Avec l’embauche de Marie-Philip Poulin à titre de consultante, mardi, les Canadiens comptent maintenant quatre personnes au département du développement des joueurs. C’est deux de plus depuis le changement de garde à la tête des opérations hockey survenu en novembre 2021.

Avant que le directeur général Marc Bergevin ne cède sa place à Jeff Gorton et Kent Hughes, seuls les ex-joueurs de la Ligue nationale de hockey Rob Ramage et Francis Bouillon étaient affectés à cette besace. En plus de Poulin, Adam Nicholas – qui n’a jamais évolué dans les rangs professionnels – a précédemment été nommé directeur du développement hockey en mars.

En survolant les organigrammes des différentes organisations de la LNH, il est possible de constater que les départements du développement des joueurs sont l’apanage d’anciens dont les noms n’ont probablement aucun secret pour les amateurs qui dévoraient le cahier des sports de l’édition du mardi de leur quotidien préféré. Pourtant, leur travail reste relativement obscur.

N’est-ce pas le rôle de l’entraîneur-chef et de ses adjoints d’enseigner aux joueurs l’art de se comporter avec ou sans rondelle? Dans sa biographie, Jean Perron racontait notamment que son adjoint Jacques Laperrière pouvait passer des heures à expliquer aux défenseurs quel genre de décision prendre selon le pointage ainsi que le temps qu’il y avait à écouler à une rencontre.

« De la façon dont le hockey est coaché aujourd’hui, l’entraîneur-chef et ses adjoints doivent mettre énormément de temps sur la stratégie, les mises en jeu ainsi que le travail en supériorité et infériorité numériques, énumère l’ancien directeur général et entraîneur-chef des Voltigeurs de Drummondville aujourd’hui conseiller au développement chez CAA Hockey Dominic Ricard.

« Les personnels d’entraîneurs sont vraiment appelés à grossir en raison de tout ce qui s’ajoute avant, pendant et après un match. Tout le monde a remarqué que les joueurs se retrouvent avec une tablette lorsqu’ils rentrent au banc. C’est beaucoup, beaucoup de choses à gérer. »

Le rythme effréné des saisons de hockey laisse également très peu de place à l’enseignement et l’apprentissage. Entre les matchs, les entraînements, les traitements et les voyages, il est pratiquement devenu impossible de prendre un joueur à part afin de l’aider à peaufiner son jeu.

« La meilleure période de l’année pour travailler au développement d’un joueur, c’est la saison morte, affirme Ricard. En juillet et août, les joueurs s’arrangent pour maximiser leur préparation physique, mais également tactique. C’est ce qui peut faire la différence entre évoluer dans la LNH ou la Ligue américaine de hockey. À ce niveau, c’est uniquement une question de détails.

« Ce n’est pas un hasard si les agences comme celle que je représente organisent des camps et embauchent des entraîneurs d’habiletés ou de position. Chaque joueur a une rencontre avec son équipe à la fin de la saison et a ensuite des objectifs à atteindre pendant l’été. La carrière des joueurs, c’est comme leur entreprise, et ils investissent pour aller chercher des habiletés. »

Le développement des compétences ne date pas d’hier et les équipes de hockey professionnel donnent même l’impression d’être en retard à ce chapitre. Cela dit, elles ont néanmoins intérêt à dépenser de ce côté, puisque le retour sur investissement peut être extrêmement important.

« La réussite collective, c’est une addition des performances individuelles, précise Ricard. Plus les joueurs sont individuellement bons, plus l’équipe en profitera ensuite. Si un joueur travaille sur des éléments de tactiques individuelles comme la création d’espace dans le coin de la patinoire, le marquage et le travail devant le filet, tout le monde en profitera par la suite. »

Comme mentionné précédemment, les postes au département de développement des joueurs sont souvent occupés par des anciens. Même si ce ne sont pas tous les joueurs qui deviennent de bons entraîneurs, ils partent néanmoins avec une longueur d’avance sur les entraîneurs de carrière. La raison est simple : ils sont énormément crédibles aux yeux de leurs interlocuteurs.

« Quand Martin St-Louis parle à Cole Caufield et lui explique comment faire une feinte avant de lancer en supériorité numérique, le jeune sait que son entraîneur a déjà été dans ses bottines et qu’il a vécu pareille situation. Cela dit, un ex-joueur ne peut pas juste dire qu’il a joué la game.

« Être entraîneur, c’est d’abord et avant tout l’art de transmettre la connaissance et faire faire. »

Personne ne peut prédire quel genre d’entraîneuse Marie-Philip Poulin deviendra, mais elle a déjà annoncé ses couleurs en disant qu’elle avait hâte de travailler avec les espoirs des Canadiens afin de leur apprendre des choses et d’en apprendre elle-même à leurs côtés. Ses années avec l’équipe nationale lui ont appris à bien écouter et regarder avant d’oser se lever.