MONTRÉAL – La deuxième saison de Luke Tuch avec les Terriers de Boston University s’est amorcée sur des airs de Julie Masse. Après ses neuf premiers matchs, ralenti par une blessure qui lui en avait fait rater tout autant, la fiche du choix de deuxième ronde du Canadien était toujours vierge. Bien qu’il n’ait pas été repêché pour ses prouesses offensives, l’étendue de sa léthargie commençait à soulever des interrogations.

En décembre, Tuch est retourné passer deux semaines dans sa région natale, près de Syracuse, pour le congé des Fêtes. Il en est revenu métamorphosé. En trois matchs depuis la veille du jour de l’An, il a inscrit cinq points, dont quatre buts.

Il tentera lui-même, au cours d’un sympathique entretien accordé à RDS, d’apporter les bémols usuels quant à l’importance relative des statistiques dans son apport aux succès de son équipe. Mais il reconnaît aussi sans gêne qu’il se sent depuis quelques semaines comme s’il profitait d’un nouveau départ.

« En vérité, j’étais malade durant ma première semaine de vacances et je n’ai pas fait grand-chose. Mais par la suite, j’ai passé beaucoup de temps sur la glace avec mes amis d’enfance, des gars qui ont joué junior, qui jouent pro ou encore au niveau universitaire. On dirait que ça m’a aidé à revenir à la base, à réaliser à quel point on pouvait avoir du plaisir à jouer au hockey. Ça m’a énergisé et je crois que j’ai ramené ça avec moi pour la deuxième moitié de saison. »

Le retour au boulot s’est pourtant déroulé dans des circonstances compliquées. Des cas de COVID-19 parmi ses coéquipiers ont forcé l’entraîneur Albie O’Connell à déplacer deux attaquants à la défense et à effectuer une rotation entre seulement trois trios pour le match du 31 décembre contre l’Université Brown. C’est dans ce contexte inusité que Tuch a débloqué. Il a touché la cible sur une échappée dès le début du match – « un énorme soulagement », se souvient-il – et a marqué une autre fois avant la fin de la première période.

« Je suis revenu au jeu dans une excellente forme physique, tellement que ça m’avait un peu surpris. En même temps, j’ai adapté mon jeu et je crois que ça m'a souri. Je suis reconnu comme un attaquant robuste, le contact physique est une grande partie de ce que j’ai offrir, mais ça m’amène à dépenser beaucoup d’énergie. Dans ce match, je ne cherchais plus la grosse mise en échec et quand je me suis retrouvé avec deux buts, je me suis dit que peut-être je devrais conserver cette mentalité. Je suis devenu plus relax et j’ai laissé le jeu rude venir à moi. »

Cette approche a continué de fournir des résultats le week-end suivant. Après avoir récolté une passe dans le premier match d’un programme double contre Arizona State, Tuch a réussi un autre doublé dans une victoire de 5-2. Il a marqué son premier but sur un vif tir des poignets décoché des cercles de mises en jeu et son deuxième en faisant dévier un tir alors qu'il était positionné dans le bas de l’enclave. Il a été utilisé en avantage numérique et il était sur la patinoire en toute fin de rencontre lorsque l’équipe adverse a retiré son gardien au profit d’un joueur supplémentaire.  

« Ma contribution ne se résume pas aux points que je mets sur la feuille de pointage. Je suis physique, je m’implique dans les trois zones et je prends soin de mes coéquipiers. J’ai parlé à beaucoup de monde pendant ma sécheresse, j’ai eu de bons conseils. Ça m’a libéré quand j’ai fini par compter, mais j’essayais de ne pas trop y penser. Je me suis répété que je m’étais rendu où j’étais pour les bonnes raisons et je me suis efforcé de ne pas dévier du plan. Ça rapporte pour moi depuis quelque temps. »

Bien entouré

Les récents chambardements dans l’effectif des Terriers ont lié Tuch à deux nouveaux compagnons de trio avec lesquels il s’entend à merveille.

Luke Tuch est bien entouré à Boston University

Son nouveau joueur de centre est Jay O’Brien, un choix de première ronde des Flyers de Philadelphie en 2018. Âgé de 22 ans, O’Brien en est à sa troisième saison dans les rangs universitaires américaines. Après avoir débuté son parcours à Providence, il est allé jouer une saison au niveau junior en Colombie-Britannique avant d’être transféré à BU l’an dernier.

« Il a tout vécu, il a traversé beaucoup de hauts et de bas avec son changement d’école et son passage chez les juniors. On ne parle pas beaucoup du repêchage et de ces affaires-là, mais on discute sans cesse de notre jeu, c’est devenu un très bon ami. Il me pousse à être meilleur et vice versa. On ne se laisse pas tomber dans la facilité. »

Max Kaufman, l’autre ailier du trio, est un vétéran de cinq saisons qui a le même âge que le frère aîné de Luke, Alex, qui évolue pour les Sabres de Buffalo. En fait, les deux se sont affrontés à quelques reprises dans les niveaux inférieurs.  

« Ils jouaient pour des équipes rivales, explique Tuch. Il a ensuite joué à l’Université du Vermont avant de lui aussi changer d’école. Il s’est développé sur le tard, c’est un gars mature et tranquille, un vrai leader. On a fait la route ensemble pour revenir à Boston après Noël, on a parlé de toutes sortes de choses. Je me sens bien avec lui et je crois que ça se transpose dans notre chimie sur la glace. »

« Un véritable test »

Tuch entrevoit la suite de la saison avec grand enthousiasme. Cette excitation s’explique en partie par l’arrivée imminente du tournoi Beanpot. Vieille et grande tradition dans la région de Boston, la compétition oppose quatre équipes universitaires au domicile des Bruins et s’étire sur deux lundis au début février. Boston University y affrontera Harvard en demi-finale. Le gagnant se frottera la semaine suivante à Boston College ou Northeastern.

L’espoir du CH avait été privé de ce grand-rendez l’an dernier puisque le tournoi avait été rasé du calendrier par la pandémie.

« Ça va être incroyable, anticipe-t-il. Je ne connaissais pas grand-chose au hockey de la NCAA avant que mon frère ne joue à Boston College. Je crois que j’avais 13 ans quand il avait joué dans le Beanpot, il avait marqué un but en deuxième prolongation contre BU. C’est mon premier souvenir du tournoi et je ne tiens plus en place à l’idée d’y jouer à mon tour. Ça risque d’être l’une des plus belles expériences de ma carrière jusqu’à maintenant. »

Le reste du calendrier sera aussi une belle occasion pour Tuch de prouver que ses récents bons coups ne sont pas le fruit d’un coup de chance passager. Exceller contre des équipes comme Brown et Arizona State est une chose, le faire contre les meilleurs programmes de la section Hockey East comme Providence, UMass et Boston College en est une autre.

C’est le défi que se lance le grand ailier de puissance pour les prochains mois.

« Je n’ai joué que 28 matchs depuis mon arrivée à BU. Je dois continuer de gagner en expérience et prouver à tout le monde – moi-même, mes coéquipiers et tous ceux qui regardent – ce dont je suis capable. Je sais que j’ai beaucoup à offrir. Les matchs à venir contre ces équipes de tête seront pour moi un véritable test et l’occasion pour notre équipe d’amasser des points précieux. Je sais ce dont je suis capable. Je crois l’avoir montré par moments l’an dernier et maintenant que j’ai retrouvé un certain momentum, je veux m’en servir pour continuer d’avancer. »