Lorsque Claude Julien a convenu qu’il était frustré après cette autre défaite de son équipe, un revers lamentable de 6-3 aux mains des Golden Knights de Las Vegas, lorsqu’il a répondu sèchement à quelques questions avant de couper court plus sèchement encore à son point de presse en français pour passer aux questions des collègues anglophones, l’entraîneur-chef du Canadien a démontré que le poids des défaites commençait à l’étouffer.

Julien a démontré qu’en dépit de la situation difficile, voire désolante de son équipe, il était loin d’avoir abandonné.

On ne peut en dire autant de ses joueurs. Car à les voir aller depuis le début de ce voyage, les joueurs du Tricolore peuvent bien prétendre qu’ils n’ont pas abandonné, mais leurs performances hurlent le contraire.

Et cet abandon criant, un abandon qui a fait passer le Canadien de club anémique à club pathétique au cours de la dernière semaine, hante le coach du Canadien bien plus que les défaites.

Claude Julien sait très bien que son équipe ratera les séries. Il sait très bien qu’elle perdra plus souvent qu’elle ne gagnera d’ici la fin de la saison. Mais quand il est témoin d’un effort aussi désolant que celui déployé samedi, quand il est témoin en plus de bévues monumentales sur des jeux de base, des bévues que des professionnels, aussi mauvais soient-ils, doivent faire exprès pour multiplier comme le font les joueurs du Canadien, il y a de quoi perdre patience.

Mais il y a plus.

Profitant de l’escale annuelle attendue à Vegas, les vétérans avaient établi depuis un bon moment déjà que c’est dans la capitale du jeu que les recrues allaient «remplir» leurs cartes de crédit dans le cadre du souper traditionnel des joueurs qui font le saut dans la LNH. Une initiation qui coûte cher.

Au lendemain d’un congé, à la veille d’une envolée vers Philadelphie où ils profiteront encore une fois d’un congé pour se remettre du souper et de ces nombreux à côté, Claude Julien ne pouvait pas croire que ses joueurs auraient l’audace de prendre également congé face aux Golden Knights.

Gagner ou perdre ne comptait pas vraiment. Surtout que devant les «terrifiants» Golden Knights les chances de victoire du Canadien étaient aussi bonnes que celles de gagner le gros lot dans l’une des centaines de milliers de machines à sous que l’on retrouve dans tous les coins et recoins de la capitale du jeu. Mais encore fallait-il se présenter, voire faire semblant, ne serait-ce que pour «remercier» l’organisation d’être complice de ce party annuel.

Les joueurs ne l’ont pas fait. On a eu droit à des performances honnêtes de Charles Hudon et de Nikita Scherbak qui ont marqué des buts de toute beauté. Des buts qui leur ont permis de déployer un pan de leur talent.

Pour le reste…

Et vous savez quoi? Ça risque de s’empirer bien plus que de s’améliorer. Car à Philadelphie mardi, les Flyers ne feront pas de cadeau au Canadien. Pas plus que le Lightning de Tampa Bay samedi prochain au Centre Bell.

ContentId(3.1264042):LNH : Canadiens 3 - Golden Knights 6 (hockey)
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Il restera la visite des Rangers de New York, jeudi, au Centre Bell, pour permettre au Canadien d’au moins sauver la face et d’éviter de voir leurs partisans les ridiculiser dans des gradins qui seront encore plus dégarnis qu’ils ne l’étaient avant le début de ce voyage qui tourne au cauchemar.

Je sais. Plusieurs partisans qui ont déjà fait une croix sur cette saison de misère espèrent une multiplication de défaites afin de mousser les chances d’obtenir le tout premier choix au prochain repêchage.

Mais pour Claude Julien, les 23 prochains matchs se doivent d’être un tremplin en vue de la prochaine saison. Ces 23 parties doivent lui permettre de reprendre le contrôle de son club. De lancer des messages. De faire du ménage afin que le Canadien reparte sur des bases meilleures et plus solides dès le camp d’entraînement au lieu de miner sa saison avec un camp aussi moribond que celui de l’automne dernier.

C’est pour cette raison que l’atrocité de match que lui ont offert ses joueurs samedi à Las Vegas ne peut être tolérée.

À défaut d’avoir la possibilité d’annuler le souper des recrues, j’aurais aimé que Claude Julien décide d’imposer un couvre-feu à minuit genre. Car si les défaites qui s’accumulent et les doléances d’un coach qui les protègent publiquement au prix de payer de sa propre crédibilité aux yeux de plusieurs amateurs n’arrivent plus à attiser le niveau de compétition des joueurs, peut-être que la colère associée à un couvre-feu loin d’être bienvenu pourrait y arriver.

