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RÉSULTATS

Développement : bien plus que la dureté du mental

Kaiden Guhle Kaiden Guhle - PC
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MONTRÉAL – Si à vos yeux l'enseignement du hockey se limite à mitrailler des « patine! patine! patine! » à des joueurs qui tournent en rond sur la glace, à leur ordonner de « shooter la puck » dès qu'ils ont la rondelle sur la lame de leur bâton ou que vous considérez que la « dureté du mental » est synonyme de la capacité d'encaisser des taloches sur le nez ou de se faire river la tête contre une baie vitrée, je vous suggère d'arrêter de lire tout de suite.

 

Car la chronique que je vous propose ici vous embêtera au plus haut point.

 

Inversement, si vous voulez en savoir plus sur les stratégies que la nouvelle équipe de développement des joueurs chez le Canadien – des jeunes espoirs aux vétérans qui cherchent à maximiser leur rendement pour prolonger leur carrière – entend mettre de l'avant pour non seulement reconstruire le CH, mais reconstruire cette équipe sur des bases solides, je vous invite à continuer.

 

Je vous invite aussi, et surtout, à garder l'esprit ouvert parce que certains concepts viennent un brin ou deux du champ gauche.

 

Bon : le principe demeure simple :

 

« Il faut prendre le temps nécessaire pour développer une complicité avec nos joueurs afin qu'ils soient réceptifs aux observations que nous leur soumettons. Mais en fin de compte, ce sont les joueurs qui décident : on les amène à l'abreuvoir, mais on ne peut pas boire à leur place. »

 

Ce grand principe, c'est Rob Ramage, le responsable du développement chez le Canadien, qui le résume.

 

Équipe renforcée

 

Dans un passé encore récent, Ramage et Francis Bouillon, travaillaient de pair pour orchestrer le développement des jeunes joueurs de l'organisation. Ils avaient beau se fendre en quatre, ils ne suffisaient pas à la tâche.

 

« Je pouvais être à Laval – avec le club-école – une journée et partir vers la Ligue junior de l'Ontario le lendemain. On était tout partout », a reconnu Francis Bouillon qui a accueilli avec joie la décision du nouvel état-major de renflouer la brigade de spécialistes du développement.

 

Ramage et Bouillon ne sont plus seuls.

 

Kent Hughes et Jeff Gorton ont embauché Marie-Philip Poulin et ont donné plus de responsabilités à Nick Carrière qui gravitait autour de l'organisation depuis des années.

 

Ils ont aussi ouvert la porte à deux spécialistes de la science du hockey, Adam Nicholas et Scott Pellerin, pour appuyer le travail des trois autres membres de l'équipe.

 

Comme l'a dit Francis Bouillon : « la direction croit au développement, elle tenait à ce que nous soyons plus efficaces et elle a pris les moyens pour nous aider à le devenir. »

 

Francis Bouillon continuera à visiter les joueurs évoluant dans les rangs juniors. Marie-Philip Poulin partagera son grand talent et sa passion du hockey avec les jeunes qu'elle ira rejoindre sur la patinoire. Nick Carrière donnera un gros coup de main à l'entraîneur-chef Jean-François Houle et à ses adjoints avec le Rocket de Laval.

 

Comptant des années d'expérience comme coach dans les rangs collégiaux américains et dans la Ligue américaine, Carrière assistera aux matchs du Rocket, prendra des notes et sera impliqué dans les entraînements.

 

Vrai que Marie-Philip Poulin est la meilleure joueuse de hockey au monde. Qu'elle pourra transmettre son savoir.

 

Vrai que Francis Bouillon a connu une belle carrière dans la LNH même s'il a été boudé au repêchage par toutes organisations qui se contentaient de regarder son petit gabarit au lieu de regarder ce qu'il avait dans le ventre et dans le cœur. Cette détermination, Bouillon pourra aussi la partager avec des jeunes qui pourraient laisser le découragement ralentir leur développement au point de le compromettre.

 

Et il est tout aussi vrai que les compétences de Nick Carrière serviront la cause des jeunes de l'organisation.

 

Mais on est encore loin de la science du hockey.

 

La science saute dans la mêlée

 

C'est là qu'Adam Nicholas et Scott Pellerin sautent dans la mêlée. Férus de statistiques, surtout celles qui sont avancées, voire très avancées, Nicholas et Pellerin assurent qu'il est essentiel de développer le côté cérébral d'un joueur pour l'aider à atteindre son plein potentiel.

