MONTRÉAL - Avec le retour de Carey Price après une absence interminable et ô combien médiatisée de neuf mois, il était acquis que l’histoire du match opposant le Canadien aux Islanders serait étroitement liée à la performance du gardien.

 

Ce qui l’était moins, c’est qu’Ilya Sorokin volerait la vedette à Carey Price avec ses 44 arrêts qui lui ont permis de signer une victoire de 3-0. Sa septième par jeu blanc cette saison.

 

Malgré la défaite, Carey Price est loin d’avoir déçu ses partisans qui lui ont réservé un accueil plus que chaleureux au Centre Bell vendredi.

 

Peu avant 16 h 30, lorsqu’il s’est présenté derrière l’amphithéâtre à bord de sa grosse camionnette, plusieurs centaines – ils étaient peut-être même un millier – d’amateurs drapés de bleu, de blanc et de rouge qui l’attendaient depuis un bon moment à l’entrée du garage hurlaient son nom pour lui souhaiter la bienvenue.

 

Ça ne faisait que commencer.

 

Lorsqu’il a sauté sur la patinoire pour la période d’échauffement, il a eu droit à une première ovation.

 

La deuxième qui a salué son retour sur la patinoire pour le début de la rencontre a été plus forte encore.

 

Mais quand Michel Lacroix a complété la présentation de l’alignement de départ en utilisant sa voix puissante pour lancer le nom de Carey Price une première fois cette année, le Centre Bell s’est mis à vibrer comme il ne l’avait pas encore fait cette saison. Le temps de dire: Carey Price, le Centre Bell se retrouvait bercé dans l’ambiance des séries de l’été dernier.

 

À n’en pas douter, les partisans du Canadien s’étaient beaucoup ennuyés de leur gardien et ils tenaient à le lui faire bien comprendre.

 

Ils se sont assurés de bien réussir leur coup en scandant des Carey ! Carey ! Carey ! bien sentis et bien nourris qui ont servi de transition entre l’ovation monstre qu’ils lui ont offert et l’hommage rendu par le Canadien à Michael Bossy dont le décès a été confirmé par sa famille vendredi matin.

 

Les célébrations visant à souhaiter la bienvenue à Price ont repris dès le début de la rencontre. À la moindre occasion s’offrant à eux, les partisans entonnaient en chœur des Carey ! Carey ! Carey !

 

Le problème, c’est que les occasions se sont faites plutôt rares.

 

De quoi rendre Allen et Montembeault jaloux

 

Pour la première fois depuis un sapré bout de temps, pour une très rare fois cette saison, le Canadien a pris le plein contrôle de la patinoire en début de rencontre. Non seulement a-t-il multiplié les poussées en territoire ennemi, mais il a tellement bien protégé son territoire que les deux premières ovations accordées à Price l’ont été sur des tirs non seulement anodins, mais qui étaient en plus hors cible.

 

Il était clair que les joueurs du Tricolore s’étaient donné comme mission de tout faire pour faciliter le retour au jeu de leur grand gardien.

 

Parce qu’ils n’avaient pas d’arrêts magistraux à saluer, les amateurs ont été contraints à se rabattre sur une sortie de son filet au cours de laquelle le gardien a rappelé son grand talent pour relancer les attaques pour scander d’autres Carey !

 

Un peu plus et ils se mettaient à ovationner les déplacements vifs et précis qu’il effectuait pendant les rares incursions des Islanders en guise de préparation à bloquer des tirs qui ne venaient pas.

 

Après deux périodes, Carey Price n’avait affronté que 12 tirs. Du nombre, un bon tir des poignets d’Anders Lee que Price a repoussé avec son bouclier et un autre décoché de la pointe qui a donné un brin d’ennui au gardien qui avait la vue partiellement voilée par Chris Wideman et Kyle Palmieri qui se bataillaient devant lui pouvaient être considérés comme de bonnes occasions de marquer.

 

Tout était tellement facile pour Price, qu’on pouvait facilement imaginer les gardiens Jake Allen et Samuel Montembeault se grattant la tête en se demandant pourquoi diable cette équipe les a si souvent laissés se faire canarder par leurs adversaires au fil de la saison.

 

Non seulement les joueurs du Tricolore n’avaient rien donné à l’adversaire après 40 minutes, ou si peu, mais leurs 30 tirs obtenus au cours des deux premiers tiers et les très bonnes occasions de marquer multipliées au cours des deux premières périodes permettaient de croire que le gros but s’en venait.

 

Ce gros but est effectivement venu. Il est venu dès les premiers instants de la troisième. Mais il est venu des Islanders et non du Canadien alors qu’une bévue du jeune défenseur Corey Schueneman a ouvert la voie toute grande à une échappée de trois joueurs des Islanders face à Carey Price.

