MONTRÉAL - Les récentes prolongations de contrat accordées aux directeurs généraux Julien BriseBois et Doug Armstrong par leurs propriétaires du Lightning à Tampa Bay et des Blues à St. Louis mettent en évidence l’importance de définir l’avenir de Marc Bergevin à la tête du Canadien.

 

Propriétaire et chef de la direction du Canadien, Geoff Molson doit se décider. Et le plus vite sera le mieux. Il est d’ailleurs difficile de croire que la haute direction puisse amorcer la saison sans avoir décidé du sort de son directeur général.

 

Bien qu’il ait les coudées franches pour prendre des décisions importantes en matière de hockey, il n’est pas exclu que Geoff Molson tienne à obtenir l’aval de son conseil d’administration avant d’offrir une prolongation de contrat à long terme à Bergevin.

 

Les salaires des directeurs généraux les plus en vus autour de la LNH oscillant entre 3 et 5 millions $ – en devises américaines – une prolongation de 3, 4 voire 5 ans représente donc un investissement important en argent. Une telle prolongation impose aussi l’adoption d’une stratégie à long terme qu’il est difficile de modifier en cours de route. D’où la possibilité que Geoff Molson tienne à obtenir le feu vert des membres de son conseil.

 

Convoquées plusieurs fois – entre quatre et six rencontres – au cours d’une année, les réunions du CA du Canadien se déroulent loin des caméras et des micros. Elles sont très privées. Les dates des rencontres et les ordres du jour sont jalousement protégés.

 

Bien qu’il soit difficile de donner une date précise, il est facile de croire que Geoff Molson et les membres de son conseil d’administration devraient se réunir avant le début de la prochaine saison. Il est donc envisageable qu’on sache, d’ici le 13 octobre prochain alors que le Canadien amorcera son calendrier régulier à Toronto, face aux Maple Leafs, si Marc Bergevin sera toujours à la tête du Tricolore l’an prochain, ou s’il écoulera en 2021-2022 la dernière année de son contrat.

 

Aucune offre présentée

 

Marc Bergevin est devenu le 17e directeur général du Canadien de Montréal en mai 2012. Il complète donc son deuxième contrat avec le Tricolore.

 

Contrairement à ce qui a été avancé au fil des derniers mois, la haute direction du Canadien n’a jamais présenté un troisième contrat en bonne et due forme à son directeur général.

 

Le directeur général et son propriétaire ont eu des discussions préliminaires. Ils ont certainement échangé sur les objectifs de l’équipe et les moyens pour les atteindre. Ils ont sans l’ombre d’un doute échangé aussi quelques chiffres sans pour autant amorcer des négociations formelles.

 

Mais selon ce que je peux comprendre, ces discussions ne sont pas concrétisées par une proposition écrite et officielle. Du moins pas encore.

 

Pourquoi?

 

Malgré l’ascension estivale qui a permis au Canadien de se rendre jusqu’en finale de la coupe Stanley, les hauts et les bas traversés par l’équipe ont soulevé des vagues de critiques des partisans à l’endroit du directeur général au fil des dernières années.

 

Des critiques parfois justifiées ; des critiques parfois exagérées ; des critiques parfois démesurées.

 

Comme le veut le proverbe selon lequel il n’y a que ceux qui ne lavent jamais la vaisselle qui n’en cassent pas de temps en temps, Marc Bergevin a certainement commis des erreurs.

 

Personne ne pourra toutefois lui reprocher son immobilisme. Il a multiplié les décisions importantes. Des décisions qui n’ont pas toujours été populaires à commencer par l’échange qui a envoyé P.K. Subban à Nashville en retour de Shea Weber. Il a conclu d’excellentes transactions et en a réalisé bien plus souvent des bonnes que des moins bonnes et rarement des mauvaises.

 

Quelques embauches de joueurs autonomes ont tourné au vinaigre. À commencer par celle de Karl Alzner. Mais bon! Le marché des joueurs autonomes est miné et fait des tas de victimes chaque année.

