Le Canadien vient de compléter une tranche de 50 matchs en saison 2014-2015 avec un résultat étonnant de 32 victoires et une récolte des deux tiers des points disponibles au classement! Ce n’est même plus du bout des lèvres mais plutôt très ouvertement que l’entraîneur Michel Therrien parle d’un succès inespéré, bien au-delà des attentes et surtout, bien au-delà de ce que l’on pouvait souhaiter logiquement de la part de la formation qu’il dirige depuis octobre.

Dès le départ, on reconnaissait aisément les nouveaux défis qui attendaient la direction de l’équipe. Le virage jeunesse effectué délibérément avec la libération de vétérans comme Brian Gionta, Daniel Brière, Josh Gorges, Francis Bouillon, Douglas Murray (sans compter Thomas Vanek, acquis tard en saison) a créé un vide certain au niveau de l’expérience et du leadership. Conséquemment, on redoutait un manque de constance dans le rendement de l’équipe. On craignait aussi un certain déséquilibre en défense et un manque de profondeur en attaque.

Comme on le sait tous, Carey Price est venu à lui seul fausser une grande partie de ce portrait pourtant bien objectif, surtout au chapitre de la constance dans la récolte de victoires. Le Tricolore n’a perdu deux matchs consécutifs en temps règlementaire qu’à quatre occasions depuis le début de la saison, ce qui est franchement exceptionnel. Le rendement de Price a aussi maquillé les failles en défense, failles qui se sont amoindries, avouons-le quand même, avec l’arrivée de Sergei Gonchar et l’éclosion récente de Nathan Beaulieu à ses côtés.

Là où Price n’y peut rien, cependant, c’est du côté de l’attaque! Et il apparaît de plus en plus évident que Marc Bergevin devra absolument trouver du renfort de ce côté s’il veut donner une chance raisonnable à son équipe de connaître d’abord une fin de saison satisfaisante, puis des séries respectables et pourquoi pas, tenter de combler une brèche qui s’annonce inquiétante à moyen terme.

Dans une autre chronique sur le RDS.ca, mon estimé collègue François Gagnon revient sur un thème qui lui est cher depuis le début de la saison, soit les carences en défense chez le Canadien. Je ne dis pas qu’il a tort, loin de là, mais je considère que la priorité de la haute direction présentement, c’est de trouver du renfort à l’attaque et de miser le plus possible sur cet aspect dans les démarches actuelles. Et pas seulement pour la fin de la saison et les séries, mais idéalement pour les quelques années nécessaires au développement de jeunes attaquants talentueux comme Sven Andrighetto, Charles Hudon, Jacob de la Rose, Michael McCarron, Nikita Scherbak et autres qui viendront éventuellement s’ajouter aux Max Pacioretty, Brendan Gallagher et Alex Galchenyuk.

Peut-on survivre d’ici la mi-avril avec Price, Andrei Markov, P.K. Subban, Gonchar, Beaulieu, Alexei Emelin et Tom Gilbert, du filet jusqu’à la ligne bleue? Oui. Peut-on espérer un minimum de succès en séries avec ce groupe? Je le crois. Mais peut-on envisager d’atteindre ces deux objectifs avec l’attaque actuelle? Non!

Faites un petit survol du classement de la Ligue nationale en date du 5 février et vous serez frappés de plein fouet. Le Canadien a le pire rendement offensif des 16 équipes qui participeraient aux séries si elles débutaient à ce moment. Pire encore, sept équipes non qualifiées affichent un meilleur rendement offensif que celui du Tricolore. Ce n’est quand même pas rien!

Tout aussi inquiétant, c’est la tendance observable depuis un certain temps : Gallagher, un but en 13 matchs. Tomas Plekanec, deux buts en 12 matchs, les deux lors de la même rencontre. Jiri Sekac, aucun but en 14 matchs. Lars Eller, aucun but en 14 matchs. David Desharnais a marqué son premier en 10 rencontres dans la défaite contre Buffalo, mardi dernier. Ouch! Et je ne parle pas ici des autres attaquants qui ont des rôles précis mais qui, collectivement, n’ont récolté que 12 buts depuis le début du calendrier (Dale Weise, Brandon Prust, Michaël Bournival et Manny Malhotra, notamment).

Michel Therrien a fort bien manœuvré jusqu’ici pour composer avec la situation devant la presse. Il a fait preuve de beaucoup de rectitude en se contentant de dire qu’il souhaitait voir son attaque « trouver un meilleur équilibre », que « chaque trio devait apporter sa contribution », etc. Entre les lignes, l’entraîneur d’expérience dit à son directeur général : « trouve-moi de l’aide en attaque, de grâce! »

Marc Bergevin pourra-t-il y parvenir? N’oublions pas que le DG du Canadien a quand même mis la main sur Vanek la saison dernière. Pas la trouvaille du siècle, dites-vous? D’accord, mais Vanek a quand même récolté 15 points en 18 matchs en saison régulière, en a ajouté 10 en 17 rencontres éliminatoires et a fait mouche un total de cinq fois en supériorité. Rien ne prouve qu’il ne puisse faire à nouveau une récolte intéressante d’ici le 2 mars.

Il y a certainement des volontés indéniables de liquidation à Buffalo, en Caroline, à Edmonton et en Arizona. Il y a aussi de fortes pressions de « reconstruction » à Philadelphie, à Toronto et au New Jersey, sans compter certaines équipes de l’Ouest qui se retrouveront éventuellement aux portes d’une exclusion décevante, comme Minnesota, Dallas et Colorado.

Sans compromettre son plan directeur de bâtir par « l’intérieur », Marc Bergevin n’a d’autre choix que de chercher à améliorer son attaque au cours des prochaines semaines. S’il paie un prix équitable, s’il est créatif dans ses propositions, il pourrait non seulement apporter une solution à court terme pour son équipe, mais pourrait peut-être aussi régler un épineux problème qui se dessine pour les prochaines saisons.