MONTRÉAL - Lors de son bilan, Marc Bergevin a reconnu, sans détour, que la relève du Canadien ne comptait pas sur un « gros joueur de centre » prêt à faire le saut dans la LNH dès la saison prochaine. Mais, à plus long terme, il y a un espoir, Matt Bradley, qui pourrait venir compenser des lacunes à cette position sauf que son potentiel ne fait pas l’unanimité.

En regardant le côté positif de cette possibilité, on constate que Bradley vient de conclure sa troisième saison régulière (son année de 19 ans) dans l’uniforme des Tigers de Medicine Hat avec une récolte de 34 buts et 43 aides (77 points) en 70 parties.

Il s’agit d’une production appréciable pour ce choix de cinquième ronde du Tricolore en 2015.

De plus, un premier recruteur sondé sous le couvert de l’anonymat a vanté sa progression et l’amélioration de son rendement défensif alors que son différentiel est passé de -16 à +23 par rapport à la saison précédente.

Par contre, le côté négatif de l’équation n’est pas minime.

Tout d’abord, le Canadien n’a pas encore officiellement mis sous contrat Bradley ce qui ne dénote aucun empressement de l’organisation. Les deux clans peuvent s’entendre jusqu’au 1er juin pour qu’il demeure associé à Montréal.  

Ensuite, deux autres dépisteurs consultés ont émis des réserves sur ses chances de s’établir dans la LNH.

« Il aura bien des choses à prouver pour être capable de jouer dans la LNH. Il devra passer par la Ligue américaine et améliorer considérablement son patinage », a confié une source d’une équipe de l’Association ouest de la LNH.

Les évaluations d’une autre équipe de l’Ouest ont révélé ceci.

« On aurait cru qu’il allait amasser plus de points au niveau junior. C’est un joueur intelligent, mais dont la vitesse est limitée. Il devra rester dans la Ligue américaine pendant plus d’une saison pour développer sa force et sa rapidité. Il demeure un long shot pour jouer dans la LNH. »

Quant à son physique, il se situe à six pieds et 195 livres selon les dernières informations ce qui ne fait pas de lui un colosse ni un petit joueur. 

Mais, en fin de compte, qu’en pense le principal intéressé ?

« Je sais que la route vers la LNH sera exigeante et longue, mais je vais m’y rendre. Ça ne me dérange pas ce que les autres peuvent penser. Je dois croire en mes moyens », a admis celui qui a ajouté neuf points en onze matchs éliminatoires.

Question de garder la foi, il pourra s’inspirer de conseils de Brendan Gallagher, un autre choix de cinquième ronde du Canadien en 2010.

Matt Bradley« On est devenus des amis via son frère, ça peut certainement m’aider », a convenu Bradley qui s’entraîne avec le paternel de cette famille.

En ce qui concerne le jeu de patience dans lequel il est plongé à propos de son premier contrat professionnel, Bradley reconnaît que la nervosité commence à se faire sentir.

« Oui, un peu. Évidemment, j’aimerais beaucoup signer un contrat prochainement, c’est ce que je souhaite », a commenté Bradley qui a accepté la demande d’entrevue malgré des vacances à l’extérieur du pays.

Son entraîneur, Shaun Clouston, vient de compléter sa septième saison aux commandes des Tigers et il agissait en tant qu’adjoint auparavant. Depuis son arrivée avec l’organisation en 2003-2004, il a épaulé quelques joueurs qui ont accédé à la LNH comme Cam Barker, Darren Helm, Kris Russell et Tyler Ennis.

Clouston peine à expliquer la raison pour laquelle Bradley n’a pas encore de contrat en poche.

« Il a un bon physique, de bonnes habiletés et il a amassé des chiffres intéressants. Il n’est pas au sommet de la ligue pour les gars offensifs, mais plus de 30 buts, c’est pas mal bon dans la WHL. C’est un peu surprenant, mais ça demeure un milieu très compétitif. Ceci dit, il reste quelques semaines et je m’attendrais à le voir signer », a exprimé Clouston.

Lorsqu’on l’invite à utiliser son expérience pour évaluer les chances de son protégé de s’établir dans la LNH, il n’enfile pas ses lunettes roses.

« Je crois que Matt sera capable de jouer, je le pense vraiment. Parfois, ça peut prendre un peu plus de temps et je ne serais pas en désaccord avec ceux qui pensent qu’il pourrait avoir besoin d’une autre année à notre niveau. Il peut encore progresser et, idéalement, quand tu quittes le junior, tu veux vraiment être au sommet de ton jeu. Il n’emprunte peut-être pas la voie rapide comme certains phénomènes qui sont déjà dans la LNH à son âge. Mais, s’il est prêt à investir beaucoup de travail comme il le fait présentement, je ne crois pas qu’il ait atteint son plein potentiel », a décrit Clouston.

Pour l’instant, Bradley lorgne plutôt vers la Ligue américaine de hockey. Il considère que sa place serait à cet endroit en raison de sa progression des derniers mois.

« Je trouve que j’ai fait de gros pas cette saison. Les points étaient au rendez-vous, mais mon jeu était surtout meilleur et nettement plus constant que dans les années précédentes », a mentionné le droitier qui souhaiterait devenir un prochain Brandon Saad (24 buts et 29 aides avec Columbus en 2016-2017).

« Je me suis vraiment concentré sur rehausser mon jeu défensif cette année. Les autres équipes n’ont pas compté contre moi pendant les 20 premiers matchs de la saison, j’étais plutôt content de ça », a ajouté Bradley qui dit avoir amélioré sa vitesse.

Le recruteur amateur qui a été le plus élogieux à son endroit a remarqué cette transformation dans son jeu.

« Aucun doute, il a gagné en confiance et il s’est nettement amélioré défensivement. Ça lui arrivait de tricher offensivement quand il était plus jeune comme plusieurs le font », a exposé cet intervenant qui a vu Bradley en action sept ou huit fois cette saison.

« C’est un joueur énergique et rapide avec un très bon lancer. Il est davantage reconnu comme un marqueur qu’un fabricant de jeux. Son premier réflexe est plus de lancer que de passer. Ce seront des atouts qui vont l’aider dans son chemin vers la LNH », a poursuivi cet ancien joueur universitaire américain.

Un véritable centre ?

Le parcours montréalais d’Alex Galchenyuk provoque des craintes quant à la véritable position des joueurs. Dans le cas de Bradley, le poste de centre lui sied selon les observations les plus récentes.

« Il était un centre pour nous cette saison. Il a un peu joué à l’aile auparavant avec notre équipe, mais pas cette année. Je le verrais comme un joueur assez responsable pour être au centre tout en pouvant se déplacer à l’aile à l’occasion », a jugé Clouston.

Bradley, qui a terminé 25e buteur et 30e pointeur de la WHL, a d’ailleurs mérité le prix du meilleur attaquant pour sa contribution en défense au sein de sa formation.

Pour l’instant, seulement deux joueurs repêchés après lui en 2015 ont vécu leur baptême de la LNH. Il s’agit du défenseur Markus Nutivaara (7 points en 66 matchs avec Columbus) et de l’attaquant Dominik Simon (5 matchs avec Pittsburgh). Cette année-là, Montréal avait aussi repêché Noah Juulsen en 1re ronde, Lukas Vejdemo en 3e ronde, Simon Bourque en 6e ronde et Jeremiah Addison en 7e ronde.