 

Le repêchage, le dossier Kotkaniemi, la sélection mal avisée de Logan Mailloux l’été dernier ont entraîné leur lot de critiques.

 

L’arrivée de jeunes très prometteurs, les sélections des Caufield, Guhle et autres jeunes qui aident le Canadien ou l’aideront au fil des prochaines années, les mises sous contrat des Anderson, Toffoli, Chiarot, Edmundson, sans oublier les trois Québécois rapatriés l’été dernier – David Savard, Cédric Paquette et Mathieu Perreault – démontrent qu’au final, le directeur général du Canadien a aussi tout un volet de décisions positives pour défendre son règne. Encore faut-il se donner la peine de le consulter.

 

Malgré ces critiques, malgré les insuccès, malgré des exclusions répétées des séries, Geoff Molson a toujours appuyé son directeur général et endossé totalement son plan et les décisions qu’il a prises pour le mener à bien.

 

Les prises de position claires de Geoff Molson alors que son équipe et son directeur général étaient fortement secoués par les insuccès sur la patinoire rendent son mutisme actuel bien difficile à comprendre compte tenu de la présence du Canadien en finale de la coupe Stanley l’été dernier.

 

D’autres options pour Bergevin

 

Cela dit : il n’y a pas que Geoff Molson qui a besoin de prendre son temps dans le dossier Bergevin. Le principal intéressé doit réfléchir lui aussi.

 

Bien que la possibilité de diriger le Canadien et le lucratif contrat qui accompagne ce job soient des sources de motivation importantes, les aléas qui découlent de ce travail pèsent aussi très lourd dans l’équation.

 

Comme son gardien Carey Price, comme Jonathan Drouin et tous les joueurs de son équipe, surtout les vedettes, comme son entraîneur-chef Dominique Ducharme, Marc Bergevin est soumis à une pression constante.

 

Cette pression et surtout les critiques acerbes qui déferlent après chaque décision qu’il prend, à chaque transaction qu’il conclut ou qu’il décide de ne pas compléter, à chaque embauche qu’il effectue pourraient pousser le directeur général à y penser à deux fois avant d’accepter un troisième mandat à Montréal.

 

Surtout que des options s’offriraient rapidement à lui s’il devait soudainement être disponible. Plusieurs postes pourraient s’ouvrir au cours des prochains mois.

 

En Californie, l’avenir de Rob Blake à la tête des Kings est loin d’être assuré. Est-il besoin de rappeler que Bergevin a des liens étroits avec Luc Robitaille qui est président de l’équipe?

 

À Anaheim, Bob Murray amorce sa 13e saison à la tête des Ducks. À 66 ans, il pourrait décider de tendre le flambeau à un plus jeune et à lui servir de conseiller senior. Murray et Marc Bergevin sont de bons amis depuis que le jeune défenseur québécois a profité de l’expérience de Murray lorsqu’ils se sont retrouvés à la ligne bleue des Blackhawks de Chicago dans une autre vie.

 

Ce ne sont ici que des spéculations. Mais ces scénarios servent tout simplement à démontrer que Bergevin ne serait pas forcé de tourner le dos à la LNH s’il décidait de refuser une prolongation de contrat.

 

Cela dit, je demeure convaincu qu’en pesant les pour et les contre associés à un contrat à long terme qui lui rapporterait autour de 4 millions $ annuellement en devises américaines, Marc Bergevin resterait malgré tout à Montréal.

 

L’avenir nous le dira.

 

Candidats potentiels

 

Il faut dire aussi que les candidats susceptibles de prendre la relève à la tête du Canadien ne se bousculent pas aux portes.

 

En quête d’une troisième conquête consécutive de la coupe Stanley, il était clair que l’avenir de BriseBois à la tête du Lightning était assuré.