 

« Les joueurs aiment multiplier les mêmes exercices à l'entraînement. Ils sont à l'aise avec ce principe qui donne le rythme de leurs entraînements depuis toujours. Contourner des cônes, multiplier les tirs, les sorties de zone, les replis. Ils savent tout ça. Mon but, c'est de développer leur compréhension du jeu. Je veux qu'ils comprennent pourquoi il est mieux de faire tel ou tel jeu selon l'endroit où ils sont sur la glace. Selon les situations. Ils savent tous jouer au hockey, mais il est possible de leur permettre de mieux joueur au hockey en les poussant à être plus cérébral pour analyser où ils sont sur la glace, pour identifier la situation dans laquelle ils se trouvent afin de prendre les meilleures décisions et de les mettre à exécution », défile Adam Nicholas avec sérieux, aplomb et conviction.

 

Adam Nicholas est tellement convaincu des pouvoirs associés à une meilleure compréhension du jeu qu'il assure qu'il est tout aussi possible de développer le sens du jeu que d'améliorer la qualité d'un tir des poignets ou d'un coup de patin. Et dire que dans un passé pas si lointain on croyait que le sens du jeu, c'était un cadeau offert par les Dieux du hockey à quelques joueurs triés sur le volet.

 

Ressemblant bien plus à un professeur de sciences qu'à un redresseur de torts, Adam Nicholas utilise bien sûr beaucoup de vidéo pour inculquer les principes cérébraux du jeu à ses joueurs.

 

Il a aussi, et surtout, recours à son enthousiasme débordant pour s'assurer de capter l'attention de ses « élèves » au lieu de les terrifier avec ses grands principes qui pourraient alors balayer du revers de la main. Cet enthousiasme lorsqu'il est partagé permet ensuite de développer une complicité avec les joueurs et finalement de réussir, au fil du temps, à faire d'eux des « scientiques » du hockey.

 

« Ce n'est pas de la magie. Je ne suis pas Dumbledore. Je ne peux pas arriver à tout changer avec un simple coup de baguette magique. C'est pour ça que vous me voyez souvent sur la glace avec les gars effectuer un exercice en s'assurant de bien le comprendre au lieu de simplement le répéter en séries sans y accorder l'attention nécessaire. Les principes que je propose existent depuis toujours que ce soit au hockey, au basket, à la crosse. Il suffit de les partager. De prendre le temps de bien les expliquer pour qu'ils soient compris et ensuite mis en application. J'adore ce que je fais. J'adore les joueurs avec qui je travaille. C'est ce qui m'aide à déployer l'énergie que vous me voyez déployer lorsque je suis avec eux sur la glace», qu'Adam Nicholas ajoute avec toujours la même passion.

 

On est loin de la simpliste dureté du mental ici...

 

Guhle s'approche du but

 

Malgré ce volet scientifique fort intéressant, un autre grand principe demeure. Un principe avec lequel Rob Ramage, Francis Bouillon, Marie-Philip Poulin et tous les spécialistes du développement doivent composer. Un grand principe qui fera toujours la différence entre les succès et les échecs en matière de développement.

 

« On peut avoir la meilleure équipe de développement qui soit. On peut avoir recours aux meilleures méthodes et aux meilleures données. Nous ne pouvons pas vouloir réussir plus que les jeunes eux-mêmes veulent réussir », a reconnu Rob Ramage qui dirige le groupe de développement.

 

ContentId(3.1412471):Kaiden Guhle : « Un bon jeune joueur de hockey », résume Martin St-Louis
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Après un autre fort match au cours duquel il a fait bien plus que marquer un but, distribuer de bonnes mises en échec, effectuer de bons jeux et afficher la confiance de vétéran – je vous invite à lire ici les textes de mon collègue Éric Leblanc sur le match de jeudi face aux Jets de Winnipeg et plus spécifiquement sur les performances du jeune défenseur – j'ai demandé à Kaiden Guhle à quel point il voulait maximiser son développement afin de faire le saut dans la LNH dès cette année.

 

« Je le veux totalement », qu'il m'a répondu le plus sérieusement du monde.

 

Fort de cette autre bonne performance, Guhle ne se contente de pas de parler. Il appuie ses paroles de faits saillants convaincants. Des faits saillants qui m'incitent à répéter encore aujourd'hui que de tous les jeunes qui frappent à la porte du vestiaire du Canadien, c'est encore et toujours lui qui est le plus près du Centre Bell et le plus prêt à obtenir une place au sein de la brigade défensive.

 

Pas besoin d'être un scientifique du hockey pour réaliser ça.