la théorie de Joël Bouchard, vous pourriez avoir votre réponse vers le début du mois de décembre, lorsque la prochaine saison de la Ligue nationale de hockey prendra son envol.

Bouchard a rencontré les médias vendredi dans le cadre d’une clinique de sang à laquelle s’est associé le Rocket de Laval. L’entraîneur-chef du club-école du Canadien n’est pas du genre à s’apitoyer sur son sort. Si la vie lui donne des citrons, il y a de bonnes chances qu’il les mette en rang sur la ligne bleue pour pratiquer son lancer frappé. Les excuses, même en temps de pandémie, très peu pour lui.

Au cours des derniers mois, Bouchard s’est gardé occupé en s’impliquant comme à chaque été dans l’Académie de hockey qui porte son nom. Il a été présent dans l’entourage de l’Armada de Blainville-Boisbriand, le club junior dont il est encore propriétaire. Il a aussi regardé des matchs, beaucoup de matchs. Des matchs en direct, d’autres sur bandes vidéo. Il a épié des joueurs, les siens et ceux des autres. 

« Des fois les gens pensent que le temps, c’est négatif. Mais ça peut être positif si tu l’utilises correctement, a établi Bouchard. C’est vrai pour les entraîneurs, mais aussi pour les joueurs. S’ils sont capables de maximiser leur temps, de rester occupés et surtout de faire quelque chose pour devenir meilleurs... C’est toujours mon message quand je leur parle - et je suis en communication constante avec eux autres : "Qu’est-ce que tu vas faire que l’autre ne fera pas?" C’est toujours ça. Aller chercher le "edge", ce qui va faire que tu vas t’améliorer. »

En anglais, un peu plus tard, le coach a illustré sa pensée avec cette question : « tu fais quoi pendant que quelqu’un d’autre fait des push-ups dans son garage? » 

Bouchard, il faut le dire, ne parlait pas précisément de Poehling à ce moment. Mais les questions ont rapidement dévié vers l’ancien choix de première ronde du Canadien. L’association était naturelle. Quand les joueurs du Canadien sont revenus à Montréal afin de se préparer à la relance de la saison, cet été, Poehling a lui-même admis qu’il ne s’était pas tué à l’entraînement durant le confinement qui avait suivi la suspension des activités de la LNH. 

Visiblement, cette stratégie n’a pas été payante à court terme. Dans la bulle torontoise, où le Canadien a surpris les Penguins de Pittsburgh avant d’être éliminé par les Flyers de Philadelphie, l’attaquant de 21 ans a été le seul joueur, parmi tous ceux qui étaient à la disposition des entraîneurs, à ne pas endosser une seule fois l’uniforme. On lui a notamment préféré Alex Belzile, un bourlingueur de 29 ans qui n’avait jamais joué dans la LNH, et Charles Hudon, qui ne fait vraisemblablement plus partie des plans du club.

« Je ne peux pas parler de sa condition physique parce que je n’étais pas là avec le Canadien. [...] Mais je l’ai senti que sa première année professionnelle a été une année assez différente de ses années amateurs, a euphémisé Bouchard. C’est pareil pour tous les jeunes joueurs. La première année professionnelle, c’est beaucoup de mouvements, beaucoup d’émotions, beaucoup de défis. On a eu des bonnes discussions là-dessus. » 

Des modèles positifs 

S’il est prêt à prendre les moyens pour remonter les échelons à Montréal, Poehling est entouré d’exemples dont il peut s’inspirer. Pendant qu’il était confiné aux gradins à Toronto, il a pu assister à la renaissance de Jesperi Kotkaniemi, un jeune qui semblait complètement perdu quelques mois plus tôt et qui s’est retrouvé avec un rôle de premier plan dans le bref parcours du CH. 

Ces deux joueurs ont été affectés par les blessures, mais ont aussi donné aux observateurs des raisons de douter de leur éthique de travail depuis le début de leur jeune carrière. 

« Quand quelqu’un vit une situation semblable à la tienne, c’est toujours un point de repère positif, croit Bouchard. C’est aussi arrivé à des joueurs qui sont avec le Canadien. Demandez à Philip Danault, je suis sûr qu’il a eu des moments plus difficiles en début de carrière où le hockey professionnel lui a posé des défis. Ryan n’est pas différent et ce n’était pas négatif pour moi de voir qu’il apprenait des nouvelles choses dans un nouveau calibre et un style de jeu complètement différent du hockey universitaire. Et tu as raison, le fait de voir comment Kotkaniemi a réagi en séries éliminatoires, je pense que c’est positif pour lui. »

Bouchard note que la saison 2019-2020 n’a pas été qu’un échec sur toute la ligne pour le patineur du Minnesota. Il a joué 27 matchs de saison régulière dans la LNH, un bagage précieux nonobstant sa productivité sous les attentes. Il a aussi traversé de bonnes séquences au fil des 36 matchs qu’il a disputés dans la Ligue américaine. 

Et côté attitude, Bouchard insistera à quelques reprises : il ne voit rien qui cloche avec Poehling. 

« Les gars vont tous fesser le mur à moment donné dans leur première année professionnel. Il y en a qui le gèrent un peu mieux que d’autres. Mais il n’y a absolument rien d’anormal pour un jeune joueur que le pro le challenge à sa première année. Ça ne sera pas le premier ni le dernier. »

« Je ne crois pas qu’il y a ait de doute, conclut l’entraîneur. Je n’étais personnellement pas dans la bulle, mais [les entraîneurs] avaient des décisions à prendre. [Jake] Evans a très bien joué, Belzile a très bien joué. [Poehling] a 21 ans. Vous en faites une plus grosse histoire que ce l’est pour moi. Il apprend simplement à manœuvrer dans le monde du hockey professionnel. »