 

Et pas les moindres alors que Mathew Barzal, Zach Parise et Kieffer Bellows se sont échappés.

 

«J’ai été complètement pris de court lorsque j’ai réalisé que nous étions trois en échappée. La seule chose que je me suis dite est : assure-toi de ne pas perdre la rondelle ou de tenter un jeu trop risqué et perdre la rondelle», que Mathew Barzal a expliqué après la rencontre.

 

Après avoir reçu une passe de Zach Parise en entrée de zone du Tricolore, Barzal a décidé de retourner la rondelle vers Parise qui a facilement déjoué Price qui ne pouvait rien sur la séquence.

 

Malgré la domination totale et entière du Canadien, voilà que les Islanders étaient avant.

 

Cent quatre secondes plus tard, Noah Dodson a doublé l’avance de son équipe. Il a déjoué Price avec un tir solide et précis qui a frappé le poteau à la droite du gardien avant de ricocher dans le fond du filet.

 

Le Canadien a maintenu sa pression à l’attaque. Il a continué à canarder Ilya Sorokin sans arriver à le déjouer. Bon ! Rem Pitlick y est arrivé en milieu de troisième, mais son tir du revers a atteint le poteau et la rondelle s’est retrouvée dans le coin de la patinoire plutôt qu’au fond du but.

 

Après un troisième but marqué dans un filet désert, les partisans se sont assurés de faire comprendre à Carey Price que l’issue du match comptait beaucoup moins que son retour tant attendu devant sa cage.

 

C’est d’ailleurs au rythme des Carey ! Carey ! Carey ! que les dernières secondes de la rencontre se sont écoulées.

 

Malgré la défaite, Price a admis que l’accueil des partisans l’avait comblé.

 

Combien de fois encore reviendra-t-il devant son filet d’ici la fin de la saison ? La décision viendra du principal intéressé. S’il est acquis qu’il n’affrontera pas Alexander Ovechkin et les Capitals dans le cadre d’un deuxième match au Centre Bell en 24 heures et qu’au mieux il partagera le travail lors de la dernière séquence de deux matchs en deux soirs du Canadien, ça laisse cinq matchs potentiels à Carey Price pour démontrer qu’il est non seulement remis des contrecoups de sa blessure et de ses ennuis personnels qui l’ont contraint à avoir recours au programme d’aide de la LNH et de l’Association des joueurs, mais qu’il sera en mesure de revenir en force en forme la saison prochaine.

 

Est-ce que ce sera à Montréal où ailleurs dans la LNH si Price décidait d’accepter une transaction lui donnant l’occasion de se battre à nouveau pour la coupe Stanley avec une formation mieux nantie que le Canadien qui sera encore en mode reconstruction l’an prochain ?

 

Il est trop tôt pour le savoir.

 

Ce qui est clair toutefois, c’est que les partisans qui l’attendaient à son arrivée au Centre Bell vendredi après-midi, qui l’ont ovationné à tout rompre avant le match et qui ont scandé des Carey ! Carey ! Carey ! à la moindre occasion qu’ils avaient de le faire lui ont clairement indiqué que c’est à Montréal, dans l’uniforme du Canadien, qu’ils tenaient à le voir jouer.

 

Trotz encense Sorokin

 

Si les partisans du Tricolore s’attendaient à ce que Carey Price soit le centre d’attention au Centre Bell, vendredi, Barry Trotz s’est dit nullement surpris de voir Ilya Sorokin voler le match et la vedette au gardien du Canadien.

 

«Il nous donne du hockey de cette qualité depuis le début de la saison. Et ce soir, il a encore été sensationnel», a indiqué l’entraîneur-chef des Islanders.

 

Avec son septième jeu blanc de la saison, Ilya Sorokin a égalé le record d’équipe que partageaient Glen «Chico» Resh (1975-1976) et Semyon Varlamov (l’an dernier).

 

Et ce n’est pas tout : après avoir établi un sommet personnel en carrière, mardi, avec 47 arrêts qui ont permis aux Islanders de battre les Penguins 5-4 en tirs de barrage, Sorokin en a ajouté avec ses 44 arrêts aux dépens du Canadien vendredi.

 

«Il est sur une lancée», que Barry Trotz a convenu sans toutefois indiquer s’il avait l’intention d’améliorer une fois encore ce record personnel et lui offrant le match de dimanche alors que les Islanders rendront visite aux Maple Leafs à Toronto.