Ou peut-être pas…

Mes observations sur ce semblant de match disputé par le Canadien :

  1. Price en pénitence ou Niemi en vitrine?
  2. Drouin et Galchenyuk avec parcimonie
  3. Même le troisième trio y goûte
  4. Les Golden Knights vont de record en record

Chiffre du match : 20 – En s’inclinant comme il l’a fait samedi, le Canadien a encaissé sa 20e défaite sur la route cette saison, dont 19 ont été encaissées en temps règlementaire. Avec sa fiche de 8-19-1, le Canadien est la pire équipe de la LNH sur les patinoires adverses cette saison. Oui! Les Sénateurs d’Ottawa ne revendiquent que sept gains, mais ils affichent toutefois une récolte de 18 points, un de plus que le Tricolore qui a perdu 11 de ses 12 derniers matchs sur la route (1-11-0).

Price en pénitence ou Niemi en vitrine?

Carey Price connaît une saison à l’image de celle de son équipe : une saison misérable. Victime d’un très mauvais but (le cinquième) dans la défaite de 5-2 encaissée jeudi en Arizona, et de deux autres qu’il aurait normalement transformés en arrêts, coupable d’un revirement bête alors qu’il a remis la rondelle en jeu à la ligne bleue où un coéquipier aurait dû être campé, mais brillait par son absence, Price avait offert des motifs à son coach de le laisser de côté samedi à Vegas.

ContentId(3.1264004):Canadiens - Un message pour Carey Price?
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Malgré ces motifs, confiner Price au banc contre la meilleure équipe de la LNH et lui préférer Antti Niemi représentait une décision non seulement osée, mais aussi un brin périlleuse en raison du raz de marée de réactions auprès des partisans.

Je ne suis pas convaincu que la décision de confiner Price au banc était une mesure disciplinaire.

Je crois plutôt qu’on a mis Niemi sur la patinoire afin de prouver aux équipes qui se cherchent un gardien d’assurance en vue des séries qu’il est bel et bien remis des atroces performances qui ont miné son début de saison.

Depuis le temps qu’il est dans la LNH, nul besoin de mettre Niemi dans la vitrine que vous dites? Mes amis de l’Antichambre partageaient votre point de vue. Ce n’est pas de présenter Niemi qui était nécessaire, mais de le rendre plus attrayant que les autres gardiens qui sont disponibles actuellement.

Peu importe la raison, la stratégie du Canadien a failli. Lamentablement.

Car en accordant trois buts sur six tirs – même s’il n’est pas à blâmer sur les trois buts – Niemi n’a rien fait pour aider le Canadien à le vendre… même pour pas cher.

Et si l’état-major voulait servir un message à Price, ça n’a pas fonctionné non plus, car il a fallu faire appel à ses services avant même la neuvième minute du match. Victime de trois buts sur 27 tirs, dont un très mauvais une fois encore en début de troisième période, Price a aussi été crédité de la défaite. Quand ça va mal.

Est-ce que Price pourrait être échangé?

Je n’en crois rien. Car si Geoff Molson devait décider de tout rebâtir au point de le faire en se débarrassant de Carey Price – vous pouvez ajouter le nom de Shea Weber si vous le voulez – je ne peux concevoir qu’il confierait le travail d’architecte de cette reconstruction à Marc Bergevin.

Mais bon. En gardant Price au banc alors que le Canadien a cruellement besoin d’une victoire pour au moins sauver la face et qu’il doit le faire contre l’équipe de l’heure dans la LNH, l’état-major a tout fait pour relancer les spéculations associées à son gardien vedette et les critiques dirigées à son endroit.

Drouin et Galchenyuk avec parcimonie

En plus de confiner Carey Price au banc en début de match, Claude Julien a semblé serrer la vis un brin ou deux en utilisant Jonathan Drouin et Alex Galchenyuk avec parcimonie. Dire que Drouin déçoit amèrement cette saison tient de l’euphémisme. Ses statistiques sont timides et ses performances dans plusieurs des matchs disputés depuis son arrivée à Montréal sont plus timides encore.

ContentId(3.1264044):Price sur le banc... une décision qui cache quelque chose?
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Le talent est là. L’effort moins. Le deuxième et troisième effort encore moins.

