MONTRÉAL – En tant que directeur général du Canadien, Marc Bergevin ne peut pas se laisser aveugler par le cinquième rang de son équipe, il doit avoir une vision d’ensemble du portrait. Ainsi, il a dû procéder à une décision d’affaires à propos de Paul Byron et il a reconnu qu’il fait partie du lot des joueurs, avec Tomas Tatar et Phillip Danault, qui doivent retrouver leur élan. 

Le geste se comprenait aisément en raison du contrat de Byron qui lui rapportera 3,4 millions cette saison et les deux années subséquentes. 

« Quand tu soumets le nom d’un joueur au ballottage, il y a toujours un risque. Avec la situation financière de toutes les équipes et le plafond salarial qui demeurera probablement inchangé pour les deux, trois et peut-être quatre prochaines années, on réalise de plus en plus que les équipes ne prennent pas de risques avec les joueurs qui ont un long contrat. C’est le cas pour Paul », a constaté Bergevin alors que cette décision permet d’économiser un peu plus de 9000$ par jour quand le nom de Byron n’apparaît pas sur la formation active du CH.  

« C’est un outil dont on doit se servir. En étant une équipe très proche du plafond salarial, on a vu une occasion d’en profiter. C’est une nouvelle réalité dans la LNH pour les équipes et les joueurs. De plus en plus de joueurs vont passer au ballottage pour cette raison », a poursuivi le directeur général qui a répondu aux questions des médias pendant une quarantaine de minutes. 

Cela dit, ça ne se résume pas à une décision administrative. Si les nouvelles acquisitions de Bergevin rapportent des dividendes jusqu’ici, quelques vétérans de la troupe montréalaise traversent un ralentissement. 

Byron n’y échappe pas. Son jeu est épluché par Claude Julien et ses adjoints, mais Bergevin s’est également assuré de lui passer le message. 

Marc Bergevin décortique le début de la saison

« Je lui ai parlé personnellement et je m’attends à plus de sa part. Je sais ce qu’il accomplit sur la glace quand il est au sommet de son art », a précisé le DG alors que Byron est le premier à reconnaître ses torts. 

Dans cette équation, il ne faut pas oublier que Byron s’est vu confier un « A » sur son chandail, une reconnaissance qui ne doit pas lier les mains de personne. 

« Il y a le côté humain et le côté des affaires. Avec Paul, je devais prendre une décision d’affaires et on était loin sous le plafond salarial dans les dernières années donc c’était facile à gérer. Désormais, c’est plus exigeant parce qu’on veut avoir une bonne équipe et on souhaite disposer d’une marge de manœuvre autant pour la date limite des transactions que pour des bonis qu’on pourrait avoir à verser à des joueurs sans toucher au coussin qui ferait baisser notre enveloppe salariale la saison suivante. En tant que DG, on doit parfois y aller de décisions difficiles », a reconnu Bergevin. 

Un rendement lié à leur dernière année de contrat ? 

Le sujet tracasse les fidèles du CH depuis déjà un certain temps, mais il est difficile de ne pas se demander si le rendement moins affûté de Danault et Tatar est directement lié au fait qu’ils écoulent la dernière saison de leur contrat.  

« Aucune idée, c’est plus une question pour les joueurs, mais je ne vois pas ça ainsi », a réagi Bergevin en citant l’exemple de Joel Armia qui se débrouille bien dans des circonstances similaires. 

Outre de souligner qu’il s’attendait à plus de sa part, Bergevin ne s’est pas trop étendu sur ses exigences envers Danault. En ce qui concerne Tatar, c’était facile de lire entre les lignes pour comprendre que l’attaquant slovaque ne se sacrifie pas assez, présentement, pour la cause collective. 

« Claude a parlé avec Tomas. Oui, c’est important de compter des buts, mais il y a de petits détails qui sont importants et qui te permettent de marquer des buts. Quand on ne fait pas ces petites choses, c’est difficile d’en marquer », a noté Bergevin. 

S’il est reconnu comme un patron proche de ses joueurs, Bergevin ne peut que se rabattre à l’implacable logique du hockey pour les minutes accordées par les entraîneurs.  

« L’utilisation repose entre les mains de l’entraîneur. Comme on dit depuis longtemps, ‘Si tu veux jouer, joue mieux’. Ça reste que les entraîneurs sont là pour gagner des matchs. Il faut que le joueur soit en mesure de minimiser ses creux. Maintenant, avec plus de profondeur, les entraîneurs doivent prendre des décisions plus difficiles. Ça ne veut pas dire que Tatar ne sera plus un joueur du Canadien jusqu’à la fin de la saison », a mentionné l’interlocuteur. 

Cette réponse bâtit un lien avec un sujet qui préoccupe certains amateurs, ceux qui souhaiteraient que Julien répartisse moins le temps d’utilisation des attaquants pour maximiser l’emploi de ce ceux qui s’illustrent le plus. 

« Tu peux parler à tous les DG et tous les entraîneurs, la plus belle feuille de match à recevoir, c’est une victoire dans laquelle ton joueur le plus utilisé a passé moins de 20 minutes sur la glace et que ton joueur le moins utilisé a été employé plus de 13 minutes. Ça économise tes joueurs. Éventuellement, ça provoque de l’usure », a statué Bergevin. 

D’ailleurs, on ne peut pas cacher que le Canadien se plongera dans un imposant tourbillon de matchs après cette semaine de répit. Jusqu’au 8 mai – la date prévue pour conclure la saison 2021 – le Canadien ne jouera toujours trois ou quatre matchs par semaine. 

« C’est une semaine importante pour le conditionnement physique et les entraînements. On va gérer le tout au quotidien et on va frapper sur du bois puisqu’on a été chanceux du côté des blessures jusqu’à présent. Je m’attends que ce soit difficile, les joueurs vont se fatiguer avec le voyagement et les nombreux matchs », a admis Bergevin. 

Advenant une séquence moins positive, le CH ne pourra pas multiplier les heures d’entraînement pour corriger les lacunes. 

« Oui, mais on est tous dans le même bateau. Ce sera difficile pour tout le monde. Je présume que les sessions vidéos seront encore plus importantes. Tout de même, comme ancien joueur, j’ai toujours préféré pouvoir exécuter les choses sur la glace ensuite », a dit le DG. 

C’est sans parler de la possibilité que des matchs soient reportés en raison de la COVID-19. La LNH a donc prévu l’option de prolonger la saison, jusqu’à un certain point, après le 8 mai.