 

«C’est «Varly» -- Semyon Varlamov – qui devait jouer ce soir. Il a été victime de malaises qui nous ont obligés à changer les plans. Malgré le fait que nous étions dans un deuxième match en deux soirs, j’avais entièrement confiance en Ilya. Il a sept jeux blancs à sa fiche, mais il pourrait en avoir facilement trois ou quatre de plus si nous n’avions pas bousillé quelques-unes de ses sorties en donnant des buts faciles à des adversaires en fin de match avec des erreurs grossières. À mes yeux, Ilya devrait être dans la course au trophée Vézina au même titre que le gardien des Rangers – son compatriote Igor Shesterkin – car il nous offre du hockey de la même qualité», a plaidé Barry Trotz qui s’attendait à une sortie solide du Canadien.

 

«La seule chose qui m’inquiétait en vue du match de ce soir était le niveau d’émotion du Canadien en raison du retour au jeu de Price. Il y avait beaucoup d’ambiance dans le Centre Bell. Je savais que cela aiderait le Canadien et cela a certainement contribué au fait qu’ils nous ont complètement dominés au niveau hockey. Mais le Canadien ne nous a pas dominés en matière de résilience. Nos gars ont déployé beaucoup d’effort, d’énergie et de conviction en bloquant des tirs et en résistant comme ils le pouvaient aux attaques soutenues du Canadien. C’est une grosse victoire pour nous», a conclu le coach des Islanders.

 

À la douce mémoire de Mike Bossy

 

Bien qu’ils ne l’ont jamais vu jouer et qu’ils ne l’ont pas beaucoup côtoyé, les jeunes Islanders tenaient à gagner pour honorer la mémoire de Mike Bossy dont le numéro 22 avait été cousu tout juste à côté du numéro 9 de son ancien compagnon de trio Clark Gillies décédé plus tôt cette saison.

 

«Le fait d’avoir ces numéros sur nos chandails nous rappelle que ces gars-là nous ont ouvert le chemin. Mike Bossy a non seulement été un grand joueur pour les Islanders, mais il a fait de grandes choses pour la communauté à Uniondale», a indiqué Josh Bailey.

 

«Je ne l’ai pas beaucoup connu, mais mon père – Jean-Paul Parisé – m’a toujours décrit Mike Bossy comme l’un des plus grands marqueurs de l’histoire. La victoire de ce soir était certainement une belle façon de lui rendre hommage», a ajouté Zach Parise.

 

Le jeune Mathew Barzal a partagé avec les journalistes une rencontre qu’il avait eue avec Bossy au tout début de sa carrière.

 

«Il était venu me rencontrer dans le cadre d’une visite des Islanders ici à Montréal. On avait passé une bonne demi-heure ensemble à échanger sur le hockey. Il tenait à me faire comprendre ce que ça représentait d’être un Islander. Il m’avait aussi donné des conseils pour m’aider à composer avec les attentes des partisans et à trouver les moyens de répondre à ces attentes», a indiqué le jeune centre vedette des Islanders.

 

Entre les lignes

 

  • Le différentiel de +24 en matière de tirs cadrés – 44 contre 20 en faveur du Canadien – est le plus imposant obtenu par le Tricolore cette saison dans le cadre des 30 matchs au cours desquels il a tiré plus souvent que ses adversaires…

 

  • Le différentiel de +50 en matière de tirs décochés (89 contre 39 pour les Islanders) représente aussi un sommet pour le Canadien cette saison…

 

  • Le Canadien a décoché plus de tirs que ses rivaux 25 fois seulement en 75 matchs cette année, dont huit depuis l’arrivée de Martin StLouis. Au fil de ces 25 matchs, le Canadien a obtenu des différentiels supérieurs à +20 quatre fois et il s’est incliné à quatre occasions : deux fois contre les Islanders – revers de 3-0 vendredi (+50) et de 6-2 le 4 novembre (+22), revers de 5-2 contre Vegas (+31) et une autre défaite de 5-2 aux mains des Capitals de Washington (+21) qui seront les visiteurs samedi soir au Centre Bell…

 

 

  • C’était la sixième fois cette saison que le Canadien était victime d’un blanchissage. Il a aussi perdu aux mains des Sharks (50), des Penguins (6-0), des Blackhawks (2-0 dans le cadre de la 500e victoire en carrière de MarcAndré Fleury) sans oublier les deux revers de 4-0 aux mains des Hurricanes de la Caroline…

 

  • Inversement, le Canadien a blanchi ses adversaires trois fois. Jake Allen compte deux jeux blancs – 45 arrêts dans un gain de 50 à San Jose et 22 arrêts dans une victoire de 3-0 contre Detroit – et Samuel Montembeault a blanchi les Sabres de Buffalo (32 arrêts) 4-0 le 23 février dernier…