Après la première période, Drouin était l’attaquant le moins utilisé du Canadien avec six présences totalisant 3 :12. Galchenyuk affichait une présence de plus. Après la deuxième période, seuls Daniel Carr et Logan Shaw avaient joué moins que Drouin… et Galchenyuk. Après le match, Drouin affichait plus de temps d’utilisation que les trois membres du quatrième trio. C’est tout!

Est-ce que cela a contribué au but qu’il a marqué en milieu de troisième lorsque Claude Julien l’a malgré tout envoyé en avantage numérique?

Je ne sais pas. Mais si Claude Julien décide de serrer la vis aux dépens des joueurs qui ne lui en donnent pas assez et qu’il récompense ceux qui le méritent, il est grand temps pour lui de s’attaquer au temps d’utilisation offert aux «vedettes».

Cela dit, je m’explique mal, comme plusieurs d’entre vous, pourquoi Nicolas Deslauriers s’est retrouvé sur la touche pour un deuxième match de suite. Vrai qu’il a mal joué mercredi à Denver. Ce qui pourrait expliquer son match dans les gradins le lendemain en Arizona. Mais deux matchs de suite? À moins que des motifs associés à la régie interne de l’équipe ne soient en cause, je trouve que Deslauriers était loin de mériter pareil traitement. Surtout que bien d’autres joueurs auraient pu et dû payer avant lui.

Mais bon…

Même le troisième trio y goûte

Tu sais que ça va vraiment mal quand tes joueurs les plus fiables sont victimes des pires défaillances de ton équipe.

C’est ce qui est arrivé à Tomas Plekanec (moins-3), Brendan Gallagher (moins-3) et Paul Byron (moins-4) hier soir. En jouant du bout du bâton au lieu d’afficher la hargne qui le caractérise, Byron a été pris en défaut sur bien trop de buts des Knights. Les défenseurs ne l’ont pas aidé, mais Ti-Paul ne nous avait pas habitués à ce genre de match. Pas plus que Gallagher.

Quant à Tomas Plekanec, il n’a pas joué de chance. Bien qu’il ait été, et de loin, le centre le plus efficace des deux équipes avec 12 mises en jeu gagné en 16 disputées (75 %) il a été victime de trois buts, dont deux marqués par Vegas après des mises en jeu pourtant gagnées par le vétéran. Cela dit, les Golden Knights ont marqué trois buts après des mises en jeu gagnées en zone du Canadien. Le premier du match après une mise en jeu perdue par Byron Froese, le cinquième après une mise en jeu perdue par Charles Hudon et le sixième après une mise en jeu perdue par Plekanec…

Les Knights vont de record en record

Les Golden Knights multiplient les records à leur première saison dans la LNH.

Depuis leur 33e gain, chaque partie gagnée leur permet d’établir un nouveau record de victoires pour un club d’expansion à sa première saison. En signant leur 39e victoire de la saison, les Golden Knights ont aussi remporté une 22e partie à domicile.

ContentId(3.1264059):Les erreurs, le découragement, puis la colère
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Ce faisant, ils ont égalé le record établi par les Whalers de Hartford lors de leur entrée dans la LNH en 1979-1980. Les Whalers avaient toutefois eu besoin de 40 parties pour atteindre ce plateau que les Knights ont atteint en 28 parties seulement. De fait, leur fiche de 22-4-2 au T-Mobile Arena est la meilleure de la LNH à domicile.

Forts de leurs 82 points récoltés jusqu’ici, les Knights abattront sous peu un autre record pour un club d’expansion puisque les Panthers de la Floride, depuis 1993-1994, détiennent le record pour le plus grand nombre de points (83) récoltés par une équipe effectuant son entrée dans la Ligue.

Ce n’est pas rien. Mais il y a mieux.

Premiers au classement général avec leurs 82 points (39-15-4) les Knights pourraient, en maintenant leur rythme effréné actuel, atteindre le plateau des 55 victoires cette saison. Un plateau que trois équipes seulement ont atteint depuis le lockout qui a annulé la saison 2004-2005 : les Capitals de Washington, deux fois en 2016-2017 (55-19-8) et en 2015-2016 (56-18-8) et les Red Wings de Detroit en 2005-2006 (56-16-8).

Bon dimanche.

En attendant le prochain match du Canadien, mardi à Philadelphie, je vous proposerai lundi un état des forces dans la LNH qui devrait être coiffé d’un nouveau champion.