 

Dernier candidat écarté en 2012 avant que le Canadien décide de donner le poste de directeur général à Marc Bergevin, Julien BriseBois était peut-être dans la mire de Geoff Molson. Ce qui pourrait expliquer le mutisme de la haute direction dans le dossier Bergevin.

 

Sa prolongation de contrat signée au cours des derniers jours avec le Lightning met sèchement fin au rêve possible du Canadien de rapatrier BriseBois à Montréal.

 

Embauché par André Savard en 2001 pour établir des bases de comparaison en matière de négociations de contrat, Julien BriseBois a gravi les échelons au sein de la haute direction du Canadien avant de migrer vers Tampa où il est devenu, en 2010, le bras droit de Steve Yzerman nouvellement promu directeur général du Lightning.

 

En 2018, il a succédé à Yzerman après que ce dernier eut abandonné son poste pour retourner à Detroit où sa famille était demeurée malgré son poste de DG à Tampa.

 

S’il est clair qu’un Julien BriseBois disponible aurait été très attrayant pour le Canadien, il ne l’est plus. Du moins pour cinq ans.

 

Qui sont les autres candidats potentiels?

 

Si Pierre Dorion n’avait pas, comme BriseBois et Armstrong, obtenu une prolongation de contrat à la tête des Sénateurs, je lancerais son nom dans la moindre hésitation. Très bon pour dénicher du talent, Dorion a fait des « miracles » à Ottawa où il doit gérer une équipe avec des moyens réduits et surtout composer avec des interventions souvent très mal avisées de son propriétaire Eugene Melnyk.

 

D’autres noms :

 

Ancien du Canadien et actuel adjoint de Julien Brisebois à Tampa, Mathieu Darche se prépare lentement, mais sûrement à devenir éventuellement directeur général dans la LNH.

 

Est-il prêt?

 

Cette question se pose aussi dans le cas de Martin Madden junior. Fils de l’ancien directeur général des Nordiques de Québec, qui a travaillé pour le Canadien, les Rangers occupant plusieurs postes allant de dépisteur à adjoint au directeur général alors qu’il a passé sa vie dans le hockey professionnel, Martin Madden junior baigne dans le hockey depuis qu’il est enfant.

 

Il a été dépisteur amateur avec plusieurs organisations. Son flair pour dénicher des jeunes joueurs de talent lui a valu de gravir les échelons dans le monde du hockey. Aujourd’hui âgé de 49 ans, il est l’adjoint de Bob Murray avec les Ducks à Anaheim.

 

Il serait certainement un candidat intéressant si le poste de DG était disponible à Montréal.

 

Tout comme d’autres anciens du Canadien tels que Vincent Damphousse et Stéphane Quintal qui sont demeurés très près du hockey depuis la fin de leur carrière. Quintal est toujours à l’emploi de la LNH à titre de l’un des membres du bureau de la protection des joueurs.

 

J’oublie sans doute d’autres candidats qui mériteraient des considérations. Surtout que le Canadien pourrait éventuellement décider d’offrir le poste de DG à un anglophone. Ce qui multiplierait le nombre de candidats.

 

Mais bon!

 

Avant de se lancer dans une recherche de candidats potentiels, il faudrait se rappeler qu’il y a actuellement un directeur général en place. Qu’il s’appelle Marc Bergevin et qu’en dépit les critiques qu’il a essuyées au fil des ans, qu’il essuie aujourd’hui et qu’il essuiera encore demain et après-demain, il a fait du gros travail à la tête de l’équipe.

 

Le mutisme de Geoff Molson dans le dossier Bergevin ouvre toutefois la porte à toutes ces spéculations. D’où l’importance que le propriétaire mette un terme à ce climat d’incertitude. Et il doit le faire rapidement.

 

Aujourd’hui? Demain? Le plus vite sera le mieux.

 

Il est toutefois clair à mes yeux, qu’il doit le faire avant le début de la prochaine saison.